« Le Togo n’a pas de véritable projet de développement. Il ne fait que tendre la main. Il espère qu’en allant du côté du Commonwealth, il pourra encore obtenir quelques subsides » (Ayayi Togoata Apedo-Amah)
Depuis 2014, le Togo frappe à la porte du Commonwealth. Pour la troisième fois, l’organisation intergouvernementale a dépêché une mission dans notre pays pour prendre langue avec les autorités, mais aussi les institutions de la République et éventuellement évaluer le niveau de développement et de démocratisation du pays. Cette fois-ci sera-t-elle la bonne ?
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A propos de l’intérêt du Togo d’intégrer le Commonwealth, pouvoir et opposition analysent et décryptent selon leur grille de lecture. Lors de la première tentative d’adhésion en 2014, le ministre des Affaires étrangères, Robert Dussey insistait sur l’intérêt économique. « Quand on regarde la croissance économique aujourd’hui, elle se trouve surtout dans des pays membres du Commonwealth», s’enthousiasmait-il à l’époque. Le régime togolais espère aussi bénéficier du financement des projets dans le domaine de l’éducation et de la formation.
L’opposition, notamment la Dynamique Monseigneur Kpodzro (DMK), elle espère que la mission pourra contribuer au règlement de la crise sociopolitique au Togo. « Au regard des valeurs de l’institution qui incluent la démocratie fondée sur le libre choix de leurs gouvernants, la DMK formule le vœu que sa mission contribue à la résolution de la grave crise sociopolitique que traverse le Togo depuis l’élection présidentielle du 22 février 2020 », écrit la Coordinatrice générale, Brigitte Adjamagbo-Johnson.
Pour adhérer à une organisation, ce n’est pas une sinécure. Il suffit juste de se conformer à ses règles et valeurs. Justement les principes fondateurs du Commonwealth sont la démocratie, l’Etat de droit, le respect des droits de l’homme, la non-discrimination, la liberté d’expression, la séparation des pouvoirs, etc. Des valeurs qui sont malheureusement piétinées au Togo.
Le Togo, c’est de notoriété publique, est l’une des plus vieilles dictatures en Afrique. Une République régentée depuis 54 ans par une seule famille, le père et le fils. Le clan n’est pas disposé à lâcher du lest. Le régime en place depuis plus de 5 décennies s’emploie chaque jour à verrouiller davantage le jeu politique et les espaces de liberté. Dans son dernier rapport sur la démocratie dans le monde publié début février 2021, le groupe britannique The Economist classait le Togo parmi les régimes autoritaires au même titre que la Syrie, l’Afghanistan, la Guinée Equatoriale ou encore le Yémen.
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Sur le plan des libertés, depuis les vagues de manifestations de rue à travers le pays qui ont ébranlé le régime de Faure Gnassingbé en 2017, les libertés de réunion et de manifestation pacifique publique sont remises en cause, à travers des lois iniques votées en août 2019 par l’Assemblée quasi-monolithique. Civicus Monitor, une organisation qui évalue l’état des libertés civiques dans le monde, enfonce le clou en relevant que l’espace civique au Togo est « obstrué », marqué par des élections très peu démocratiques, la répression des opposants, l’interdiction des manifestations, l’usage excessif de la force, etc.
Le Togo s’est également bâti une très mauvaise réputation en matière du respect des droits de l’Homme et est régulièrement épinglé en la matière par les organisations nationales comme la LTDH, la CNDH, et internationales à l’instar d’Amnesty International. Les opposants au régime sont persécutés, arrêtés et jetés en prison. Une centaine de militants et responsables de l’opposition croupit depuis des mois dans les geôles de la dictature.
Le Togo a beaucoup à gagner en adhérant au Commonwealth. Mais c’est l’occasion pour le régime de Faure Gnassingbé de ripoliner l’image de calamité démocratique qui colle à notre pays.
Médard AMETEPE
source : Liberté
Source : Togoweb.net