Tension, voilà le signe sous lequel a commencé et s’est déroulée l’année scolaire 2016-2017. Après plusieurs mois de débrayage, elle s’est terminée de façon plus calme, les compositions et les examens se sont passés et les élèves sont presque tous en vacances. Mais l’accalmie enregistrée n’est nullement un gage de sérénité de l’année prochaine. Si les élèves viennent à peine d’entrer en vacances et il reste encore environ deux mois avant la reprise des classes, les enseignants mettent déjà la pression sur le Premier ministre par rapport à leurs revendications et à ses promesses. Et légitimement.
L’année 2016-2017 terminée dans le calme
A quelques nuances près, allusion à l’année 2013 qui avait vu la soldatesque tuer deux jeunes élèves lors des manifestations à Dapong, Anselme Sinandaré et Douti Sinalengue, jamais année scolaire n’aura été aussi mouvementée au Togo que celle 2016-2017. Elle a commencé et s’est déroulée de longs mois dans la tension. Le gouvernement a cru devoir dribbler les syndicats d’enseignants qui élevaient déjà la voix au cours des vacances 2015-2016 et à quelques semaines de la rentrée, en la reportant de trois (03) semaines pour court-circuiter les enseignants qui menaçaient de gâcher la fête (sic) du sommet sur la sécurité maritime et le développement en Afrique. Ce n’était que partie remise, car à la reprise le 17 septembre 2016, le corps enseignant a multiplié les grèves. Tantôt de quarante-huit (48) heures, tantôt de soixante-douze (72), tantôt d’une semaine, ils ont tenu la dragée haute, mené les gouvernants du bout du nez. Les menaces, intimidations, mépris de certains ministres et autres ne les ont en rien démotivés. C’est devant leur détermination à aller au bout de leur revendication, et aussi la menace d’année blanche qui planait, que le gouvernement a abdiqué et pris des mesures d’apaisement.
Le 17 mars 2017, c’est le Premier ministre himself qui a annoncé aux syndicats les dispositions prises, au cours d’une rencontre. « Les perturbations que le secteur de l’éducation a connues ces trois ou quatre dernières semaines ont mené le gouvernement, et en tête le président de la République, à faire des efforts pour essayer d’anticiper sur ce qui devrait être annoncé dans le cadre du statut particulier », avait déclaré Komi Sélom Klassou. Dans l’immédiat, il a été décidé le doublement, à partir du 1er avril 2017, de la prime d’incitation à la fonction enseignante. Si l’effectivité de cette prime a connu quelques couacs au moment venu, tout est apparemment rentré dans l’ordre. La revendication principale, à savoir l’adoption d’un statut particulier, a été promise par le chef du gouvernement à l’avant-rentrée scolaire 2017-2018. Ces mesures ont eu l’effet de calmer un tant soit peu les enseignants qui menaçaient de troubler les évaluations et examens de fin d’année. Les compositions ainsi que tous les examens ont eu lieu, et la plupart des élèves sont déjà en vacances. Il ne reste que les résultats du BAC et du CEPD à donner pour que la boucle de l’année scolaire 2016-2017 soit bouclée. Si officiellement les vacances démarrent le 4 août prochain, les indiscrétions annoncent la proclamation des résultats de ces deux derniers examens au 9 août ou simplement à la semaine prochaine.
Le PM déjà mis devant ses responsabilités
C’est dans l’accalmie totale que l’année scolaire s’est terminée. Mais ce n’est pas un gage de sérénité de celle à venir. Et les enseignants ont tenu à le signifier déjà à qui de droit. C’est l’exercice auquel s’est plié lundi dernier Atsou Atcha, le responsable de la Coordination des syndicats de l’éducation du Togo (CSET), principale organisation qui a incarné la fronde toute l’année scolaire qui est à son terme, au cours d’une intervention sur une radio de la place.
Respect des engagements pris, c’est ainsi résumée la condition posée. A l’en croire, il faut que le gouvernement honore les promesses faites par le Premier ministre le 17 mars 2017, notamment que le statut particulier soit effectivement adopté avant la rentrée prochaine, de même que ses avantages effectifs. « Il ne faut pas qu’à la veille de la rentrée, on ait l’impression que le statut ne sera pas prêt, que les enseignants aient l’impression qu’ils sont en train d’être dribblés encore une fois », a relevé Atsou Atcha. A l’en croire, la CSET fait néanmoins confiance à Komi Klassou. «Dire que le Premier ministre, une personnalité non des moindres, va recommander un travail ou va faire des promesses à l’endroit d’un secteur qui n’est pas aussi des moindres, l’éducation, et que cela ne sera pas au rendez-vous, cela nous étonnerait. Le statut particulier doit être prêt à la rentrée avec son application et les avantages, notamment l’aspect financier », a-t-il précisé.
Faut-il le rappeler, le processus d’élaboration du statut particulier est bien enclenché. Un rapport d’étape a été d’ailleurs remis, le 26 juillet dernier, au Premier ministre par le comité de rédaction dirigé par Adamah Kankoe, au cours d’une rencontre où le chef du gouvernement était entouré des ministres Gilbert Bawara de la Fonction publique, du Travail et de la Réforme administrative, Komi Tchakpele des Enseignements primaire, secondaire et de l’Alphabétisation, Georges Aïdam de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle, entre autres. A en croire le président du comité de rédaction, le travail a débuté par de larges consultations avec les acteurs de l’éducation à Lomé et qui se sont étendues à tout le territoire. « A ce jour, les travaux sont suffisamment avancés. La proposition du comité sera remise au gouvernement dans un bref délai », a-t-il indiqué.
Mais dans les rangs des enseignants, on redoute un retard. « Nous avons une contrainte relative au temps qui nous sépare du jour de la rentrée et les tâches qui restent pour que ce statut soit une réalité et la façon dont il faut procéder pour que ce document soit accepté par toutes les parties. Nous souhaitons vivement que pour le reste du parcours, toutes les parties prenantes soient impliquées », a relevé Atsou Atcha. Selon les informations, un courrier est d’ailleurs adressé au chef du gouvernement dans ce sens. Pour la CSET, dans le cas où le statut n’est pas prêt, il faut repousser la rentrée.
Cette sortie du premier responsable de la CSET est légitime à plus d’un titre, car la duplicité est le signe caractéristique du pouvoir en place. On ne serait pas étonné qu’à la rentrée, le fameux statut ne soit pas prêt et qu’on demande encore aux enseignants de patienter. Les mêmes causes produiront donc les mêmes effets. Par cette sortie, la CSET met la pression sur le Premier ministre, mais surtout le place devant ses responsabilités. Si à la rentrée on entend encore parler de grève, ce ne serait pas par la faute des enseignants. A part l’adoption du statut particulier qui est déjà problématique, il y a aussi la question des précomptes « indûment » effectués sur les salaires lors des grèves qui demeure sur le tapis…
Tino Kossi
Source : Liberté
27Avril.com