AGOA, un libre-échange Afrique-États-unis « protectionniste » : Associer la Diaspora Africaine Indépendante.

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La lisibilité de la politique africaine du Président américain Donald Trump est de plus en plus opaque. En choisissant de promouvoir l’image internationale d’un régime cinquantenaire connu pour ses abus en tous genres, il y a manifestement un problème de défaillance stratégique au sein du Département d’État.

AGOA, un libre-échange Afrique-États-unis « protectionniste » : Associer la Diaspora Africaine Indépendante.

A force de ne vouloir satisfaire sélectivement que le marché américain en privilégiant des pratiques bureaucratiques et fastidieuses pour profiter de la Loi sur le commerce et le développement (AGOA), les États-Unis sous les Administrations « Démocrates » comme celle des « Républicains », ont délibérément fait de cette Loi un instrument de promotion d’une future zone de libre-échange entre les États-Unis et l’Afrique.

Cette vision futuriste où les poules auront des dents passe par l’AGOA qui semble en réalité favoriser un libre-échange protectionniste au profit des États-Unis tout en détournant l’Afrique de se concentrer sur son industrialisation, créatrice d’emplois décents. Mais le véritable constat est l’absence caractérisée d’association au processus des échanges gagnant-gagnant, de la Diaspora africaine indépendante et entreprenante y compris les représentants du Black Caucus Américain, membre à part entière de la 6e région africaine que constitue la Diaspora africaine au sens historique.

1. AGOA : Légitimer Un Régime Cinquantenaire De La Contre-Vérité Des Urnes ?

Les échanges avec l’Afrique sous AGOA sont en perte de vitesse. Entre 2015 et 2016, les exportations américaines vers le Togo ont chuté de 22 %, passant de 311,82 million de $ des États-Unis ($EU) à 243,36 million de $ EU, reflétant la contre-performance au niveau de l’Afrique subsaharienne avec une baisse des exportations américaines de 24,5 % passant de 18.010,85 millions de $EU à 13.601,50 million de $EU pour la même période. Au niveau des importations, il y a eu une amélioration de 6,4 % avec 18.840,59 millions de $EU de biens importés d’Afrique subsaharienne par les États-Unis en 2015 contre 20.131,94 million de $EU en 2016. Par contre avec le Togo, on enregistre un effondrement du niveau du commerce bilatéral avec les États-Unis de plus de 23,6 %, rapporté par les statistiques du département du commerce américain. Les importations américaines en provenance du Togo sont passées de 14,21 million de $EU en 2015 à 10,85 million de $EU 2 en 2016.

La question est de savoir pourquoi le Togo a servi d’espace de rencontres pour la Loi américaine sur le commerce et le développement (AGOA) entre le 8 et le 10 août 2017. Certainement pas parce-que le Togo est un modèle à suivre ! Alors est-ce une erreur stratégique du Département américain et des experts AGOA, dont la présence à Lomé n’a servi en définitive qu’à légitimer un régime non démocratique, piétinant depuis cinquante ans le verdict de la vérité des urnes, portant systématiquement atteinte à la liberté de manifestation et abusant du recours aux forces de sécurité pour empêcher des marches pacifiques ? Assurément !

Les États-Unis, n’ont toujours pas de politique africaine officielle sous l’Administration du Président Donald Trump. Ce dernier pourrait revoir l’approche stratégique américaine sur le commerce et l’investissement en Afrique et ne pas continuer à donner l’impression de se faire « rouler dans la farine de manioc » par Faure Gnassingbé, le Président du Togo qui a jugé plus importante une réunion impromptue en Israël que la Conférence AGOA sur son territoire. Les États-Unis – qui aiment se représenter comme des parangons de liberté -, sont en contradiction avec eux-mêmes lorsqu’ils font la promotion d’un système politique cinquantenaire, anti-alternance démocratique où la « bonne » gouvernance, à savoir la croissance inclusive, les droits sociaux, le respect des droits humains et des libertés, sont structurées par l’arbitraire et les pratiques abusives des militaires non Républicains et une oligarchie irresponsable au pouvoir, avec toutefois l’appui de quelques multinationales post-coloniales.

2. Les Échanges Avec L’Afrique Sous AGOA En Perte De Vitesse

La Loi américaine de l’an 2000 sur le commerce et le développement a été promulguée le 18 mai 2000 sous le mandat du Président américain Bill Clinton et avait pour titre « Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique » dite AGOA. Cette Loi avait pour ambition de soutenir le développement des pays africains, choisis par les États-Unis, en offrant un système généralisé de préférences (SGP) commerciales. Environ 6.800 produits peuvent entrer aux États-Unis hors taxes sauf que la plupart de ces produits ne peuvent entrer à cause de barrières non tarifaires et de la sous-industrialisation des pays africains. Avec la primauté américaine pour le commerce et l’investissement notamment le pétrole, les produits miniers non transformés, le textile et l’habillement, les produits agricoles non transformés 3, c’est en fait le refus de soutenir l’industrialisation africaine qu’il faut retenir, ce avec la complicité de certains dirigeants africains.

