Voici pourquoi Faure Gnassingbé ne rentrera pas dans l’Histoire

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Comparaison n’est pas raison, mais on
n’est pas bien tenté de dresser une analogie entre Faure Essozimna
Gnassingbé et son homologue ( ?) le Premier ministre Ethiopien Abiy
Ahmed  Ali, deux dirigeants arrivés au pouvoir  alors que leurs pays
respectifs étaient au bord du chaos.  

Essayons de comprendre pourquoi Abiy
Ahmed  s’est vu attribuer le Nobel de la Paix rentrant ainsi dans le
cercle restreint des dirigeants distingués pour leurs actes, alors le
chef de l’Etat togolais est déjà entré dans les poubelles de l’histoire
et n’ayant aucune chance d’en sortir, même après une baignade dans les
eaux de Lourdes.

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Faure Gnassingbe et Abiy Ahmed sont
arrivés au pouvoir très jeunes, contrairement à la moyenne des chefs
d’Etat en Afrique. 39 ans pour le président togolais et 42 ans pour
l’Ethiopien. Ce dernier de mère Amhara et de père Oromo arrive au
pouvoir dans un pays sous extrêmes tensions interethniques. Faure
Gnassingbe né d’un père Kabyè  et d’une mère Ewé  a bâti son
storytelling comme étant un pont et un frein à l’antagonisme Nord-Sud.

Les trajectoires respectives des deux
dirigeants montrent ainsi qu’à leurs débuts, les deux étaient d’emblée
sommés de relever un défi, celui de sauver leurs sociétés respectives du
délitement voire du chaos.

Faure Gnassingbé a hérité d’un pays exsangue après 38 ans
de dictature de son père : une gouvernance caractérisée par le déni de
démocratie, la violation massive des droits de l’homme, un tissu économique et
social délabré, et une administration gangrenée par la corruption et toutes
sortes de fléaux propres à l’Afrique.

Le modèle Abiy Ahmed

 De même a été légué à Abiy Ahmed en avril
2018 un pays au bord de la guerre civile, du fait d’un régime
autoritaire qui a exacerbé les tensions communautaires et ethniques, le
musellement et la répression des oppositions, des convulsions souvent
soldées par des dizaines de morts. En sus de cette situation interne
quasi explosive, le vieux conflit frontalier avec le frère ennemi
érythréen, en plus d’être soldé par des milliers de morts de chaque
côté, obère les coûts des marchandises et entrave l’essor remarquable de
l’économie éthiopienne. Beaucoup de membres de la coalition au pouvoir à
Addis-Abeba espéraient la relance de la guerre pour en finir avec le
régime stalinien d’Amara. Quasiment les mêmes dirigeants, surtout les
Tigréens, s’opposaient à un quelconque dégel de la situation intérieure.

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Malgré ce contexte d’handicaps à sa politique, Abiy Ahmed  a su, dans une relative opacité,
trouver sa mission,  et l’a remplit autant que faire se peut, pour
reprendre une  formule de Frantz Fanon. Le bilan d’Abiy Ahmed en
l’espace d’un an et demi est impressionnant : réconciliation avec
l’Erythrée, libération des prisonniers politiques, réformes politiques
mettant le pays sur l’orbite d’une démocratie avérée, économie en plein
boom avec une croissance à deux chiffres. Certes, comme il s’y
attendait, les réformes suscitaient des peurs et des oppositions. A
l’intérieur de l’Ethiopie, par exemple, les forces conservatrices
tentèrent un coup d’Etat et les velléités irrédentistes ethniques
devinrent tendancieuses.

A l’extérieur, la fin du conflit qu’il prenait pour alibi
 pour étouffer toutes voix et voies dissidentes
prend de court le stalinien Afwerki d’Erythrée, qui dans un réflexe de survie
referma les frontières. Gageons que ce ne sont que derniers soubresauts de
mauvais moments évanescents qui montreront à Abiy ahmed, un ex-officier du
renseignement militaire qu’il est sur la bonne voie.

