Togo – Sahouda Gbadamassi, directrice du FAIEJ : « Notre soutien est décisif car il rassure les banques »

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L’une des missions du Fonds d’appui aux initiatives économiques des jeunes est de donner à ceux qui ont des projets les moyens de les réaliser. Combien en ont profité ? Et avec quels résultats ?

Comme tous les pays ouest-africains, le Togo est confronté à des taux de chômage et de sous-emploi élevés, qui touchent massivement les jeunes (lire encadré). Pour tenter de trouver des solutions, le gouvernement a, entre autres, créé le Fonds d’appui aux initiatives économiques des jeunes (FAIEJ). Opérationnel depuis 2013, ce dispositif a pour mission de faciliter leur insertion socio-économique, notamment via l’auto-emploi et la création d’entreprise, en les aidant à bien ficeler leurs plans d’affaires et à décrocher un prêt d’amorçage auprès des banques ou des institutions de microfinance.

Jeune Afrique : Quel bilan faites-vous des activités du FAIEJ ?

Sahouda Gbadamassi : L’une des plus belles réussites du Fonds est certainement le crédit jeune entrepreneur [CJE]. L’État, à travers le FAIEJ, facilite l’octroi de fonds d’amorçage pour la création d’activités sous forme de CJE, un crédit à 4,5 % conçu et mis en place avec l’appui d’établissements financiers de référence tels que l’Union togolaise de banque [UTB], Orabank et des institutions de microfinance, dans chaque région du pays.

De 2013 à 2016, le CJE a contribué au financement de 1 350 projets de jeunes entrepreneurs

De 2013 à 2016, le CJE a contribué au financement de 1 350 projets de jeunes entrepreneurs – l’objectif est d’en atteindre 1 500 à la fin de 2017 –, pour un volume de 2,3 milliards de F CFA [3,5 millions d’euros], qui ont débouché sur la création de 3 800 emplois. Le guichet technique du FAIEJ accompagne les lanceurs potentiels de microentreprises afin de mesurer et de minorer le risque crédit.

Cet encadrement est un élément décisif, car il rassure les établissements financiers partenaires, qui acceptent de financer la microentreprise dès son démarrage. Ce guichet a déjà guidé plus de 9 000 jeunes, en les aidant notamment à développer leurs capacités techniques en matière de création d’entreprise, de gestion et de management.

Y a-t-il une véritable implication de l’État, notamment budgétaire, en faveur de l’entrepreneuriat des jeunes ?

L’engagement de l’État sur ce sujet est réel et permanent, aux côtés du FAIEJ mais aussi des autres mécanismes de promotion de l’entrepreneuriat des jeunes [dans le cadre du Programme d’aide au développement à la base, ou Pradeb, de l’Agence nationale de promotion et de garantie de financement des PME-PMI, soit l’ANPGF PME-PMI, du Fonds national de la finance inclusive (FNFI), etc.].

Outre les ressources qu’il accorde à ces dispositifs intervenant dans le soutien aux activités économiques des jeunes, l’État mobilise des bailleurs de fonds tels que la BAD, le Programme des Nations unies pour le développement [Pnud], la Banque mondiale, etc., ce qui, là encore, crée un effet de levier. En ce qui concerne la dotation du FAIEJ, l’État a mobilisé environ 2,8 milliards de F CFA depuis 2013.

Quels sont les mécanismes d’intervention du Fonds ?

Ses actions s’articulent autour de trois composantes : l’identification et la structuration de la cible visée par le projet, la facilitation de l’accès au financement et l’accompagnement dans la réalisation dudit projet. Pour cela, le FAIEJ s’appuie sur des opérateurs, experts dans leurs domaines sur les plans technique et entrepreneurial, qui aident le jeune promoteur à renforcer ses compétences en matière de création d’activité et à structurer son projet d’entreprise, dans le cadre de partenariats public-privé.

Ces partenaires privés jouent un rôle prépondérant, est-ce aussi le cas des établissements financiers ?

Le partenariat public-privé est une absolue nécessité dans le cadre de la lutte contre le chômage des jeunes et, plus particulièrement, de notre stratégie de promotion de l’entrepreneuriat, inscrite dans une dynamique de création d’emplois.

La contrainte majeure pour le financement d’un microprojet, c’est la rentabilité

Les prestataires de services et les centres de référence en qualification métier informent, conseillent, accompagnent le jeune de façon à ce qu’il dispose des compétences techniques nécessaires dans son secteur d’activité. Les institutions financières partenaires dans l’octroi du CJE apportent aussi leur savoir-faire pour le démarrage de l’activité de ces jeunes dans le cadre de la responsabilité sociétale des entreprises [RSE].

Cela constitue un appui supplémentaire aux ressources publiques. Et c’est à cette condition que nous pouvons espérer voir émerger au Togo une nouvelle génération d’entrepreneurs qui, d’ailleurs, constitueront une clientèle privilégiée pour ces établissements financiers dans le futur.

Les critères requis pour bénéficier de l’appui du FAIEJ ne sont-ils pas trop contraignants pour la plupart des jeunes chômeurs ?

La contrainte majeure pour le financement d’un microprojet, c’est la rentabilité. Dès l’instant où son projet est « porteur » [c’est-à-dire réaliste, réalisable et viable], le Fonds accompagne le jeune dans sa création d’activité, la structuration de son projet, l’acquisition des qualifications métier nécessaires et, enfin, l’obtention d’un CJE auprès d’une banque ou d’un organisme de microfinance, qui décide en dernier ressort de financer ou non la microentreprise, le risque crédit étant porté à la fois par le Fonds et par l’institution financière partenaire.

Donc, au contraire, le FAIEJ permet de lever nombre de contraintes pour un jeune entrepreneur. Il place justement ce dernier dans une dynamique de « promotion de lui-même » et de son projet… De quoi créer les conditions pour que la créativité et le talent soient valorisés et que les bénéficiaires du Fonds s’épanouissent, socialement et économiquement.

 

Jeune Afrique