L’AGOA n’a pas encore permis de faire évoluer les pays africains vers leur indépendance économique et financière. Donc, le « véritable partenariat dans l’avenir » que souhaitent les États-Unis, pourrait créer un véritable « clash » avec un véritable objectif d’amélioration du mieux-être des populations africaines. Il ne faut donc pas confondre les objectifs recherchés par les populations et ceux recherchés par certains dirigeants et chefs d’État africains lorsque de nouvelles stratégies de libre-échange, entre les États-Unis et l’Afrique organisée en blocs régionaux, se dessinent ou justement ne se dessinent pas…

Qu’en est-il de l’AGOA 17 ans après sa création, quand les exportations africaines ont chuté, passant de plus de 81 milliards de dollars des États-Unis ($EU) en 2008 à 18,7 milliards de $EU en 2015 ? Selon les statistiques du Département du commerce des États-Unis (Bureau du recensement sur le commerce des États-Unis) et sur la base des statistiques les plus récentes sur le commerce entre l’Afrique subsaharienne et les États-Unis entre janvier et décembre 2016, le commerce total des États-Unis (exportations et importations confondues) avec l’Afrique subsaharienne (ASS) enregistre une baisse de 8,5%, passant de 36,9 milliards de dollars en 2015 à 33,7 milliards de dollars, ce qui représente moins de 1% (0,93%) du total du commerce américain avec le monde.

Alors que les importations américaines en provenance de l’Afrique subsaharienne ont augmenté en 2016, les exportations américaines ont considérablement baissé, ce qui a entraîné une baisse du commerce total.  Mais si on s’attarde uniquement sur les échanges entre les États-Unis et les pays AGOA, la tendance, au cours des trois (3) dernières années, est à la baisse structurelle (voir le tableau 1). Pour prendre l’exemple du Togo qui estime être un « modèle » pour l’AGOA, le commerce tous secteurs confondus est largement déficitaire au profit des États-Unis. Donc le « America First » s’applique parfaitement. En 2016, les exportations des Etats-Unis vers le Togo s’élevaient à 23,3 million de $EU contre 2,1 million de $EU d’importations des États-Unis à partir du Togo, en sachant que si l’on exclut les importations grâce au système de préférences généralisées (SPG), les Etats-Unis n’ont rien importé du Togo sous régime AGOA en 2016.

Tableau 1 – Bénéficiaires d’AGOA. Le commerce tous secteurs confondus, les données sont en millier de $EU (000) et portent sur l’année complète (de janvier à décembre) Les secteurs couverts sont : Les produits agricoles, les produits forestiers, les produits chimiques et dérivées, les produits hydrocarbures et dérivées, les produits du textile et de l’habillement, les chaussures, les minéraux et les métaux, les machines, les équipements de transport, les produits électroniques, les produits manufacturiers divers, et les provisions spéciales

AGOA, un libre-échange Afrique-États-unis « protectionniste » : Associer la Diaspora Africaine Indépendante.3. AGOA : Un Instrument Du Protectionnisme Commercial Americain

Si on devait s’attarder sur les désagrégations par principaux secteurs, il faut se rendre à l’évidence que la baisse structurelle des échanges sous AGOA se confirme à tous les niveaux. Il y a donc bien un véritable problème avec les objectifs réels poursuivis par les tenants de l’AGOA et une incompréhension de la part des dirigeants africains à ne pas tenter de renégocier les conditions AGOA en tenant compte de leur niveau de développement industriel individuel et collectif (voir le tableau 2).

Tableau 2 – Bénéficiaires d’AGOA. Le commerce tous secteurs confondus, les données sont en millier de $EU (000) et portent sur l’année complète (de janvier à décembre) Les secteurs couverts sont : Les produits agricoles, les produits forestiers, les produits chimiques et dérivées, les produits hydrocarbures et dérivées, les produits du textile et de l’habillement, les chaussures, les minéraux et les métaux, les machines, les équipements de transport, les produits électroniques, les produits manufacturiers divers, et les provisions spéciales

AGOA, un libre-échange Afrique-États-unis « protectionniste » : Associer la Diaspora Africaine Indépendante.En réalité, les facilités offertes par l’AGOA ont d’abord et principalement pour objectif de satisfaire le marché américain, notamment pour les trois premiers secteurs que sont les hydrocarbures, les minerais et les équipements de transport. Les exportations africaines vers les États-Unis sont alors scrupuleusement contrôlées afin de ne favoriser que les produits insuffisamment présents sur le marché américain, ou alors permettant d’augmenter la concurrence entre pays en développement afin de faire baisser le prix à la consommation aux États-Unis. L’AGOA est donc paradoxalement un instrument du protectionnisme commercial américain.

Aussi à terme, dès que la compétition et la concurrence des produits africains notamment dans le secteur manufacturier vont s’affirmer, il ne faudra pas s’étonner de voir l’AGOA être supprimé en 2025, ou même avant, compte tenu de la volonté de protectionnisme commercial affichée par le Président Donald Trump. D’ailleurs, la volonté affichée de supprimer l’espace de libre-échange nord-américain ALENA/NAFTA (États-Unis, Canada, Mexique) et de revenir à un protectionnisme belliqueux, n’est qu’un des signes avant-coureurs des renégociations commerciales.

La volonté de supprimer les organes de règlement des contentieux commerciaux, apporte un début de preuve que les États-Unis sont trop régulièrement ceux qui ne respectent pas le libre-échange commercial et de ce fait, sont aussi régulièrement condamnés par des juridictions commerciales internationales et indépendantes.

En réalité, c’est bien le principe du « rapport de force » que les États-Unis veulent réintroduire graduellement dans les échanges commerciaux mondiaux, dès lors que la résultante de ces échanges se fait à leurs dépens.

Mais quel est le problème au fond ?

Sur plusieurs dossiers, la compétitivité américaine n’est plus démontrée et stratégiquement – comme au demeurant pour les pays de l’Union européenne ayant une histoire coloniale avec l’Afrique -, c’est le refus d’un partenariat commercial sur des bases équitables. Aussi, des deux côtés de l’Atlantique, les États-Unis comme l’Union européenne ont systématiquement été contre l’industrialisation et la transformation des matières premières africaines en Afrique et par des Africains, à partir de contenus technologiques et du savoir-faire. De nombreuses manœuvres de déstabilisation ont été utilisées pour stopper net la montée en puissance de régimes démocratiques en Afrique. La contre-vérité des urnes a permis d’en assurer une certaine pérennisation. Les puissances commerciales occidentales ont ainsi pu trouver localement des relais, « constructifs » pour leurs intérêts, au niveau de certains dirigeants publics et privés pour perpétuer ce mécanisme d’approvisionnement à la carte des pays industrialisés.

