Démocratie à la togolaise : 5 ministres emportés par les scandales en 5 ans sous Hollande en France.
Dans certains pays qui peuvent se targuer de donner des leçons de démocratie, l’on assiste quelquefois à des situations qui loin d’étonner le citoyen ordinaire se révèlent plutôt un fait normal de la vie.
Que ce soit en Afrique ou ailleurs, les bonnes habitudes veulent que lorsqu’une faute est commise, que l’auteur en paye les frais, soit une punition ; soit sous forme de réparation. Les pays occidentaux l’ont compris, et à chaque fois qu’un scandale éclabousse par exemple une personnalité exerçant une fonction officielle, toute l’opinion sait à quoi s’attendre dans les jours suivants : limogeage ou démission. La respectabilité et l’honneur des personnalités publiques ou politiques sont à préserver à tout prix, raison pour laquelle l’on extirpe tous les mauvais grains de peur qu’ils n’affectent l’image de l’institution qu’ils représentent.
Cas de la France : 5 ans avec François Hollande, 5 ministres déchus et emportés par des scandales
En mars 2013, le Parquet de Paris annonce une information judiciaire pour fraude fiscale à l’endroit du ministre du Budget d’alors, Jérôme Cahuzac. Ce dernier va rendre son tablier au sein du gouvernement quelques heures seulement après cette annonce. A la suite de cette affaire, deux lois sur la transparence de la vie publique sont adoptées et il est exigé des membres du gouvernement la publication de leur patrimoine. Après le cas de Jérôme Cahuzac, ce fut le tour de Yamina Benguigui, un an plus tard. La ministre déléguée à la Francophonie Yamina Benguigui, soupçonnée d’avoir menti sur sa déclaration de patrimoine, n’a pas été reconduite dans le gouvernement qui a subi un remaniement après les élections municipales. Elle sera condamnée à un an d’inéligibilité. Six mois plus tard, Thomas Thévenoud, Secrétaire d’Etat au Commerce Extérieur démissionne du gouvernement, après avoir reconnu des « retards de déclaration et de paiement » au fisc. Le premier ministre Manuel Valls met officiellement fin aux fonctions de son Secrétaire d’Etat « à sa demande et pour des raisons personnelles ». Belle leçon d’humilité.
Trois mois plus tard et plus précisément le 21 novembre 2014, le Secrétaire d’Etat aux Anciens Combattants Kader Arif, présente sa démission après avoir été cité dans une affaire de favoritisme. Mardi dernier, c’est Bruno Le Roux qui a présenté sa démission quelques heures après l’ouverture d’une enquête du Parquet national financier sur l’emploi de ses filles mineures comme collaboratrices parlementaires. Ceci, à un mois de la fin du mandat de Hollande. Ainsi, en cinq ans, cinq ministres cités dans des affaires louches par la presse ne sont pas reconduits au gouvernement en France.
Qu’en est-il du Togo 12 ans après l’accession de Faure Gnassingbé au pouvoir ?
Après son accession au pouvoir en 2005, le Chef de l’Etat togolais Faure Gnassingbé a vite fait de tempérer le climat de contestation né de la manière dont il a atterri dans le fauteuil présidentiel. Après remise d’un quart de peine à tous les détenus de droit commun, l’une des mesures pour calmer les ardeurs contestatrices était la formation d’un gouvernement de large ouverture, son tout premier gouvernement. La présence remarquée de certaines figures connues sous le sceau de l’opposition ont fait croire à plusieurs observateurs que les choses allaient effectivement changer, surtout que le jeune président déclarait à qui voulait l’entendre qu’il ne se retrouvait guère dans les mêmes méthodes que son défunt père.
Des gouvernements successifs, plusieurs ministres promus malgré les scandales qui les ont éclaboussés.
Depuis 12 ans, les discours tenus par Faure Gnassingbé sont en inadéquation avec ce qu’on observe dans ses gestes. Plusieurs de ses proches collaborateurs, conseillers ou ministres ont été au centre de certains scandales qui sous d’autres cieux ont fait l’objet de poursuites judiciaires ou de démission. Mais au Togo et sous Faure Gnassingbé, on assiste tout au plus à des jeux de chaise musicale dans une impunité rampante. En 2006, Charles Kondi Agba était ministre d’Etat, ministre de la Santé. C’est lors de son passage à ce poste que le scandale de moustiquaires imprégnées a eu lieu, un scandale financier portant sur plusieurs centaines de millions. Pis, cité dans plusieurs affaires de détournements et d’enrichissement illicite, l’ex-ministre des Finances, Adji Ayassor a simplement été relevé de ses fonctions dans le gouvernement pour être nommé Conseiller à la Présidence de la République. Il en est de même pour son compère Ninsao Gnofam qui jusqu’alors garde son poste au sein du gouvernement. Jusqu’à ce jour, il n’a été inquiété en rien.
Avant eux, feu Issifou Okoulou-Kantchati, ministre de l’Environnement et des Ressources Forestières du premier gouvernement de Faure Gnassingbé a été cité dans une affaire de faux-tecks de plusieurs dizaines de millions. L’on se rappelle aussi ce scandale sexuel qui est intervenu le jour d’un conseil des ministres et qui a touché un membre du gouvernement aux cheveux blancs. Les ministres qui se sont succédé au cabinet de l’Enseignement Primaire, Secondaire et de l’Alphabétisation ont enregistré chacun des cas de fraude dans l’organisation des différents examens aux élèves. L’actuel premier ministre Selom Klassou est nommément cité dans l’affaire des Panama Papers portant sur l’évasion fiscale à WACEM. Depuis lors, il continue d’être le chef du gouvernement, sans être inquiété. D’autres auteurs de crimes économiques ou sociaux sont là, intouchables et se permettant le luxe d’occuper les postes de responsabilité de leur choix.
Une impunité consacrée en mode de gouvernance devant une justice aux ordres
C’est le moins qu’on puisse dire. Au Togo, rien ne fonctionne normalement. Les injonctions des organisations de la société civile ou de la presse en ce qui concerne la transparence et les déclarations des biens sont restées sans suite. La justice dont l’une des attributions régaliennes est de veiller au respect de la loi se complait dans une situation d’indifférence totale face aux multiples délits dont les membres de l’exécutif sont coupables. La démocratie à la togolaise est une véritable tétraplégie.
Source : Kossi Ekpé, Le Correcteur Numéro
Togosite.com