Je suis tombé sur le rapport spécial de l´ONU de 70 pages qui a scellé le sort du Togo britannique en faveur du rattachement à la Côte-de-l´Or (Ghana actuel) par le plébiscite du 9 mai 1956. Aujourd´hui, c´est un grand jour pour moi de pouvoir savoir exactement ce qui avait fait basculer le destin du Togo britannique lors de ce plébiscite. Le PTP de Nicolas Grunitzky et la France ont joué un rôle défavorable et très déterminant dès 1954 empêchant l´indépendance du Togo britannique qui pouvait faciliter plus tard l´unification avec le Togo sous tutelle française car entre-temps, le gouvernement britannique en 1954 a affirmé à l´Assemblée générale de l´ONU qu´il voulait donné l´indépendance complète au Togo britannique en même temps qu´à la Côte-de- l´Or mais la France était très réticente et avait rejeté cette idée, craignant que les Togolais sous tutelle française ne réclament aussi leur indépendance comme leurs frères du Togo britannique.
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Cela avait conduit finalement le Royaume-Uni à abandonner cette idée et opter pour le référendum. Sachez aujourd´hui que Nicolas Grunitzky aussi avait contribué à ce jeu malsain et regrettable qui avait entraîné l´échec de l´unification des deux territoires. Moi, je n´approuve pas les hommes mais leur politique. Ce n´est pas parce que Nicolas Grunitzky était d´Atakpamé et que je suis d´Atakpamé que je vais approuver sa politique alors qu´il avait mené une politique en faveur de la France et contraire aux intérêts du Togo, surtout pour ce qui concerne l´indépendance et l´unification des deux territoires britannique et français. Je trouve cela triste. L´autre remarque est que pendant la Mission des agents de l´ONU en 1955 et le plébiscite de 1956, les partis du camp contre la réunification avaient plus d´influence dans les deux Togos sous tutelle au sein de leurs populations. À la Côte-de-l´Or c´était le CPP de Kwame Nkrumah qui voulait intégrer le Togo britannique dans la Côte-de- l´Or et au Togo français, c´était le PTP de Nicolas Grunitzky et le parti des populations et chefs du Nord-Togo soutenus par la France qui rejetaient aussi énergiquement l´indépendance et l´unification des deux zones du Togo sous tutelle voulues par Sylvanus Olympio. Voilà les sources de nos malheurs au Togo.
À travers le document on verra comment ce plébiscite a été organisé et contrôlé par le Royaume-Uni et non en réalité par l´ONU. En plus, les agents de la Mission de visite, envoyés d´abord sur le terrain en 1955 dans les deux territoires sous tutelle pour recueillir les avis des populations, des chefs locaux et ceux des leaders politiques en vue de faire un rapport au Conseil de tutelle de l´ONU, ont joué un rôle clé pour ce rattachement du Togo britannique à la Côte-de- l´Or, ce qui ne donnera un an plus tard aucune chance à l´unification des deux Togos britannique et français en 1956 lors de ce plébiscite.
Tout avait commencé en 1955 quand le Conseil de tutelle de l´ONU avait créé la Mission de visite composée de 4 agents qui se sont rendus dans les deux territoires sous tutelle britannique et française en vue de décider un an plus tard de l´avenir du Togo britannique et celui de l´unification.
Il s´agit de Monsieur S. K. Banerji (Inde) président de la Mission
Monsieur J.M. McMillan ( Australie)
Monsieur Salah Eddine Tarazi (Syrie)
Monsieur Robert R. Robbins (Etats-Unis d´Amérique)
Leur mission était d´aller sillonner ces deux territoires séparés, rencontrer les populations, les chefs locaux et les leaders des partis politiques afin de recueillir leurs vœux dans ces deux territoires sous tutelle et de dresser un rapport au Conseil de tutelle sur l´avenir du Togo britannique et de son unification avec le Togo sous tutelle française. À leur arrivée sur le terrain, ils se sont d´abord rendus au Togo britannique administré par la Grande Bretagne et ensuite au Togo administré par la France.
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1) La Mission dans le territoire du Togo sous l´administration britannique
Là, deux thèses s´affrontent chez les populations avec une grande influence de Kwame Nkrumah.
a) Celle qui veut que le Togo britannique reste associé à la Côte-de-l´Or indépendante. Pour les tenants de cette thèse, ce territoire est administré pendant 40 ans en tant que partie intégrante de la Côte-de-l´Or avec tous les arguments qu´ils avançaient en leur faveur pour convaincre la Mission.
