Il est connu grand donneur de leçons et celui qui brille le plus dans le manque d’élégance et de courtoisie politique. Mais au fond, il est l’un des grands jouisseurs du pouvoir de Faure Gnassingbé. Lui, c’est Gilbert Badjilembayena Bawara. Grand inconnu des Togolais jusqu’à la mort de Eyadèma Gnassingbé le 5 février 2005, l’ancien agent de l’ONU est devenu l’un des plus riches du régime. Du DSRP aux élections business en passant par le recensement des agents de la fonction publique, celui qui se réclame ami personnel de Faure Gnassingbé ne manque jamais d’opportunités pour faire ses affaires. La nouvelle trouvaille est le recensement des agents de la fonction publique à partir d’aujourd’hui.
Une opération aux contours flous
Le ministre de la Fonction Publique, du Travail et de la Réforme Administrative a annoncé le 04 janvier dernier que le gouvernement procèdera au recensement de l’ensemble des agents publics du 21 janvier au 20 février 2019.
Le marché a été confié à la société ivoirienne Snedei qui doit sillonner les différents services publics répartis sur toute l’étendue du territoire national pour recueillir les informations nécessaires concourant à la réalisation de sa mission. En effet, pour avoir une idée sur l’effectif réel des fonctionnaires, l’opération de recensement reste le moyen idéal. Elle permet une meilleure planification du budget.
Quoi de plus normal que depuis 2011 où le dernier recensement a été fait et qui a dénombré 50.400 agents, qu’on reprenne cette opération huit ans après. Mais dans quelles conditions ce marché a-t-il été attribué à la société ivoirienne ? Quelle est l’opportunité de cette opération en ce moment lorsqu’au sein même du ministère de la Fonction Publique, les agents sont constamment en grève pour un meilleur cadre de travail et l’amélioration de leurs conditions de vie ? Quel est le montant de ce recensement ? Sous Faure Gnassingbé, des opérations de ce genre constituent des occasions rêvées pour les enrichissements illicites à travers des marchés gré à gré, copinage, surfacturation entre autres.
S’agissant de Bawara, on se souvient des conditions floues dans lesquelles il a introduit la société Zetes de l’enfant de Louis Michel pour l’achat des kits défaillants et délabrés pour les opérations électorales en 2007, 2010, 2013, 2015 et 2018 au Togo. C’est un marché gré à gré dont Bawara seul maîtrise les tenants et les aboutissants. Malgré les désapprobations à chaque joute électorale, Zetes continue d’opérer au Togo avec la bénédiction de Bawara. Il a été l’instigateur du Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté au Togo (DSRP 1 et 2) qui a englouti plusieurs milliards pour plutôt contribuer à aggraver la misère et la pauvreté au Togo. Pour la reprise de la coopération entre le Togo et l’Union Européenne, c’était encore le marché de Bawara. Dieu seul sait ce qu’il a empoché comme commissions et retro-commissions.
Dans la crise politique née des manifestations du 19 août 2017, c’est encore lui qui était chargé des lobbyings pour divertir les gens et acheter le silence de certaines institutions internationales dont la CEDEAO. Quand un homme de ce pedigree se lève un matin et lance un chantier de recensement des agents publics avec encore une société étrangère, on peut tout imaginer.
Le plus affligeant, cette opération est une farce car les agents fictifs et les faux diplômés sont légion sous ce régime. La dernière illustration a été le bras de fer entre le Président de la Délégation Spéciale de la Préfecture du Golfe Kossi Aboka et l’ancien Préfet du Golfe Koffi Melebou. A quoi servirait le recensement des agents de la fonction publique lorsque le recrutement à la fonction publique n’est pas fait par mérite et compétence mais à l’aune du militantisme politique et du copinage.
Il ne fait l’ombre d’aucun doute, le recensement annoncé du 21 janvier au 20 février est un nouveau canal d’enrichissement illicite.
Source : Le Correcteur No.857 du 21 janvier 2019
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