Togo, Sortie par la grande porte : Faure Gnassingbé rate le coche

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Le vin est tiré et il ne reste qu’à le boire. Faure Gnassingbé a réussi à passer en force et s’offrir un quatrième mandat au pouvoir, avec la frauduleuse du 22 février dernier où il n’a ménagé aucun effort pour l’emporter. Mais face à la belle surprise signée Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire et aux louanges dont il est l’objet en Côte d’Ivoire, en Afrique et à travers le monde, on se rend davantage à l’évidence que le « jeune » « Messi » a vraiment raté le coche…

ADO célébré à travers le monde

« (…) J’ai décidé de ne pas être candidat en 2020». Personne ne s’y attendait, même dans les rangs de ses partisans et admirateurs, encore moins ses détracteurs qui le soupçonnaient de vouloir s’offrir une prolongation. Mais Alassane Dramane Ouattara a pris tout le monde à revers en annonçant officiellement devant les sénateurs et autres élus le jeudi 5 mars dernier à Yamoussoukro, sa décision de ne pas briguer un 3e mandat à la tête de la Côte d’Ivoire lors de la présidentielle du 31 octobre 2020. Et depuis, il est célébré dans le pays, sur le continent africain et à travers le monde.

L’expression (célébré) est un brin exagérée. Mais elle ne traduit pas moins la réalité, celle qui voit le monde entier saluer cette sage décision d’ADO. Au sein de l’opinion, certains relativisent et parlent plus d’une mesure de prudence, arguant que lui-même sait très bien qu’en Côte d’Ivoire, c’est très risqué pour tout dirigeant de vouloir s’offrir un 3e mandat au pouvoir, surtout lorsqu’on s’appelle Alassane Dramane Ouattara et qu’on se rappelle la façon dont il est monté au pouvoir. Le pays est une poudrière, les armes circulent toujours et il prendrait d’énormes risques en voulant s’accrocher.

Mais n’empêche, Alassane Ouattara est félicité pour cette décision de sagesse. « Alassane Ouattara n’est pas candidat à l’élection présidentielle. C’est une grande décision, c’est un acte fort. Il pose ainsi les bases d’une élection transparente », a réagi Affi N’Guessan du Front populaire ivoirien (FPI). « Ouattara opte pour l’alternance démocratique et Alpha Condé défend sa présidence à vie en assassinant ses compatriotes. La répression policière de ce jeudi a fait deux morts et plusieurs blessés par balle. Mobilisons-nous davantage, la victoire est proche !», a glosé sur Twitter l’opposant guinéen Cellou Dalein Diallo. « Le président Ouattara prend date devant l’Histoire avec cette solennelle annonce dont nous espérons un très large écho en Afrique », a renchéri le Sénégalais Alioune Tine, défenseur des droits de l’homme.

La réaction qui aura plus eu écho à travers le monde, c’est évidemment celle d’Emmanuel Macron. Le président français a salué la « décision historique » d’ADO de «ne pas se présenter à la prochaine élection présidentielle », estimant que « la Côte d’Ivoire donne l’exemple ».

Faure rate le coche

ADO n’est pas un saint, loin s’en faut. Dieu sait qu’il a causé des torts à beaucoup d’Ivoiriens. Les tueries de la crise postélectorale de 2010, il a aussi sa part de responsabilité là-dedans. Dans l’entourage de Laurent Gbagbo, on pense même qu’il est seul coupable, parce que ces Ivoiriens seraient encore en vie s’il n’avait pas pris les armes, accompagné par la communauté internationale et suscité la riposte de l’armée régulière. Alassane Ouattara a aussi sûrement causé du tort à d’autres par sa gouvernance. Il s’est brouillé avec ses amis d’hier (Guillaume Soro, Henri Konan Bédié). Mais quoi qu’on dise, par cette décision salutaire, il sort par la grande porte. Faure Gnassingbé aussi aurait pu prendre une telle trajectoire et recueillir autant de reconnaissances à travers le monde. Surtout qu’il est encore jeune et a tout le temps de revenir aux affaires après cinq ans.

Même si ADO ne sera pas candidat à la présidentielle du 31 octobre prochain, personne ne se fait d’illusion dans les rangs de l’opposition et des observateurs avertis, cela ne signifie guère une perte du pouvoir du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Il va placer un dauphin à ce scrutin et tout sera entrepris pour le faire gagner. Ca balance entre le ministre de la Défense Hamed Bakayoko et le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly. Une telle stratégie évidente, Faure Gnassingbé aurait bien pu aussi l’utiliser.

Il lui suffisait de décider de ne pas candidater et de choisir de positionner un de ses nombreux collabos, des têtes bien faites et bien pleines d’ailleurs, le régime RPT/UNIR mettrait tout en œuvre pour voler pour ce candidat et le tour serait joué. Il avait même été entre-temps distillé au sein de l’opinion la rumeur d’un scénario à la congolaise, avec un opposant choisi (sic) qui se verrait ainsi installer au pouvoir, comme un pantin, contrôlé par le régime, exactement comme avec Etienne Tshisekedi en République démocratique du Congo (RDC). Au moins ainsi, le nom Faure Gnassingbé ne serait plus dans les bouches.

Par cet éventuel retrait, il sortirait aussi par la grande porte. L’histoire retiendra ainsi qu’il aura été le premier Gnassingbé à se retirer volontaire du pouvoir et il serait célébré en héros par le peuple togolais qui ne cherche que l’alternance depuis plusieurs décennies. Mais le « champion » a décidé de s’accrocher, ratant ainsi le coche et s’isolant davantage, avec cette décision salutaire d’ADO qu’on pensait lui emboiter le pas. Cette mesure du Chef de l’Etat ivoirien ferait même réfléchir l’autre candidat au 3e mandat dans l’espace CEDEAO, Alpha Condé de la Guinée, et beaucoup d’observateurs croient comme fer qu’il renoncera aussi à la modification de la Constitution et à toute candidature à un 3e mandat…Décider de ne pas briguer un mandat supplémentaire, « c’est pas sorcier »…

Tino Kossi

Source : Liberté

Source : 27Avril.com