Togo : Pas d’Alternance au Pouvoir pour une Armée.

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Les Corps habillés d’un pays sont l’ensemble des fonctionnaires qui se distinguent par le port d’un uniforme et d’une arme : ce sont les policiers, les gendarmes, les militaires, les douaniers et les eaux-et-forêts. Les policiers s’occupent du respect de la loi en ville, les gendarmes hors des villes mais sur l’ensemble du territoire. Les douaniers s’occupent du respect de la loi dans les échanges commerciaux aux frontières. Les eaux-et-forêts veillent sur les biens communs concernant l’eau, la faune et la flore du pays. Les militaires, quant à eux, sont chargés de défendre le pays contre toute agression d’où qu’elle vienne ; ils sont regroupés au sein d’un corps appelé Forces armées ou Armée tout court. L’Armée est commandée par un état-major.

Dans une république, quand un président est élu, le Chef d’état-major de l’Armée lui prête un serment d’allégeance au nom de tous les Corps habillés. Ce serment dit au Président que les Forces armées et les autres corps habillés se mettent à sa disposition. Cette allégeance est répétée à tout Chef d’Etat que choisit le peuple, quelle que soit sa couleur politique. C’est ce qui vaut à l’Armée le qualificatif de républicaine. Elle est au service de l’Etat et à la disposition de n’importe quel président que le peuple désigne pour en être le chef.

Une Armée qui ferait allégeance à un chef de l’Etat non pas parce qu’il est l’élu du peuple mais parce qu’il est d’une certaine couleur politique et, donc, ne serait pas prête à prêter allégeance à un élu d’une couleur politique différente, est dite Armée prétorienne.

L’Armée togolaise est-elle une Armée républicaine ? Est-elle une Armée prétorienne ? Ni l’une ni l’autre. Parce qu’elle est, elle-même, Chef de l’Etat. Le coup d’état militaire du 13 janvier 1963 a introduit l’Armée togolaise dans la politique. Le coup suivant, celui du 13 janvier 1967, a permis à l’Armée d’entrer de plain-pied dans l’exercice du pouvoir d’Etat. A la mort d’Eyadéma, chef de l’Armée et chef de l’Etat, le 5 février 2005, l’Armée orpheline est allée chercher un des fils de son défunt patron pour assumer l’intérim. C’est ainsi, qu’en toute illégalité, Faure Gnassingbé a pris le pouvoir comme porte-fanion de l’Armée.

De 1967 à aujourd’hui, cela fait 51 ans que l’Armée togolaise est au pouvoir. Les hommes et les femmes de zéro à 50 ans n’ont vécu qu’un pouvoir militaire.

Le danger de cette durée est que certaines opinions ont commencé à accorder une légitimité à ce pouvoir pourtant illégitime et à ses sous-produits tout aussi illégitimes que le RPT/UNIR, son parti dont les satellites s’affublent aujourd’hui du titre de « centristes ». Le fruit de cette auto-aliénation est dans la revendication d’une ALTERNANCE. Dans les conditions actuelles l’alternance revient à accepter que si l’Armée quitte le pouvoir aujourd’hui, elle pourra revenir demain. Non, nous ne sommes pas à l’étape de l’alternance, nous sommes à l’étape où il faut faire partir du pouvoir un usurpateur.

Que sa durée soit de 50 secondes ou de 50 ans, une illégitimité reste une illégitimité. Dans toutes les constitutions démocratiques républicaines, l’Armée au pouvoir est une illégitimité. Tout Togolais de bonne foi doit le reconnaître ou apprendre à le faire. De la CEDEAO à l’Union africaine on n’a pas intérêt à continuer de fermer les yeux sur cette illégitimité, malgré sa durée et, surtout, à cause de sa durée. Toute institution internationale dont l’objectif est le bien-être de l’humain ne doit plus cautionner cet état de fait. Tous ceux qui sont convaincus de l’illégitimité du pouvoir togolais actuel doivent le convaincre d’une manière ou d’une autre à se démettre sans condition et dans l’immédiat.

Zakari Tchagbalé

27Avril.com