Togo: polémique autour du prix décerné à Cina Lawson aux Etats-Unis

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La ministre des Postes et de l’Economie numérique, Cina Lawson a reçu, samedi, le « Prix du service public d’anciens élèves » décerné par la John Kennedy School of Government « pour sa contribution au développement des TIC et du numérique au Togo ». Une récompense qui sème le doute au vu des performances de la ministre depuis son entrée au gouvernement en 2013.

Il arrive souvent que les Togolais soient surpris par des rapports internationaux ou des classifications étonnantes que le gouvernement n’hésite pas à brandir comme des trophées de guerre. Depuis quelques années, des conférences de presse sont annuellement organisées pour ventiler les rapports « Doing Business » qui classent souvent le pays parmi les plus performants au monde en matière du climat des affaires. Et chaque fois que ce rapport est présenté, les Togolais expriment leur étonnement puisque sur le terrain, c’est une toute autre situation qui est vécue. Et beaucoup pensent même que ces récompenses sont soutenues par d’autres motivations. Eh bien, la logique des récompenses « payantes » se poursuit. La dernière en date est le « Prix du service public des anciens élèves » attribuée à Mme Cina Lawson.

La ministre des Postes et de l’Economie numérique s’est envolée vers les Etats-Unis pour recevoir ce prix décerné par la John Kennedy School of Government. Une école d’administration publique de l’université de Harvard qui propose diverses formations en politique, administration publique, économie, et développement et autres thèmes liés aux affaires publiques.

Pourquoi une telle récompense ? C’est la question que nous nous sommes posée la nouvelle nous est parvenue. Selon les informations, la ministre a été honorée en qualité d’ancienne étudiante « pour sa contribution au développement des TIC et du numérique au Togo ». Cette précision mérite des commentaires.

 

D’abord les TIC et le numérique, cela existe bel et bien au Togo. Mais à l’étape actuelle, on ne saurait parler d’évolution ni de développement, ou faire usage d’une quelconque expression qui traduit une idée de performance pour les qualifier. Le Togo, en matière de numérique, est toujours à l’étape d’initiation. Les pays voisins ou de la région ouest-africaine ont creusé l’écart en matière d’évolutions technologiques. Certes, les projets sont lancés, des discours sont lus et les « grandes ambitions » du gouvernement sont présentées ; mais il est difficile de percevoir une évolution notable dans le quotidien des usagers des services Internet.

Ensuite, Mme Cina Lawson a intégré le groupe à Faure Gnassingbé en 2013. Cela fait donc six ans qu’elle pilote l’action du pays en matière de technologie. Malheureusement, peu de mérites peuvent lui être attribués. Peut-être même aucun. Et pour cause, Cina Lawson est celle-là même qui a promis pendant des années l’ouverture du marché de la téléphonie mobile à d’autres opérateurs. Des appels d’offres ont même été lancés. Après plusieurs années d’attente, elle a fini par déclarer non attractif le marché togolais. « Lorsque nous avons enclenché le processus en 2014, la raison pour laquelle ceci n’a pas abouti est qu’il y avait une absence d’intérêt de la part des investisseurs et une volonté d’attendre parce que chaque investisseur à sa propre stratégie et il convient de reconnaître que la taille du marché togolais n’est pas aussi attractive comme nous le pensions», avait- elle déclaré en juillet 2016. Elle mettait ainsi fin au rêve des Togolais d’accueillir un 3ème opérateur de téléphonie mobile. Soit dit en passant, le taux de pénétration Internet au Togo ne peut être comparé à celui d’un pays comme le Ghana.

A la même occasion, elle a estimé que « ce qui intéresse les consommateurs ce n’est pas d’avoir 3, 4 ou 5 opérateurs, mais des services de qualité à des prix compétitifs ». Depuis, les services de qualité aux prix compétitifs qu’elle pensait installer dans un contexte de duopole n’ont jamais été réalisés. Pour renforcer cette situation de duopole, la ministre a précipité la fermeture de Togotelecom et sa fusion avec Togocel pour former le groupe Togocom, avec à la clé la suppression de certaines offres. Moov et Togocom occupent seuls le marché togolais et proposent des services qui peinent à répondre aux attentes des consommateurs. Cina Lawson a sans doute oublié que c’est la concurrence qui crée la compétitivité.

L’autre paramètre dont il faut tenir compte, est que les grandes universités sont dans une logique de recherche de la notoriété. Pour se maintenir en haut du tableau, ces universités recherchent des anciens élèves qui occupent des postes de responsabilité pour faire le lien entre leur position et les formations qu’elles proposent. L’essentiel est de faire un peu de communication autour de l’école.

Cette distinction à tout l’air d’une récompense « payante ».

G.A.

Source : Liberté

Source : Togoweb.net