Affaire de Palais: Faure Gnassingbé se livre sur son lien de sang avec Kpatcha

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15 février 2010, à l’approche de l’élection présidentielle, le chef
de l’État togolais, Faure Essozimna Gnassingbé a eu un entretien avec
Jeune Afrique au cours duquel, il a marqué son attachement familial, le
lien du sang, à Kpatcha Gnassingbé, même si la condamnation de ce
dernier à 20 ans de réclusion criminelle en 2011 suscite assez
d’interrogations. Quoi qu’il en soit, Kpatcha reste son frère, et Faure
se devait de pardonner son demi-frère, c’est-à-dire, tout lui pardonner.

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Condamné en 2011 à 20 ans de réclusion criminelle avec déchéance
civique et confiscation générale de ses biens dans l’affaire de coup
d’état, Luc Kpatcha Gnassingbé, le demi-frère du président togolais est
depuis son incarcération dans la mémoire collective. Oublier le grand
Ministre de la Défense qu’il était jusqu’à 2007, faiseur de « roi » en
2005 et surtout son rôle présumé dans les violences et autres violations
des Droits de l’Homme au décès du général Eyadéma, le sort de Kpatcha
fait aujourd’hui pitié au point qu’une majeure partie de Togolais plaide
ouvertement pour sa libération. Le président Faure ne devrait pas
garder son frère aussi longtemps en prison, pensent les Togolais.

Kpatcha, le mea culpa…

« J’ai demandé aux officiers à l’époque de faire allégeance à mon
frère le Président. Ça, je le reconnais et je le redis ! Parce que je
connais à peu près cette armée. Je sais qu’il y a de petits groupes
ethniques. Pour moi, il fallait éviter le pire. Et si j’ai mal fait, je
présente mes excuses. Mais je crois qu’il fallait aller pour éviter le
chaos. C’est cette raison qui m’a poussé à demander aux officiers
supérieurs, d’abord aux généraux et ensuite aux officiers supérieurs de
faire allégeance à mon frère le président Faure… ». Ainsi parla l’ancien
député de la Kozah, Kpatcha Gnassingbé lors d’une audience spéciale à
lui accordée en 2012 par Monseigneur Nicodème Barrigah, le président de
la CVJR, Commission Vérité, Justice et Réconciliation.

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À la fin de l’audience, l’ancien Ministre de la Défense avait formulé
le vœu de voir l’Evêque d’Atakpamé, Monseigneur Barrigah, réconcilier
lui et son frère le président Faure et au-delà, la famille Gnassingbé. «
Pourquoi pas mettre ensemble les frères et sœurs de la famille
Gnassingbé. C’est très important. Je sais que c’est lourd mais je pense
que ce n’est pas impossible, » avait-il conclu.

Au-delà de ce qu’on peut qualifier d’aveu, ce demi-frère du chef de
l’État s’est aussi saisi de l’occasion pour présenter ses excuses au
peuple togolais. Une demande de pardon qui semble susciter depuis lors,
la pitié du peuple et des responsables politiques qui ont souvent
demandé au président Faure d’accorder une grâce présidentielle à son
petit-frère, son ancien Ministre de la Défense, 2005-2007, c’est-à-dire
l’homme avec qui, il a toujours eu assez de complicités aux premières
heures de sa fonction présidentielle.

Aujourd’hui, si l’on demandait aux populations togolaises de battre
le pavé pour manifester leur volonté quant à la libération de Kpatcha
Gnassingbé, beaucoup n’hésiteront pas à être dans la rue. Mais
attention, ils le feront non pas parce qu’ils ont déjà oublié son rôle
présumé dans les violences de 2005 qui ont occasionné 400 à 500 morts
selon l’ONU, mais c’est parce qu’ils ont désormais pitié de lui, de ses
souffrances et surtout de son état de santé devenu de plus en plus
fragile. Le « Toutpuissant Kpatcha » qui fait pitié. Qui l’eût cru ?

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Au-delà des attentes, l’espoir…

« Vous pouvez imaginer combien la révélation de cette action m’a
touché. Profondément attaché aux vertus familiales, je n’avais jamais
imaginé qu’une telle fracture pouvait s’ouvrir, » larmoyait presque
Faure Gnassingbé dans son discours du 17 avril 2009, quelques jours
après l’arrestation du député Kpatcha. Cependant, en 2010, il a reconnu
que Kpatcha reste son frère. C’est fort une telle déclaration qui oblige
à ce qu’on puisse attiser, activer et surfer sur le lien du sang pour
réconcilier les deux fils d’Eyadéma. S’il est vrai que le lien du sang,
est sacré, il est aussi vrai que l’espoir est permis.

Il y a quelques mois, des indiscrétions font état de ce qu’une voix
de plus et non des moindres s’est ajoutée à toutes celles qui plaident
pour la libération de Kpatcha. Il s’agit de l’ancien président du Ghana
John Jerry Rawlings qui aurait adressé un courrier à Faure Gnassingbé
demandant sa clémence pour la libération de son demi-frère.

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Aussi se rappelle-t-on qu’en début du mois de février 2019,
l’Archevêque émérite de Lomé, Monseigneur Kpodzro qui s’est rendu à la
prison civile de Lomé pour rencontrer Kpatcha, avait déclaré à sa sortie
qu’il fera le nécessaire pour sa relaxation. « J’ai rencontré le frère
du président. Il m’a parlé comme un fidèle parle à son prêtre ou à son
pasteur. Il m’a dit qu’il est malade et en le voyant, on ne peut en
douter. Il m’a fait comprendre qu’il a envoyé des lettres à ce sujet à
son frère mais sans suite. Il n’a aucun souci à part sa mauvaise santé, »
a indiqué le prélat avant d’ajouter : « Il m’a chargé d’aller discuter
avec son frère. Et moi, j’irai rencontrer le frère et lui dirai tout
simplement ce que j’ai vu et entendu ».

D’autres voix dont celles de l’actuel président Ghanéen Nana Dankwa
Akufo-Addo et du Roi Ashanti Otumfuo Nana Osei Tutu II, sont également
sur le dossier pour la mise en liberté de Kpatcha qui a déjà bouclé dix
(10) ans en prison. Dix années auxquelles s’ajouteront 10 autres si
Faure Gnassingbé, grand-frère de Kpatcha souffrant en prison, ne mette
un peu d’eau dans son vin, reconsidérer sa position pour sauver la vie
de son frère. Le lien du sang est précieux.

Source : La Manchette

Source : Togoweb.net