Le principe du libre-échange s’est perpétué dans le cadre d’un rapport de force sournois, ésotérique et discret où les barrières tarifaires d’abord, puis les barrières non-tarifaires ensuite, ont servi de « carotte » et de « bâton », alternativement au gré des besoins des intérêts privés… D’ailleurs, la politique commerciale et vraisemblablement africaine du Président Donald Trump, – toujours pas officialisée par ailleurs -, risque de mettre davantage l’accent sur le « bâton », afin de faciliter les servitudes volontaires et les positionnements ou alignements sur les positions américaines.

Le problème est que cela contribue à augmenter la pauvreté et l’humiliation d’un continent riche de ses milliards de pauvres. La résultante est toujours la même à terme : une rupture. Elle pourra être, selon les circonstances et les particularités locales, pacifique par la diversification, ou violente par des groupes de laissés-pour-compte qui rejoignent souvent les rangs du terrorisme international, ces nouveaux assoiffés de la déstabilisation de proximité au plan mondial.

La diversification des dirigeants africains les plus conscients, avec d’autres partenaires des pays en développement, notamment la Chine, pourrait être la solution à l’après-AGOA. En effet, ces pays émergents sont dans une logique de perpétuation des politiques de non-alignement et de stratégie économique « gagnant-gagnant ». Toutefois, la Chine n’a pas véritablement opté pour l’industrialisation des pays africains, notamment en favorisant l’entrepreneuriat africain et en ouvrant le marché chinois aux produits africains transformés.

4. AGOA, Une Strategie De Marginalisation De L’Industrialisation Africaine

Les principales raisons du déclin du commerce Amérique-Afrique doivent être recherchées dans une approche stratégique excluant le développement industriel de l’Afrique. L’Administration bipartisane (Démocrates comme Républicains) a privilégié un retour sur investissement à court terme pour la partie américaine (secteur privé) tout en sécurisant des approvisionnements en matières premières africaines (secteur public). Cette stratégie a été confortée par certains dirigeants africains, que ce soit par conviction pour le libre-échange ou par ignorance, car croyant pouvoir « accéder et contrôler » une partie des financements liés aux investissements par le biais de la fiscalité ou par l’arbitraire de la corruption.

Même au niveau des échanges commerciaux, les exportations des États-Unis vers l’Afrique subsaharienne ont connu une forte baisse de 24,5%, passant de 18 milliards de dollars en 2015 à 13,6 milliards de dollars en 2016 et ne représentaient que 0,9% du total des exportations américaines vers le monde. Par ailleurs, la baisse importante des exportations des États-Unis vers l’Afrique subsaharienne en 2016 peut être attribuée à une baisse de 39% des ventes de produits hydrocarbures (principalement le pétrole), à une baisse de 38% des ventes de véhicules, à une baisse de 32% des ventes d’avions et à une baisse de 31% des ventes de pièces de machines (forage/construction, aéronefs et véhicules à moteur). En raison d’une large et exceptionnelle vente d’avions, seul l’Angola a connu une hausse des exportations américaines de 9,4%. Presque tous les cinq premiers pays en Afrique subsaharienne ont connu une baisse sérieuse : l’Afrique du Sud : 14,2%, le Nigeria : 45,5%, le Ghana : 12,6% et l’Éthiopie : 46,8%.

Dans un contexte de baisse, les importations américaines en provenance d’Afrique subsaharienne ont connu une légère hausse de 6,9%, passant de 18,7 milliards de dollars en 2015 à 20,1 milliards de dollars en 2016, ce qui représente 0,9% du total des importations américaines en provenance du monde. Les importations américaines en provenance l’Afrique subsaharienne bénéficiant des avantages de la Loi sur la croissance et les possibilités en Afrique (AGOA) ont totalisé 9,3 milliards de dollars, soit une baisse de 35% par rapport à l’année précédente, et représentaient 49,6% du total des importations américaines en provenance de l’Afrique subsaharienne.

Au plan sectoriel, selon les statistiques du département du commerce américain 8, les principales importations américaines sont dominées par des produits non transformés, comme le pétrole (90% brut), les diamants et le platine, les fèves de cacao et les pièces détachées/transport aérien. Plus précisément, les importations en baisse de la SSA ont été déclenchées par une diminution de 50% des produits d’hydrocarbures minéraux (principalement du pétrole brut), d’une diminution de 37% des importations de diamants et d’une diminution de 36% des importations de fer et d’acier.

Le Nigeria avec une augmentation de 118% (principalement le pétrole brut), la Côte d’Ivoire avec une augmentation de 13,2% (principalement le cacao) et l’Angola avec une augmentation de 1,8%, ont été les 3 principales sources d’importation de SSA aux États-Unis. Malgré une forte baisse de 31% pour le Tchad et de 7,6% pour l’Afrique du Sud, ces deux pays sont respectivement la cinquième et la quatrième source d’importations américaines.

Avec une diminution de 48% des importations de produits pétroliers, les produits hydrocarbures représentent 55,6% de toutes les importations d’AGOA. « À l’exclusion des produits combustibles, les importations d’AGOA en 2015 ont totalisé 4,1 milliards de dollars, en baisse de 6 % par rapport à 2014. Les importations d’équipements de transport d’AGOA ont augmenté de 5,4%, les textiles et les vêtements ont augmenté de 0,1%, les minéraux et les métaux ont diminué de 36,7% et les produits agricoles ont diminué de 0,3%. Cependant, on notera également une augmentation des importations de produits manufacturés divers de 38,2%. Les cinq principaux pays bénéficiaires de l’AGOA étaient l’Afrique du Sud, l’Angola, le Tchad, le Nigeria et le Kenya.