Tel n’a pas été par contre le parcours de
Faure Gnassingbé, 53 ans. Malgré sa macabre arrivée au pouvoir soldée
par la mort de 400 à 1000 personnes, l’opposition togolaise ainsi que
les partenaires au développement pensaient que le fils d’Eyadema au
regard de son passif mettrait un point d’honneur pour nettoyer les
écuries d’Augias et entamer une saine politique de reconstruction de
l’Etat.

Faure Gnassingbe alias « je-fais-comme-papa »

Cette bienveillance- cet état de grâce- à
son égard, n’a pas été vue par lui comme un signe d’encouragement à
entreprendre des réformes audacieuses allant dans le sens du
redressement du pays et d’une démocratisation plus profonde. Grosso
modo, un projet de state building.

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 A contrario, par la ruse, la fraude, la
manipulation et la force brute, Faure Gnassingbe n’a fait qu’asseoir et
consolider son pouvoir. Tout d’abord en mettant sous éteignoir, parfois
de façon brutale, toute contestation dans son camp. Aujourd’hui, il n’y a
quasiment plus d’hommes et de femmes politiques pouvant incarner
l’alternance dans son camp. Il s’est par contre constitué une basse-cour
de fayots décidés à exécuter de basses tâches  ou faire le mariole en
vue de s’enrichir  illicitement sous ses ailes. Avec Faure Gnassingbé,
on constate, phénomène inquiétant, la reproduction sociale de la classe
dirigeante de la dictature de son père. Tous ces enfants de, égarés ou
non, immigrés ou non, compétents ou non, sont cooptés sans autre forme
de procès et occupent des hautes fonctions dans la haute administration.

Ensuite, par la ruse, la fraude, et le 
bâton, il a fini par exténuer et démanteler l’opposition politique,
aujourd’hui réduite à sa plus simple expression voire à son rejet par
l’opinion. Les réformes politiques ont été dévoyées et la politique de
réconciliation habilement détournée à son profit.  Le manque d’équité
dans les réparations et les dédommagements aux victimes des violences
politiques, ont laissé ouvertes les blessures, d’autant plus que le
pouvoir continue de perpétrer impunément les violences politiques. Ceci
donnant l’impression d’un manque de volonté de politique de solutionner
les problèmes profonds à l’origine de la crise.  Les dernières lois
votées par un parlement monocolore abolissent quasiment les libertés
publiques, et la liberté d’expression dans un contexte d’indigence des
médias reste une mascarade, le tout donne le sentiment d’un pays mis en
coupe réglée. L’incurie et l’incompétence de son administration, son
absence de vision sur le court et long terme, n’ont fait qu’amplifier la
paupérisation du pays. Le pillage des ressources, la mainmise sur les
richesses par une petite minorité, l’absence de redistribution, poussent
la jeunesse au fléau migrationniste.

Enfin, grâce à son habileté diplomatique,
satisfaisant les desiderata de la communauté internationale, dans un
contexte d’obsession sécuritaire, il s’offre une certaine légitimité sur
le plan international. Par le truchement des officines de communication
et d’expertise, en Europe et aux Etats-Unis, par des accointances avec
des anciens dirigeants européens, et sociétés d’espionnage israéliennes
comme Black Cube, il s’assure à la fois la publicité internationale et
la surveillance de l’opposition. L’effort entrepris pour asseoir sa
légitimité internationale reste surprenant malgré son utilité marginale.

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Grosso modo, d’un côté l’Ethiopien, en
dépit de son passé d’officier de renseignement militaire (un contre
modèle de Kagamé) s’érige en modèle de dirigeant politique dont la
 modernité peut constituer une source d’inspiration pour les générations
présentes et futures tandis que le Togolais n’est juste qu’un autocrate
moyenâgeux singeant à contre-courant la gouvernance mortifère de son
père, un soudard de la coloniale.

Il est improbable qu’une jeunesse togolaise dégoûtée du pays et ayant des envies d’ailleurs puisse être intéressée par un tel modèle de gouvernance ringard.

Source: Letempstg.com

Source : Togoweb.net