Togo / Situation inédite dans les institutions de la République : HAAC, HAPLUCIA, CNDH, Cour des Comptes… de longs mois de prolongation des membres

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« Le respect de la loi qu’on s’est prescrite est liberté », enseigne la sagesse. Lorsque des textes constitutionnels existent, mais qu’on continue de les passer outre, alors se propage une maladie dite injustice sociale qui risque d’ébranler les fondements du vivre ensemble. Surtout quand ces injustices touchent des secteurs censés montrer les bonnes manières et lutter pour une meilleure justice sociale. Combien de mois ou d’années encore avant que le Chef de l’Etat et sa Cheffe de gouvernement ne se décident à opérer des changements à la tête des institutions dont des membres sont à bout de mandat ?

Au hit-parade des institutions qui jouent aux prolongations, se trouve la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (HAAC). Il est vrai que de nos jours, les prolongations lors des matchs de football durent de plus en plus, mais lorsqu’on réalise que depuis juin 2021 et la fin de la mandature des membres de cette institution, aucun nuage quant à leur remplacement ou leur maintien ne pointe à l’horizon.

Or, un mandat dure cinq ans, soit 60 mois, mais les membres de cette institution ont déjà indûment effectué 26 mois supplémentaires, grevant le budget de l’Etat. Et si rien n’est fait, en décembre prochain, ils cumuleront 50% de mandat supplémentaire gratuitement, mais sur le dos du contribuable.

Par contre, s’il est une chose que beaucoup ignorent, ou dont personne n’ose parler, c’est que dans les starting-blocks, ils sont nombreux à se tenir prêts à postuler pour succéder aux membres « qui jouent à la prolongation ». Malheureusement pour ne pas se faire cibler et réduire leurs chances de sélection, aucun parmi les futurs prétendants ne veut froisser en élevant la voix. C’est aussi ça les limites de la liberté chez certains. Or, la HAAC a besoin de faire peau neuve.

Les membres ne manquent pas d’occasion pour rebattre les oreilles des responsables de médias à chaque rencontre avec les sempiternelles histoires d’éthique et de déontologie. Justement, l’éthique commande qu’en cas d’oubli du premier magistrat, le président rappelle sans se lasser que leur mandat a expiré et pour préserver la crédibilité de l’institution, il faille procéder à la nomination de nouveaux membres ou à la reconduction des anciens. Car le silence jette de la suspicion sur le degré de probité des uns et des autres.

Une institution de prévention et de lutte contre la corruption et les infractions assimilées peut elle porter des habits qui ressemblent à de la collusion ou du favoritisme? Beaucoup de personnes ont d’abord été surprises de voir le mandat de l’ancien président de la HAPLUCIA écourté. Avant de réaliser que c’était dans le respect des textes de l’institution par rapport à son mandat.

Et depuis janvier 2023, un nouveau président a pris la relève. Sauf que l’initiateur du décret l’ayant nommé semble oublier qu’il n’est pas le seul dans la situation. Tous les autres membres de la HAPLUCIA devraient libérer le plancher pour une nouvelle équipe avec le nouveau président.

Malheureusement, les mois passent et rien ne change. Voudrait-on faire croire que les autres membres pourraient, en violation des textes, continuer à travailler et donc à percevoir leurs salaires alors qu’ils devraient « aller voir ailleurs » ? Il y a une forme d’injustice qui ne dit pas son nom.

La Cour des comptes. Censée incarner les institutions les plus clean, il serait aussi apparu que le mandat des membres actuels serait arrivé à expiration. Et quand on se rappelle que des rapports de cette institution sont à cheval sur les bonnes pratiques, il est curieux que ses membres ne montent pas au créneau pour rappeler au Chef de l’Etat l’obligation de respecter la Constitution et la loi organique de ladite cour.

Ajouté à ce qui précède le décès d’un de ses membres, il devient impératif que la loi prévale, bien qu’elle soit dure. Un autre décès semble passé par pertes et profits : Polo Nakpa, ancienne présidente de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH). Rappelée à Dieu depuis août 2021, plus précisément le 17 août, elle a laissé une place qui tarde à être comblée.

Certes un nouveau président assume avec diligence les tâches à lui dévolues, mais numériquement, la CNDH demeure incomplète. Les membres de cette institution sont également dans une situation inconfortable. Elus le 22 mars 2019, le mandat des neuf (09) membres dont quatre (04) femmes est arrivé à échéance depuis 2022. Depuis, ils jouent aussi à la troisième mi-temps.

La liste des institutions qui ne répondent pas à la constitution et aux lois organiques n’est certainement pas exhaustive. Mais au-delà de l’oubli –fortuit ou exprès- du Chef de l’Etat, c’est l’entourage de celui-ci qui pose problème.

Qu’un chef d’Etat en vienne à oublier des détails dans la gestion des affaires publiques, ça peur arriver. Raison pour laquelle la plupart sont entourés de conseillers. Mais alors, à quoi servent tous ces conseillers et autres secrétaires s’ils ne sont pas en mesure, ou n’ont pas le courage de rappeler à leur chef certaines situations à actualiser ? Percevoir des émoluments à chaque fin de mois, c’est doux ; encore faut-il en être à la hauteur et les mériter. Comment?

En s’acquittant des devoirs qui sont les vôtres, messieurs les conseillers. La justice sociale, c’est aussi l’exigence de remplacer des gens à leurs postes quand vient l’heure ; ce qui offre la possibilité à d’autres de faire valoir leurs compétences. A moins que les textes ne valent plus ce qu’ils doivent valoir !

Godson K.

Source: Liberté N°3847 du Jeudi 10 Août 2023

Source : 27Avril.com