Convention People´s Party est le tenant de la thèse du rattachement à la Côte-de-l´Or en présentant son mémoire à la commission lors de son passage à Ho le 29 août 1955 avec tous ses arguments que je ne peux pas tout évoquer ici. Il est important de souligner que c´est ce parti qui est celui du gouvernement central panafricain de Kwame Nkrumah. Donc leur souhait était de tout faire pour rattacher le Togo britannique à la Côte-de-l´Or avec l´appui du Royaume-Uni. Vous verrez déjà ici que la chance était mince pour que la thèse de l´unification puisse l´emporter en 1956 lors du plébiscite malgré les efforts inépuisables des tenants de cette thèse dans les deux territoires sous tutelle.
b) L´autre thèse voulait que cette partie du Togo soit séparée de la Côte-d´Or avec leurs arguments.
Togoland Congress, les leaders de ce parti, eux, voulaient dans leur mémoire présenté le 11 août 1955 à la Mission lors de passage à Accra que le Togo britannique soit unifié avec le Togo français car ils considéraient que le gouvernement central de la Côte-de-l´Or faisait preuve de l´hypocrisie et exploitait les richesses du Togo britannique pour développer la Côte-de-l´Or. Les arguments d´ordre politique, administratif, éducatif et social ont été développés dans leur mémoire.
All-Ewe Conference, quant à eux, Ils ont présenté leur mémoire le 30 août 1955 à la Mission lors de leur passage à Ho avec des arguments semblables à ceux du Togoland Congress. Ils voulaient l´indépendance et l´unification avec le Togo sous tutelle française. Pour le plébiscite, ils souhaitaient par exemple que les questions leur soient posées de la sorte :
Voulez-vous le rattachement à la Côte-de-l´Or? Ou voulez-vous l´unification et par la suite la fédération avec la Côte -de-l´Or ?
2) La Mission dans le territoire du Togo sous tutelle de l´administration française
Ici aussi au Togo sous tutelle française, deux thèses s´affrontaient.
a) ceux qui étaient contre l´indépendance et l´unification en voulant leur rapprochement avec la France
Parti togolais du progrès (PTP), ce parti est l´ennemi farouche de l´unification. Il avait présenté son mémoire à la Mission le 7 septembre 1955 en défendant leur rapprochement avec la France car pour eux, toute forme d´unification des deux Togos qui aurait pour conséquence le relâchement de ses liens avec la France est exclue. Ils excluaient aussi toute possibilité de sa fusion avec l´un quelconque des territoires français (allusion au Dahomey). Ils voulaient rester togolais mais très proches de la France.
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.Union des chefs et des populations du Nord-Togo (UCPNT), leur mémoire a été présenté à la Mission le 5 septembre 1955. Eux, ils souhaitaient l´unification des deux Togos au même titre que leurs adversaires politique qui réclamaient l´unification. Mais il n´est pas concevable selon eux, de la faire en dehors de l´union française, car c´est la minorité britannique qui doit s´ajouter au Togo sous tutelle française, environ deux fois plus grand et plus peuplé, soutenaient-ils. Leur thèse était semblable à celle du parti togolais du progrès dans leur mémoire car ces deux partis étaient très proches de la France et voulaient rester soumis à la France pour pouvoir bénéficier de ses aides au développement.
b) Ceux qui étaient pour l´indépendance et l´unification des deux territoires mis sous tutelle
Comité de l´unité togolaise (CUT), dans son mémoire du 5 septembre 1955, il réclamait l´unification du Togo britannique et Togo sous tutelle française qui englobe d´autres tribus que les Éwés dans le Togo britannique car il n ´y avait pas que les Ewés au Sud mais aussi d´autres ethnies vers le Nord.
Il reprochait à la France dans leur mémoire de vouloir toujours pratiquer la politique qu´elle estimait la plus propre à une intégration du Togo français au sein de l´union française. Et qu´elle avait même songé sérieusement à rattacher au Dahomey le territoire dont elle avait sous sa tutelle (le Togo).
Il avait cité pour fonder son propos, le quotidien français le Monde qui avait évoqué le sujet dans son journal dont le passage essentiel a été relayé et publié dans le journal le combat du 9 et 10 juillet 1955.
