Dans son rapport annuel sur l’état du tourisme dans le monde, l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) a souligné que le Togo, en matière du tourisme d’affaires, s’est hissé en 2017 comme deuxième destination en Afrique. Cette nouvelle qui a été brandie à tout va comme trophée depuis la semaine dernière, cache malheureusement la triste réalité qui indigne tant les citoyens, les rares fois que certains d’entre- eux décident de visiter les sites dont dispose leur pays.
Le Togo est le deuxième pays de destination touristique d’affaires au monde en 2017. C’est ce qui ressort du dernier classement mondial effectué par l’Organisation Mondiale du Tourisme (OMT). Selon ce rapport, le nombre de visiteurs ayant foulé le sol du continent africain a augmenté de 9% depuis 2017 faisant de l’Afrique, l’un des continents où le taux de fréquentation touristique a bondi. Le Togo vient en 2eme position des pays les plus visités avec une forte croissance en 2017 pour 496.000 touristes visiteurs et affairistes soit plus de 46,7% derrière l’Egypte qui enregistre 55,1% contre 338.000 touristes en 2016.
D’après les chiffres de l’Agence onusienne, cette augmentation s’explique par le développement des voyages d’affaires portés par le contexte économique. La situation selon l’OMT, est la résultante des dividendes engrangés par le Togo, grâce à sa position de hub logistique d’excellence et de centre d’affaires de premier ordre en Afrique de l’Ouest.
En fait, ce classement, le Togo le doit principalement aux derniers évènements de renommées internationales qu’il a organisés. En effet, le tourisme d’affaires, également appelé MICE (Meetings, Inventives, Congrès, Événementiel), est, comme son nom l’indique, un savant mélange d’activités liées à la fois au tourisme (hébergement, transport, restauration, loisirs, etc.) et au monde professionnel. A côté du cadre des hôtels rénovés expressément par le pouvoir togolais pour relooker l’image du pays, l’arrière du décor qu’offre le pays de Faure Gnassingbé pour inciter au tourisme culturel ou tourisme de découverte, est à la limite de la désinvolture.
Des sites touristiques délaissés
Le Togo comporte pas mal de sites touristiques qui doivent attirer les touristes étrangers comme nationaux. Sauf que ces sites ne présentent pas un visage attrayant. De Lomé à Kpalimé en passant par Bassar et Kara, les exemples sont légions. En effet, Lomé la capitale jouit d’un emplacement naturel que certains pays envient. Construite à quelques mètres de la mer, la capitale togolaise est dotée d’une plage riche et paisible. Mais ces dernières années, elle présente un visage assez triste. Ordures, eaux usées et déchets plastiques et organiques y sont déversés. L’insalubrité de la plage pose un sérieux problème aux visiteurs. Seuls quelques particuliers arrivent à mettre en valeur leur propriété. Mais à quel prix ?
Au nord du pays, le seul site inscrit au patrimoine de l’Unesco par le Togo subit aussi le poids de l’âge. En effet, constitués d’habitats typiques « les tatas » du pays Tamberma sont menacés de disparition. Au XVIIème siècle, les peuples du Koutammakou (nord Togo) ont construit des villages fortifiés afin de fuir les rafles des rois du Dahomey venant du Bénin. Un vrai patrimoine dont les jours sont désormais comptés si les autorités ne mettent pas en place un véritable plan de restauration et de conservation en symbiose avec les populations autochtones qui vivent dans la pauvreté alors qu’elles possèdent un atout touristique majeur dans la sous-région ouest- africaine.
D’autres sites touristiques comme les réserves animalières sont en périls. Le Parc national de Fazao-Malfakassa par exemple avec ses 192 000 hectares de forêts, savanes, falaises et chutes d’eau. Cette zone est classée zone protégée et contenait près de 30 espèces d’oiseaux, 91 espèces de mammifères notamment des singes, des antilopes et 60 éléphants. Pourtant ce site est délaissé depuis un temps pour la construction d’un nouveau parc situé à Sarakawa. Malheureusement, il n’y a pas grand-chose à y voir.
