Elles représentent une couche socio-professionnelle très stigmatisée, quoique très sollicitées. Pour l’assistance des personnes âgées ou en situation de handicap, des enfants ou assurer les activités basiques des ménages les travailleuses domestiques sont très sollicitées. Évaluées entre 10 et 20 mille seulement à Lomé, elles travaillent dans des conditions exécrables dans la plupart des cas selon L’Association de Défenses des Droits des Aides Ménagères et Domestiques (ADDAD) –Togo.
Analphabètes, souvent mineures, convoyées des zones rurales vers des centres urbains, Lomé principalement sur fond d’arrangements obscurs entre trafiquants et agences de placements qui exercent dans l’informel, les travailleuses domestiques se retrouvent dans des ménages, avec conditions qui ne feront qu’accentuer leur précarité.
Alors que certaines de ces femmes et filles désirent simplement obtenir un fonds pour soit se financer une formation professionnelle ou une activité génératrice de revenus, il n’en sera pas ainsi de leur rêve dès leur embauche. Elles subissent souvent des violences, des abus de pouvoir, des injustices etc. D’autres sont analphabètes venant de villages pour trouver du travail en ville, et sont le plus souvent démunies, isolées ignorant complètement leurs droits en tant que travailleuses domestiques dénonce Mlle Somabe Adjovi Justine, présidente de l’association ADDAD-Togo, à l’occasion de la journée mondiale des travailleuses domestiques.
Enyonam, 27 ans, piégée au Liban raconte sa mésaventure : J’ai quitté Pagouda (Ndlr- Chef-lieu de la préfecture de la Binah dans la région de la Kara à environ 450 Km au Nord de Lomé) pour Lomé à 14 ans. J’y ai été forcée par mes parents. Une tante venue de Lomé a promis de m’installer dans une famille riche qui devait m’assurer ma scolarité en plus d’un salaire mensuel de 3000F CFA envoyé à mes parents au village. En échange, je devais exécuter les tâches ménagères et tenir compagnie aux enfants en l’absence des parents. Détachée de ma mère, j’ai retrouvé l’enfer à Lomé. Pas d’école, pas de salaire et je ne mangeais que sur autorisation, souvent une fois par jour après de longues heures de travail sans répit. Deux ans après, le Monsieur a abusée de moi un soir. Cet événement m’a poussée à quitter la maison et me lancer dans cette aventure. Aujourd’hui, j’ai 27 ans, loin de mon pays, mes études rompues, avec beaucoup de regrets et je n’ai toujours aucune perspective concrète pour l’avenir.
Il n’y a donc pas de convention formelle qui régisse l’activité de travailleurs et travailleuses domestiques au Togo. De quoi favoriser des personnes véreuses rompues à des arrangements, surfant sur des biens acquis sur le dos de trafics d’êtres humains, des campagnes en destinations de Lomé mais aussi vers des pays de la sous-régions comme le Nigéria, le Gabon et le Bénin voisin mais aussi les pays du moyen Orient comme le Liban. Difficile de dissocier le calvaire des travailleuses domestiques au phénomène de trafic d’Êtres humains.
Le gouvernement est bien conscient de la situation. En dépit des discours de bonnes intentions, les actions concrètes ne semblent pas à la hauteur de l’urgence. Quelques arrestations des trafiquants, des programmes d’alphabétisation, politique de discrimination positive en termes de scolarisation de la jeune fille, des fonds de finance inclusive pour favoriser l’accès aux microcrédits… sont des actions de l’Etat.
Mais il faut reconnaître que le travail de domestique n’est pas en soi une mauvaise chose. C’est un secteur d’ailleurs pourvoyeur d’emplois si seulement des efforts concrets sont mis en place pour réguler le secteur. Dans un pays où on veut encourager l’émancipation socio-professionnelle de la femme, on a forcément besoin de nounous pour prendre soin du bébé pendant que la mère se consacre à sa carrière professionnelle ou politique. Il faut bien quelqu’un qui s’occupe des personnes âgées pendant que les fils et petit-fils vaquent à leurs occupations, il faut bien quelqu’un pour laver le linge, faire la vaisselle, repasser, nettoyer la maison et conduire les enfants à l’école. Mais pour quel salaire, quelles conditions de vies, quelle formation pour ces personnes, de quelle protection juridique jouissent-elles ?
L’Association de Défenses des Droits des Aides Ménagères et Domestiques (ADDAD-Togo profite de ce sixième anniversaire de l’adoption de la Convention no 189 de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques pour demander au gouvernement de ratifier ladite convention, chose déjà faite par 26 pays, reconnaissant ainsi que les travailleuses domestiques sont de véritables travailleuses et devraient bénéficier des mêmes droits que tout autre travailleuse et travailleur.
Nous pensons que les droits commencent à la maison, et que les employeurs doivent instaurer des relations respectueuses avec ceux qui s’occupent de leurs maisons et famille a laissé entendre Mlle Somabe Adjovi Justine, citant ainsi l’Organisation Internationale du Travail OIT. Depuis 2011, la journée du 16 juin est décrétée Journée Internationale des travailleuses domestiques.
A. Lemou
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