Mouvement populaire togolais (MPT), dans leur mémoire présenté à la Mission le 5 septembre 1955, ce mouvement souhaitait aussi l´unification. Selon eux, ce sont les vœux les plus chers de tous les Togolais et souhaitaient aussi une autonomie rapide du Togo français vis-à-vis de la France.
Mouvement de la jeunesse togolaise (Juvento), ce mouvement réclamait aussi l´indépendance.
C´est leur objectif premier dans leur lutte. La sensibilité politique du mouvement est proche de celle du Comité de l´unité togolaise. Dans son mémoire, il luttait pour les mêmes causes que le Comité de l´unité togolaise. Le mouvement avait présenté son mémoire le 3 septembre 19955 à la Mission en faveur de l´indépendance. Selon lui, l´indépendance est une source d´aspiration générale des Togolais.
Leur mémoire pour l´unification et l´indépendance était remis à la Mission le 5 septembre 1955.
3) Déclaration faite par le représentant du Royaume-Uni lors de la 648è séance du Conseil de tutelle, le 21 novembre 1955 à l´ONU
Le représentant du Royaume-Uni, accompagné à l´ONU par Monsieur Gbedemah, ministre des Finances de la Côte-de-l´Or, souhaitait finalement que le Togo britannique soit rattaché à la Côte-de-l´Or. Il avait fait des propositions suivantes : seul le plébiscite était la seule forme de consultation populaire acceptable pour le Royaume-Uni. Pour sa réalisation, déclarait-il, le Royaume-Uni allait s´occuper de sa préparation et de l´organisation tout en souhaitant que l´ONU envoie des observateurs pour constater le bon déroulement. Mais la Mission avait émis des vœux que l´ONU puisse intervenir activement dans le processus de l´organisation pour s´assurer des résultats acceptables.
Le Royaume-Uni proposa ainsi au Conseil de tutelle de l´ONU, les questions suivantes pour le plébiscite :
1) Voulez-vous que le Togo sous administration britannique soit rattaché à une Côte-de-l´Or indépendante ?
2) Voulez-vous que le Togo sous administration britannique soit séparé de la Côte-de-l´Or et continue à rester soumis au régime de la tutelle en attendant que son avenir politique puisse être définitivement fixé ?
Mais il privilégiait la première question dans sa déclaration car il trouvait la seconde défavorable.
Vous verrez ici d´emblée que les questions soumises, avaient détourné implicitement la question de l´unification. Elles étaient posées en faveur du rattachement du Togo britannique avec la Côte-de-l´Or.
Il y a un point important à souligner ici. Parmi les agents envoyés par l´ONU pour la Mission, il y avait un parmi eux qui n´était pas d´accord avec les autres. Il s´agissait de Tarazi, le Syrien. Il avait émis les vœux que le Togo britannique soit d´abord séparé de la Côte-de-l´Or et doté d´une certaine autonome et des institutions pour un certain temps avant une organisation de ce plébiscite car il redoutait l´influence du Royaume-Uni sur le déroulement et l´organisation du plébiscite. Il soutenait que, ce territoire Togo britannique étant administré pendant 40 ans par le Ghana, l´esprit des populations n´était pas libre et sera influencé par le Royaume-Unis et la Côte-de-l´Or en faveur du rattachement. Mais sa thèse a été écartée par les autres de la Mission et le Royaume Unis. Pour refuser sa thèse, le Royaume-Uni évoquait le temps qu´il fallait encore alors qu´en réalité, il voulait que ce territoire reste dans la Côte-de-l´Or. Ce plébiscite n´a été qu´une formalité. Les résultats ont été déjà acquis en faveur du rattachement avant le vote. Le Syrien avait signé quand même le rapport fait par la Mission tout en émettant son désaccord avec les autres de la Mission et le Royaume-Uni car il ne soutenait pas un plébiscite en l´état des choses en 1956 dans le Togo britannique car le Royaume-Uni avait une grande influence sur ça. En plus, pour l´organisation du plébiscite, le Togo britannique a été divisé en 4 zones distinctes pour le vote. Aussi les résultats seraient-ils appréciés séparément dans chaque zone et non globalement. Il faut souligner aussi que la stratégie du Royaume-Uni était qu´au moins une zone puisse être rattachée à tout prix à la Côte-de-l´Or à défaut d´intéger tout le territoire du Togo britannique.