Située à 43km de Kpalimé sur les hauteurs, le village de Danyi Koudzravi offre un paysage montagneux agrémenté de forêts denses et sèches. La cascade de Yikpa (AguMatsa) proche du village est considérée comme l’une des plus belles du Togo. Mais accéder à ce village, est un vrai parcours de combattant.
Sur les monts Kloto, le très renommé Château Vialls est réduit en une parfaite squelette vide depuis 8 ans qu’on l’a dépouillé de ses quelques reste au nom d’une grande rénovation annoncée.
A Bassar, ville située à 57km de Sokodé, les fours et l’usine de transformation des minéraux étaient les attractions. Contrairement à ce qu’indique la littérature touristique, il n’y a maintenant plus grand chose d’attrayant sur les lieux. Les seuls vestiges visibles se situent à Bengeli où il reste la présence d’un fourneau inutilisé.
En 2010, le Togo a accueilli environ 250 mille touristes pour une recette d’environ 15 milliards. La plupart de ces touristes font du tourisme humanitaire. Démarche sociale et durable, le tourisme humanitaire a pour but de transmettre de l’aide et du savoir à des populations dans le besoin. En effet, participer à l’amélioration des conditions de vie des populations locales est la priorité du tourisme humanitaire ce qui n’est pas le cas du tourisme classique qui s’oriente vers la découverte et le plaisir. De ce fait, les touristes humanitaires n’ont pas vocation à s’offrir le service des grands hôtels et payer pour visiter des sites. C’est tout le contraire des touristes classiques qui ont un budget conséquent et s’orientent vers des sites attractifs et paradisiaques. C’est ce genre de touristes que l’insdustrie du tourisme a, à attirer. Mais le Togo est loin de répondre aux exigences de ces derniers.
Quid des voies d’accès ?
Ces différents sites touristiques cités plus haut ont en commun une autre caractéristique qui ne milite pas en faveur d’une attraction. En effet, se rendre sur la plus part de ces sites est un véritable chemin de croix, encore plus pour les touristes étrangers qui ne sont pas habitués à ces situations. Les voies d’accès à certains sites laissent à désirer. Ce qui n’est pas de nature à encourager les touristes qui s’y aventurent à y retourner. Encore moins à en parler autour d’eux pour attirer d’autres candidats au tourisme.
C’est ainsi que le Togo peine à convaincre « les vrais touristes » qui peuvent apporter une plus-value conséquente à l’industrie du tourisme que les autorités déclarent depuis une décennie vouloir remettre en marche.
La création de l’ANDT, un début de changement ?
En Conseil des ministres, le 27 février dernier, le ministre de l’Industrie et du tourisme, Ihou Attigbé a délivré une communication portant sur la création d’une Agence Nationale de Développement du Tourisme (ANDT). Cette agence aura pour mission de « piloter et d’exécuter les projets du département, de positionner la destination touristique togolaise à l’échelle locale, régionale et internationale, d’utiliser les avantages comparatifs du pays pour hisser la destination Togo parmi les leaders en Afrique de l’Ouest et de fournir des résultats tangibles sur les indicateurs de développement touristique du Togo ». A travers l’ANDT, le gouvernement entend franchir la barre des 500 000 touristes avant 2020, créer des milliers d’emplois, augmenter les recettes hôtelières et améliorer l’apport du tourisme au PIB. Il s’agit pour l’exécutif de faire du tourisme un levier de développement en hissant le Togo dans les destinations les plus prisées de l’Afrique de l’ouest.
La création de l’ANDT pourrait-elle changer la donne. Il est difficile de répondre par l’affirmative si certains sites touristiques demeurent dans leurs états actuels et que la taxation des hôtels reste élevée. Les prix des hôtels qui sont relativement élevés sont à la portée des touristes d’affaires mais pas des touristes classiques qui certes demandent une bonne qualité de service mais à des prix plus abordables. Dans tous ces domaines, le Togo a encore du pain sur la planche.
Koffi Miboussomékpo
Source : Fraternité
27Avril.com