5. AGOA : Satisfaire D’Abord Et Sélectivement Le Marche Americain

En 2016, la part de l’Afrique comme exportateur dans le commerce mondial ne représentait que 2,2 % (contre 2,4 % en 2003) alors qu’en tant qu’importateur, cette part représentait pour la même année 3,2 % (contre 2,2 en 2003 10). Donc, le continent africain continue en fait de refuser globalement une rupture avec sa stratégie de non-transformation sur place des matières premières, même si de nombreux dirigeants africains et plus particulièrement la Commission de l’Union Africaine et la Banque Africaine de Développement, sont conscients de la nécessité et de l’urgence de l’industrialisation du continent. C’est dans ce contexte qu’il convient d’analyser et faire un bilan d’étape des échanges commerciaux entre les États-Unis et l’Afrique.

Il s’agit dans le cadre de la Loi américaine sur la croissance et les possibilités économiques d’offrir des avantages commerciaux à certains pays d’Afrique subsaharienne. La réalité est que les conditions de gouvernance, le niveau de capacités productives et commerciales de la plupart des pays choisis ne permettent justement pas de bénéficier de cette offre « alléchante ». Aujourd’hui avec près de 6 800 produits sont admissibles aux Etats-Unis sans droits de douanes. Il s’agit surtout de matières premières non transformées (pétrole et produits miniers et agricoles). Mais, avec une réorientation de la Loi vers le « commerce et l’investissement », les États-Unis considèrent en filigrane donc que le développement des pays éligibles est accessoire par rapport à la priorité de promouvoir les investissements américains. Sur les 55 pays africains, 38 sont éligibles à l’AGOA même si les conditions d’éligibilité ne sont pas toujours suivies à la lettre (voire dans de nombreux cas, pas du tout respectées) à savoir : respect des droits humains, une gouvernance économique et politique reposant sur le fait de rendre compte, le respect de procédures démocratiques, aucun protectionnisme des pays africains (pas d’exclusion ou limitation douanière) à l’encontre des produits américains en Afrique, le respect des pratiques en matière de droit du travail à des fins de protection du travail décent, etc.

6. AGOA, Amputer l’Industrialisation Pour Un Libre-Échange Protectionniste

Au lieu d’inclure la notion de capacités productives et d’industrialisation dans la Loi (AGOA), les États-Unis ont en fait mis en place une stratégie de protectionnisme doux « soft protectionism » avec en filigrane une diplomatie d’influence plus connue sous le vocable de « soft diplomacy ». Cette diplomatie douce repose sur une stratégie à long-terme devant conduire au Libre-échange commercial intégral entre les États-Unis et les pays éligibles et donc « amis ». Cette stratégie concerne essentiellement le commerce, l’aide bilatérale (pas nécessairement pour le développement), l’investissement avec comme objectif que les pays africains puissent s’affranchir des multiples tutelles et deviennent autonomes.

En réalité, il s’agit de réaliser un partenariat d’égal à égal avec les pays africains éligibles tout en maintenant un « soft power » favorisant les États-Unis. Si les dirigeants africains étaient dupes par le passé, aujourd’hui il y a de plus en plus de discernement. La comparaison avec les performances commerciales entre la Chine et l’Afrique et celles entre les États-Unis et l’Afrique offrent un espace de « contestation douce » pour certains dirigeants africains conscients. Par ailleurs, cette autonomisation (empowerment) économique des États africains que souhaitaient les dirigeants américains repose d’abord sur un rapport de force asymétrique et des accords secrets militaires et de sécurité. Ce rapport de force fait des dirigeants des pays africains éligibles des pays dociles qui s’alignent sur les positions américaines partout où c’est possible. Les plus téméraires choisissent, à leurs risques et périls, d’opter souvent pour l’abstention, la neutralité ou une non-objection héritée justement de rapports d’influence. Dans les faits, en aucun cas, personne n’ose s’opposer. En effet, la sanction est immédiate avec une perte sèche des financements américains qui s’accompagne assez souvent de représailles discrètes qui pourraient conduire à des évictions du pouvoir pour les dirigeants africains. Le Togo pourrait expérimenter cette situation dans les semaines à venir pour avoir boycotté la cérémonie d’ouverture de l’AGOA au Togo.

Aussi, la peur de la diplomatie dure, c’est-à-dire l’interventionnisme préventif pouvant aller jusqu’à une guerre, comme moyen de gagner des amis et des alliés dans le monde africain ne peut être écartée en termes d’analyse géostratégique. Les liens multiples qui font que ce sont des pays amis des États-Unis qui assurent la sécurité de nombreux chefs d’État en Afrique subsaharienne conduisent à ménager les États-Unis. Il s’agit de ne pas devenir le bouc émissaire d’une gouvernance américaine qui sous l’égide du Président Donald Trump est fondée sur le fait du prince, avec la capacité de nuisance éventuelle et bien sûr l’arme favorite, les interventionnismes fondés sur l’arbitraire décisionnel. La réalité sur le terrain, c’est l’autocensure et la diversification des partenaires étrangers qui l’emportent. Il n’est donc pas étonnant que les pays africains cherchent à se passer de l’AGOA qui pose des conditions d’admissibilité de plus en plus difficiles, voire impossibles à remplir pour les produits africains, transformés ou pas, manufacturés ou pas. Les avantages commerciaux pour l’Afrique subsaharienne demeurent faibles. La réalité des rapports de force ont conduit de nombreux pays à s’aligner sur les conditions américaines.