Dans la zone du Nord, il y avait une unité territoriale pour le plébiscite et dans la zone du Sud il y avait trois unités territoriales pour le plébiscite. En même temps, le Royaume-Uni dans sa déclaration affirmait que si une des zones se prononçait contre le rattachement, puisque ladite zone serait trop petite pour être administrée séparée des autres zones dont le sens du vote serait opposé, alors dans ce cas les résultats des autres zones vont l´emporter sur ladite zone ayant voté dans le sens contraire.
En clair, le Royaume-Uni et la Côte-de-l´Or avaient l´influence sur le plébiscite et sur les populations du Togo britannique. Dans ces conditions, je ne vois pas comment on peut parler de plébiscite équitable.
4) Déclaration faite par le représentant de la France lors de la 648è séance du Conseil de tutelle le 21 novembre 1955 à l´ONU
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Le représentant de la France dans sa déclaration avait apprécié le travail de la Mission dans les deux territoires sous tutelle britannique et français ainsi que les conditions du plébiscite formulées par son homologue britannique. Dans sa déclaration il n´avait fait aucune suggestion contraire aux questions qui pourraient être posées pour le plébiscite et proposées par le représentant du Royaume-Uni dans sa déclaration. D´ailleurs n´ayant aucune autorité sur cette partie du Togo, la France n´avait qu´une petite marge de manœuvre par rapport au Royaume-Uni qui, lui, avait sur ce territoire une influence en tant qu´autorité de tutelle. Mais il faut aussi dire après analyse que ce n´était pas de bon gré que la France avait partagé le Togo avec la grande Bretagne mais n´ayant pas gagné seule la Guerre contre l´Allemagne, elle n´avait pas de choix. Dans son rapport, le représentant de la France n´avait pas laissé apparaître que la France ne voulait pas l´indépendance et l´unification du Togo britannique. C´est plutôt au Togo qu´il avait sous sa tutelle qu´on pouvait le constater car elle interdisait les réunions et réprimait ceux qui luttaient pour l´indépendance et l´unification des deux territoires du Togo.
Il faut souligner que cette partie du Togo britannique n´est pas seulement peuplée par les Ewés mais par d´autres ethnies togolaises dans la partie Nord. Les Ewés ne sont qu´au Sud alors que cette partie du Togo va jusqu´au Nord au Niveau de Dapaon. On ne peut pas laisser tout ça au Ghana actuel.
Donc, souhaitons un jour que l´unification des deux territoires se réalise. Ce n´est pas l´affaire des Ewés seulement au Sud comme certains ennemis de la patrie, aiment intoxiquer les esprits. Il s´agit de la grandeur de tout notre cher Togo, du Sud au Nord. Dans cette partie britannique du Togo il y avait :
Au Nord les Koussasis, les Mobas, les Mamproussis, les Tchokossis, les Konkombas, les Dagombas.
Au Centre on a les Nanoumbas, une partie des Achantis, les Nchumurus. Ntroubous, les Krachis.
au Sud : on voit Les Akans les Lefanas, Bouems, les Limpès, les Nkonyas et tout au Sud les Ewés,
En conclusion
On peut dire sans équivoque avec pièce à l´appui, à base de ce document que le plébiscite du 9 mai 1956 était déséquilibré. Ce n´est pas ce que voulaient les populations du Togo britannique. Elles ne voulaient pas le rattachement à la Côte-de l´Or. Ce sera mon combat politique avec la souveraineté économique pour le Togo. J´ai des pièces maintenant qui donnent de l´espoir pour réclamer cette zone en vue de l´unification des deux territoires. Pour atteindre cet objectif, il faut à la tête du pays un président courageux.
Malheureusement Faure Gnassingbé ne va pas oser s´engager sur cette voie pour le pays, soit par manque de volonté politique ou diplomatique. S´il y avait la chute du mur de Berlin en 1989 et la réunification de l´Allemagne dont la date retenue pour la fête de cette unité est le 3 octobre depuis 1990, pourquoi pas un jour pour celle du Togo ? Un président de la République doit avoir pour seul objectif qui est celui de défendre les intérêts vitaux de son pays, quel que soit le prix à pays.
Source : Togoweb.net