La résolution votée recommande notamment l’envoi au Burundi de trois experts qui s’engageraient « avec les autorités burundaises », et dont l’objectif serait « d’établir la vérité et de veiller à ce que les auteurs de crimes déplorables soient traduits devant les autorités judiciaires du Burundi. »
En clair, c’est une victoire pour Bujumbura puisque cette résolution est une manière de disqualifier le rapport des experts déjà mandatés par le Conseil des droits de l’homme il y a un an, et dont les conclusions, révélées au début du mois, sont accablantes pour les autorités burundaises.
Ce rapport faisait état d’exécutions extrajudiciaires, de détentions arbitraires, tortures, violences sexuelles, commises par les forces de défense et de sécurité burundaises contre des opposants, défenseurs des droits de l’homme ou des journalistes, et avec des liens hiérarchiques remontant parfois jusqu’à la présidence. « Constatant l’absence de volonté des autorités burundaises de lutter contre l’impunité » et « l’absence d’indépendance de la justice nationale », les experts recommandaient que la Cour pénale internationale se saisisse du cas burundais.
La résolution votée aujourd’hui demande donc qu’une nouvelle enquête soit menée, non plus de manière indépendante, mais en coopération avec le pouvoir de Bujumbura. Elle demande aussi que les éventuelles poursuites judiciaires soient menées par la justice nationale, burundaise, et non par la CPI.
« Solidarité africaine »
Pour le groupe Afrique, il s’agissait de lancer une « une nouvelle dynamique ». Le conseiller du président burundais, Willy Nyamitwe, s’est réjoui de la « solidarité africaine ». Il est notable que pour ce vote les pays africains aient été soutenus par d’autres pays du Sud, notamment latino-américains, en dépit de l’opposition des Etats-Unis et des pays européens.
« Insuffisant », estiment les organisations de défense des droits de l’homme, burundaises et internationales, qui déplorent que les nouveaux experts demandés par ce texte seraient « dépendants des autorités de Bujumbura » et qui soupçonnent les autorités burundaises de vouloir « gagner du temps ».
Deux commissions d’enquête concurrentes ?
Un autre projet de résolution sur le Burundi doit être présenté ce vendredi après-midi par l’Union européenne ; un texte qui demandera l’extension du mandat de la commission d’enquête indépendante actuelle, celle qui a déjà commencé de travailler sans que Bujumbura accepte de coopérer. Une commission internationale, composée d’un Algérien, d’une Béninoise et d’une Britannique.
Selon un technicien de la Commission des droits de l’homme, si le texte de l’Union européenne était adopté, le Haut-commissariat des droits de l’homme des Nations unies serait dans une situation inédite : il devrait valider deux commissions d’enquête parallèles, voire concurrentes. Si ce texte est rejeté, le Haut-commissariat devrait mettre en place la seule commission liée à Bujumbura.
Quant à la Cour pénale internationale, elle a jusqu’au 27 octobre pour décider de s’autosaisir du cas burundais, comme le recommande le rapport d’experts présentés au début du mois.
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