Mais personne ne doit se tromper sur la stratégie cohérente et clairement affichée des États-Unis quelle que soit l’Administration au pouvoir à Washington. Il s’agit de faire passer l’AGOA d’un objectif d’appui au développement des pays africains, vers celui plus flou d’appui au commerce et à l’investissement au profit des États-Unis. Tout en s’assurant un certain protectionnisme du marché américain contre les produits industrialisés qui pourraient provenir d’Afrique, surtout si les équipements proviennent d’autres pays.

Mais l’objectif ultime de la politique américaine africaine est d’utiliser la notion galvaudée qu’est l’intégration régionale – que les dirigeants africains peinent à mettre en œuvre au plan opérationnel sur le terrain – pour faire évoluer les pays africains vers un libre-échange intégral entre les marchés américains et ceux d’Afrique tout en veillant à se protéger par des clauses tarifaires ou non tarifaires.  Donald Trump n’a toujours pas clarifié sa position sur la politique africaine de son Administration, mais cette politique sera d’abord protectionniste et fondée sur un rapport de force commercial. Les pays africains qui continuent à ne pas s’organiser collectivement auront peu de chances de faire face à une « intégration commerciale États-Unis/Afrique ». Rien ne semble détourner les États-Unis d’atteindre cet objectif à terme. Néanmoins, tous ceux qui nourriraient quelque velléité de s’y opposer, risqueraient d’encourir les « sanctions » héritées de la puissance douce « soft power », américaine. Face à cette complexité de cette politique américaine africaine illisible pour le moment, certains chefs d’État croient encore que l’AGOA n’est qu’une « banque » et ne comprennent toujours pas pourquoi l’argent ne coule pas flot… La défection de certains dirigeants africains peuvent s’expliquer par cela.

7. AGOA : Bureaucratie, Commerce Et Investissement Sans Industrialisation

C’est au cours du 15e Forum de la Loi sur la Croissance et les Opportunités en Afrique (AGOA) de Washington (22 au 27 septembre 2016) que le Togo a été choisi pour abriter (8 au 10 août 2017) la 16e édition de l’AGOA Forum permettant des discussions et des échanges entre les États-Unis et l’Afrique. Principalement sur l’amélioration des échanges commerciaux et les investissements sur des bases de préférentielles tarifaires au profit de l’Afrique. En principe, la 17e édition aura lieu à Washington D.C. aux États-Unis et la 18e édition à Abidjan en Côte d’ivoire, pays qui en a fait la demande par la voix de son ministre du Commerce, M. Souleymane Diarrassouba qui a reçu une acceptation unanime des pays membres de l’AGOA.

Alors qu’il devait ouvrir le Forum de l’AGOA, Faure Gnassingbé, le Chef d’Etat du Togo est parti pour une mission officielle imprévue en Israël, apparemment à la demande du Premier Ministre israélien, Benyamin Nétanyahou. Komi Selom Klassou, le Premier Ministre, l’a remplacé au pied levé. Robert Dussey, le Ministre des Affaires étrangères était en Iran. Une coïncidence ? Les responsables américains et de l’AGOA apprécieront.

Les organisateurs du 16e Forum de l’AGOA au Togo, au travers des voix de Mme Bernadette Legzim-Balouki, la ministre togolaise du Commerce et de la Promotion du Secteur Privé, Mme Dédé Ahoefa Ekoué, la présidente du Comité national d’organisation du Forum, M. David Gilmour, l’Ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique au Togo, Neubert Brian, l’un des porte-parole du Département d’État (ministre des affaires étrangères) des Etats-Unis et Robert Lighthizer, le représentant au Commerce des Etats-Unis, ont loué la bonne organisation de l’évènement qui regroupait les délégations de 38 pays africains éligibles et portait sur : « Les États-Unis et l’Afrique : partenariat pour la Prospérité à travers le Commerce ».

Sur le fond, les avis des participants, mais aussi de certains officiels divergeaient sur la capacité de l’AGOA à conduire à des échanges « gagnant-gagnant » avec les pays africains éligibles. Bref, un véritable quiproquo a en fait émergé et porte en fait sur la réalité des faits et des pratiques de l’Administration américaine envers le secteur privé. Le refus de considérer l’industrialisation avec des opérateurs africains transparents et la bureaucratie des procédures AGOA deviennent des freins à l’initiative privée, surtout quand d’autres marchés semblent moins contraignants. Il faut néanmoins rappeler que :

  • Les importations des Etats-Unis parmi plus de 6.800 produits sélectionnés 14 en provenance des pays éligibles à l’AGOA ont chuté, passant d’environ 26,8 à 18,7 milliards de dollars américains ($EU) 15, soit une chute de 30,1 % ; ce qui réduit la part africaine des importations totales américaines dans le commerce mondial à 0,8% ;
  • Tout autre produit ou article que les États-Unis considèrent unilatéralement et discrètement comme étant d’importation sensible dans le cadre du Système généralisé de préférence (SGP) n’est pas éligible, en réalité la plupart des produits manufacturiers qui viendraient concurrencer les produits existant sur le marché américain et dont le prix est jugé suffisamment compétitif compte tenu de la compétition sur le marché américain ;
  • Tout produit ou article que les États-Unis considèrent unilatéralement et discrètement comme ne répondant pas aux normes américaines ou ne répondant pas aux règles spécifiques supplémentaires de l’AGOA. Sinon ce produit ou article ne bénéficiera pas du régime d’admission en franchise ;
  • Les justificatifs à fournir pour bénéficier de la franchise d’admission sont particulièrement contraignantes et en fait bureaucratiques. Ce sera l’occasion pour la Diaspora africaine de créer une structure paritaire avec les responsables de l’AGOA pour la création d’un centre de formalité unique (One-Stop-Shop) de l’AGOA ;
  • Une absence ou un faible accompagnement des entrepreneurs africains en Afrique mais aussi ceux de la Diaspora, si possible indépendante des pouvoirs en place, qui veulent respectivement exporter vers ou importer leurs produits aux États-Unis.

Ni les dirigeants africains, ni les responsables AGOA, n’ont structuré  les accompagnements pour le secteur privé comme par exemple un fonds révolving pour financer les études de préinvestissement, de marché et de faisabilité, une structure d’information et de procédure unique pour les formalités, des experts pour libérer l’entrepreneur des tâches bureaucratiques imposées par l’AGOA, et bien sûr des facilités fiscales pour le transfert de capacités productives et de technologies ou de savoir-faire.

Rappelons que le Togo a exporté pour 1.290 million de $EU de marchandises en 2016 contre 2.382 million de $EU d’importations avec une balance commerciale déficitaire de 1.092 million de $EU, soit près de 83% de ses exportations. Une telle politique commerciale déficitaire ne peut être pérenne sans un non-respect des pratiques de bonne gouvernance, politiques et économiques. Dans le domaine des services commerciaux, la situation du Togo est meilleure avec 481 million de $EU d’exportation contre 396 million de $EU d’importation, mais la contribution de ce secteur à la richesse nationale demeure faible.

8. AGOA : Un Instrument De Promotion De Zones De Libre-Echange

En réalité, les responsabilités sont partagées car le Forum AGOA souffre d’une domination du rapport de force américain dans les propositions pour faire progresser la Loi AGOA, avec le risque que d’ici 2025, cet avantage commercial ne soit carrément supprimé. En réalité, pour permettre une amélioration des résultats de l’AGOA, il importerait d’avoir en amont une structure quadripartite où siégeraient les représentants de l’AGOA, ceux des gouvernements des pays africains, des représentants du secteur privé et les organisations de la société civile y compris une diaspora indépendante. En l’absence d’une telle structure, les seules idées mises en œuvre sont celles des États-Unis, qui sont de fait les principaux responsables du déclin des performances de l’AGOA constaté récemment.

Les recommandations du Forum AGOA du Togo (10 août 2017 17) se résument à conseiller les pays africains éligibles à s’organiser pour aller vers une « zone de libre-échange continentale (ZLEC) » en attendant une zone de libre-échange États-Unis/Afrique ». La réalité est que les coûts des facteurs (électricité, communications Internet, accès à l’eau, coût des transports, etc.) et les difficultés persistantes sur le terrain pour faire circuler les marchandises librement d’un État à un autre, mais aussi à l’intérieur des États 18, conduisent à des coûts non compétitifs des produits en général, des produits transformés en particulier.

Aussi, tant que cet environnement des affaires perdurera, il sera difficile de voir les relations commerciales et d’investissement avec les États-Unis contribuer à l’amélioration des capacités productives et une amélioration de la valeur ajoutée manufacturière (VAM) des pays africains. Rappelons tout de même que le niveau des investissements étrangers directs (IED) au Togo a évolué en dents de scie entre 2014 et 2017 (voir tableau 3 ci-après). En comparaison, la part des IED des pays voisins (Bénin et Ghana) ou même de l’Afrique subsaharienne dans le produit intérieur brut (richesse produite) au cours de la même période témoigne de la difficulté pour certains investisseurs de choisir le Togo comme une destination stable malgré un code d’investissement et une zone franche attractive. La réalité des pratiques de l’environnement des affaires sur le terrain et les coûts de transaction ne sont pas compétitifs 19 notamment au cours du 2e mandat présidentiel de Faure Gnassingbé (voir tableau 3 ci-après).

AGOA, un libre-échange Afrique-États-unis « protectionniste » : Associer la Diaspora Africaine Indépendante.En comparaison des niveaux élevés d’IED atteints par le Ghana depuis 2014, en termes d’investissements étrangers directs, dus à la stabilité et la prévisibilité de l’environnement des affaires, en raison d’une alternance politique effectuée systématiquement par l’acceptation de la vérité des urnes et le respect mutuel entre les candidats, il y a lieu de croire que les investisseurs actifs dans le domaine de la transformation et donc de l’industrialisation ne se précipiteront pas au Togo, malgré un centre de formalités des entreprises très performants.

A moins que des réformes importantes ne soient entreprises pour une meilleure protection des investisseurs et plus particulièrement des entrepreneurs en général, ceux de la Diaspora en particulier.

Aussi, l’appui évasif proposé aux pays éligibles de l’AGOA par les autorités américaines suppose de passer par les conditionnalités de l’Organisation mondiale du Commerce afin de profiter de l’Accord de facilitation économique (AFE 20) de cette organisation. Cela risque dans la pratique de n’être qu’un handicap supplémentaire pour les femmes et hommes d’affaires et entrepreneurs. Sur 121 pays qui ont ratifié les AFE de l’OMC, le Togo l’a fait le 1er octobre 2015 et pourtant cela n’a pas véritablement modifié le comportement des investissements américains, ni amélioré substantiellement le niveau du développement des capacités productives et donc l’augmentation des échanges entre les États-Unis et le Togo.

9. AGOA : Associer La Diaspora Africaine Indépendante Et Entreprenante

Parmi les recommandations formulées pour faciliter l’entrée des produits africains sur le marché américain, un consensus s’est dégagé pour réduire les barrières non tarifaires en améliorant, entre autres, les normes, les mesures sanitaires et phytosanitaires des produits agricoles et alimentaires afin de transformer les pays africains éligibles en pays pouvant répondre en temps, en prix et qualité à l’offre du marché américain. Mais participer efficacement aux chaînes de valeurs mondiales suppose une véritable intégration qualitative dans les chaînes de valeurs locales, à savoir nationales et régionales. Donc les défis africains sont alors rappelés, notamment les infrastructures physiques et électroniques, un environnement des affaires prévisible et non bureaucratique, une réforme crédible du mode d’organisation démocratique de la société africaine mettant fin à l’arbitraire, une rupture avec une certaine tolérance exacerbée pour la corruption et la fraude financière et fiscale, des politiques de réduction des coûts des facteurs et de transaction freinant les échanges, et bien sûr des incitations pour générer de plus en plus d’entrepreneurs, afin d’assurer une création de richesses inclusive, avec des emplois décents pour les populations, dont les nombreux jeunes et les femmes.

Aussi, il ne faut pas simplement se mettre à niveau en termes d’opérationnalisation des recommandations de l’AGOA afin de répondre aux exigences du marché américain, mais il faut simultanément en profiter pour répondre aussi aux besoins urgents du marché africain en augmentant la productivité, en faire profiter des bénéfices les fameux millions d’« en bas d’en bas »… sans oublier le marché de la classe moyenne en constante progression. Les « haut-d’en-haut » profitent suffisamment déjà des défaillances du système politique, juridique et économique africain.

A moins de favoriser et faciliter une participation massive de la Diaspora africaine indépendante, la trajectoire suivie par la Loi américaine, sur le commerce et l’investissement, risque d’être totalement refondue voire de disparaître d’ici à 2025. La voie sans issue vers un libre-marché Etats-Unis/Afrique à terme ne pourra pas profiter aux populations africaines restées sur le continent sans l’apport de la Diaspora africaine indépendante.

Plus globalement, devant une remilitarisation du monde en cours d’accélération et des échanges commerciaux structurés organisés entre de grands blocs régionaux, les dirigeants africains devront rapidement comprendre que tous nouveaux accords commerciaux fondés sur l’investissement et l’émergence économique de l’Afrique ne pourra pas faire l’économie du développement des capacités productives avec des clauses temporaires de protectionnisme des industries naissantes en Afrique. Notamment dans les chaînes de valeur stratégiques et d’indépendance économique, des transferts de technologies et de délocalisation d’industries et surtout des clauses de performance fondées sur la prévisibilité et l’effectivité opérationnelle de l’environnement des affaires et un coût des transactions compétitifs.

Cette nouvelle génération d’accords de partenariat stratégique ne peut plus exclure l’industrialisation et l’emploi décent en Afrique, sous peine de continuer à alimenter le niveau record de l’immigration africaine vers les pays du Nord, qui pourront de moins en moins continuer à faire semblant de s’en étonner.

10. DE l’AGOA à l’AIDA (African Inclusive Development Act / Loi sur Le Développement inclusive de l’Afrique)

Dans le cadre de ce qui précède, l’approche stratégique passée des États-Unis basée sur des importations de produits commerciaux principalement non transformés doit changer. L’Administration Trump doit pouvoir intégrer la Diaspora africaine indépendante dans sa nouvelle politique africaine.  Aussi, il est permis de suggérer comme conseils à l’Administration Trump d’établir une structure paritaire pour mieux travailler plus étroitement avec la Diaspora africaine indépendante y compris au sein du Caucus noir du Congrès aux Etats-Unis. Les résultats commerciaux entre les États-Unis et l’Afrique sous AGOA peuvent durablement remonter grâce à une nouvelle approche tripartite incluant cette Diaspora entreprenante et innovante.

La politique fiscale de l’Administration Trump vers les dirigeants et les entrepreneurs doit offrir des conditions prévisibles et transparentes pour que les gouvernements africains puissent soutenir efficacement le développement du secteur privé sur une base équitable. Cela ne pourra pas se faire sans une refondation et une réintroduction du développement des capacités productives, et donc de l’industrialisation, dans les textes régissant les échanges entre les grandes régions du monde et l’Afrique.

La nouvelle administration américaine devrait reconnaître que toute amélioration du secteur privé africain, y compris la Diaspora africaine, profitera au commerce bilatéral « américano-africain ». Dans cette perspective, il est crucial de rappeler qu’au cours des 60 dernières années qui ont suivi l’indépendance des pays africains, les gouvernements africains n’ont pas jugé nécessaire de donner une priorité pour le développement du secteur privé, notamment en mettant l’accent sur le développement des entreprises et des entrepreneurs. Par conséquent, nombreux sont aujourd’hui les obstacles, en termes de gouvernance, de protection sociale, de possibilités d’emplois et d’affaires, de démocratie équitable et de représentations effective des personnes dans les organes électifs. L’ensemble du système institutionnel de la compétitivité, du commerce, de l’industrialisation, de l’investissement est tout simplement sous-performant en Afrique.

10.1  Remplacer AGOA : TRUMP peut creer AIDA

Le concept stratégique clé suivant est suggéré pour améliorer drastiquement les échanges Amérique-Afrique dans les années à venir. Il faut aller vers un changement du logiciel culturel qui devra être fondé sur une participation accrue des autorités américaines à l’amélioration de l’expertise des Diasporas africaines indépendantes et entreprenantes avec comme objectif premier de les utiliser pour soutenir un programme AGOA refondé et renommé AIDA : African Inclusive Development Act, en français « Loi sur le Développement Inclusif de l’Afrique ».

Ce changement culturel exige la diffusion d’une connaissance alternative sur le « concept de migration circulaire » comme moyen d’améliorer le commerce entre les pays industrialisés et l’Afrique et plus particulièrement entre les États-Unis et l’Afrique au sud du Sahara. Cette nouvelle relation tripartite (Etat Américain, Etat Africain, Diaspora Africaine indépendante) ne peut qu’améliorer les contenus technologiques, les capacités productives, la qualité dans les échanges, générer de la valeur ajoutée et des richesses économiques inclusives.

Action suggérée : des représentants de la Diaspora africaine indépendante pourraient proposer un atelier de travail sur le concept de la « Migration circulaire, Diaspora africaine et AIDA» avec les parties intéressées et un accent particulier sur la responsabilité sociale des entreprises pour la mobilisation de fonds.

10.2  Environnement : TRUMP Peut Soutenir l’Économie Circulaire

Une nouvelle approche systémique du commerce et des affaires doit évoluer d’une approche linéaire actuelle de l’exportation et de l’importation vers une nouvelle approche stratégique à long terme basée sur le concept d’économie circulaire. Cette dernière repose principalement sur une réelle prise de conscience de l’urgence à mieux gérer et contrôler les ressources naturelles afin de les économiser de manière innovante et rentable, tout en organisant leur réutilisation et recyclage à tous les niveaux tant pour les produits (intrants et extrants), les processus, les connaissances, le savoir-faire sur une base concurrentielle et coopérative. Les cycles de vie d’un produit ou d’un service devraient tenir compte de l’intégration d’une nouvelle phase de cycle d’utilisation. Bref, le concept de déchet devrait graduellement disparaître au profit de celui du recyclage et donc de l’économie circulaire.

Avec l’introduction de technologies d’information avancées, et avec d’amples largeurs de bande en Afrique, le problème général de la délocalisation et de la relocalisation des industries pourrait ne plus devenir la pierre d’achoppement des politiques protectionnistes. En effet, les « avantages circulaires » qui seront tirés de l’économie circulaire permettront de répartir les valeurs ajoutées créées dans des chaînes transversales d’approvisionnement et contribueront à, une agglomération vertueuse d’entreprises, d’entrepreneurs et de leaders, des pratiques exemplaires de bonne gouvernance fondées sur la responsabilité sociale de l’entreprise et de l’Etat. En changeant la nature et les termes de la relation, cette nouvelle approche de l’économie circulaire devrait contribuer à une plus grande efficacité, y compris les économies sur les coûts, les avantages environnementaux, les nouvelles opportunités d’emplois profitant du processus de mondialisation économique responsable. Cela devrait contribuer à promouvoir la classe moyenne africaine tout en éliminant la pauvreté.

Action suggérée : avec l’aide de l’Administration Trump, mais aussi les autres pays intéressés, la Diaspora africaine indépendante et entreprenante pourrait offrir un atelier sur le concept de « L’économie circulaire, la diaspora africaine et l’AIDA : passer de l’économie linéaire à l’économie circulaire pour le développement des entreprises » avec les parties intéressées et un accent particulier sera porté sur la responsabilité sociale des entreprises pour la mobilisation de fonds.

10.3  AGOA En Transition Entre 2017-2025 : Préparer l’AIDA

Une reconnaissance claire de la mise à niveau de la capacité productive en Afrique est nécessaire, comme moyen de soutenir la diversification en termes de production pour les 6.800 produits éligibles à l’AGOA et échangés entre les États-Unis d’Amérique et l’Afrique subsaharienne. Comme elle ne peut pas être faite avec succès sans la diaspora africaine indépendante et entreprenante, il est également suggéré :

Action proposée : le Département d’Etat américain, mais aussi les structures équivalentes des pays amis de l’Afrique subsaharienne, devraient approfondir la réflexion sur le concept de « Renforcement des capacités productives en Afrique dans la perspective de la refondation de l’AGOA en AIDA ». Aussi il est proposé que le prochain et 17e forum de l’AGOA devant se tenir à Washington ait pour thème : De la refondation de l’AGOA en AIDA.

11. En Guise De Conclusion Provisoire

Les États-Unis et l’Afrique ne peuvent continuer à s’ignorer mutuellement en termes de création de richesses partagées. Le Président Donald Trump ne sera pas un « grand » président qui rentrera dans l’Histoire avec un grand H si sa politique fiscale et d’incitation envers l’Afrique ne considèrent pas le rôle de la Diaspora africaine indépendante, la 6e région d’Afrique, dont une grande partie est aux États-Unis. L’Administration Trump gagnerait à proposer des conditions claires, prévisibles et non bureaucratiques pour que les entrepreneurs, mais aussi les gouvernements africains puissent soutenir efficacement en retour, le développement du secteur privé doté d’une responsabilité sociale. Toute politique antisociale n’a pas d’avenir en Afrique sur le long-terme. La vérité est que toute politique antisociale n’a pas d’avenir aux Etats-Unis non plus. Une leçon à méditer… Faut-il croire les déclarations des autorités togolaises par la voix de Mme la Ministre Dédé Ekoué, la présidente du comité d’organisation du 16e Forum de l’AGOA, selon lesquelles le Togo peut devenir un « hub économique et logistique en Afrique de l’Ouest » alors que les coupures régulières de l’électricité, de l’eau et de l’internet et les entraves à la circulation intra-régionale et intra-nationale ne s’accompagnent pas de dédommagement ? Rien n’est moins sûr pour les opérateurs qui doivent investir leur argent. YEA.

21 août 2017.

Dr Yves Ekoué AMAÏZO, Ph D, MBA


L’auteur est Directeur d’Afrocentricity Think Tank, Coordonnateur du Collectif pour la Vérité des Urnes (Diaspora togolaise), membre du Point Focal Financement du réseau Diaspora togolaise indépendante, du Conseil Economique du Conseil Mondial pour la Diaspora Togolaise, et du Congrès des Economistes de l’Union Africaine.


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