Togo-Les droits de l’homme mis à rude épreuves : Bientôt le pays sera à la barre devant les nations-unies

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Courant janvier ou février prochains, notre pays le Togo effectuera un passage devant la commission des droits de l’homme des Nations-Unies pour les droits de l’homme, dans le cadre de l’Examen Périodique Universelle (EPU). Ce sera ainsi la troisième évaluation du genre que subira notre pays après celles de 2012 et de 2016.

Mais manifestement et de toute évidence, l’épreuve de ce troisième passage risque d’être très corsée pour ce petit pays de l’Afrique de l’Ouest et l’on imagine déjà le ministre des Droits de l’homme, Christian Trimua devant une telle épreuve.

En effet, à l’occasion de son deuxième passage en 2016, et eu égard à une série de manquements relevés dans la gouvernance du pouvoir en place en lien avec ce volet des droits humains, la délégation togolaise avait accepté au total 167 recommandations, de façon intégrale ou partielle. Parmi celles-ci, figurent en très bonne place, la protection de la liberté d’expression et le droit de réunion pacifique.

L’on espérait par conséquent que les engagements ainsi pris par le pouvoir de Lomé devant le monde entier, l’amènerait progressivement, à inscrire dans ses méthodes de gouvernance, ce principe sacrosaint d’accorder à tous les citoyens, la marge de liberté requise pour vivre décemment, s’exprimer à volonté et agir en toute liberté en tant qu’acteurs de la vie publique et sociale du pays. Ceci au moins pour deux raisons. D’abord parce que ces droits objets de ces engagements, participent à consolider le vivre ensemble indispensable à la construction de tout pays ; ensuite du fait du respect de la parole donnée qui octroie dignité et crédibilité à toute personne qu’elle soit de l’élite dirigeante ou non.

Malheureusement, selon une communication faite par l’ONG Amnesty International, en prélude au prochain passage de notre pays à cet examen universel, il existe encore beaucoup de pesanteurs dans la mise en œuvre de ces recommandations. Le point que fait cette organisation non-gouvernementale relève certes certaines avancées mineures, mais indique clairement que le pays a fait adopter de nouvelles lois menaçant les droits humains, alors que « dans la pratique, la répression des voix critiques s’est poursuivie en toute impunité, notamment dans le contexte des manifestations de masse de 2017, des élections présidentielles qui ont eu lieu en février 2020 et de la pandémie de Covid-19».

Il s’agit en effet des faits évidents que personne en réalité ne saurait contester, sauf que naturellement, l’Etat du Togo cherchera, l’on l’imagine volontiers, à les justifier et à expliquer les contraintes liées à la sauvegarde de la paix intérieure qui fait partie de ses devoirs régaliens.

Seulement voilà, il se trouve que dans la foulée, le gouvernement togolais s’est quasiment inscrit dans la logique de légitimer le rétrécissement de l’espace civique « en raison des multiples pressions exercées sur les voix critiques », précise Amnesty International qui cite par ailleurs, l’adoption en 2018 de loi sur la cybersécurité, de la loi sur la sécurité nationale en 2019 et de la loi sur les manifestations publiques révisées également en 2019 dont les contenus « portent atteinte aux droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique ».

En sus de ces lois qui vont à l’encontre des engagements pris par l’Etat togolais devant la commission des droits de l’homme, des sanctions administratives ont également été pris contre les médias, pendant que les représentants de la société civile ont fait l’objet de surveillance numérique, les militants des partis politiques ont eux aussi fait l’objet de harcèlement et de mauvais traitement dans les lieux de détention, poursuit l’ONG dans le point qu’il a fait des faits ayant jalonné la gouvernance de notre pays depuis le dernier examen périodique de 2016.

Il ajoute par ailleurs que « le contexte de la pandémie de Covid-19, a servi de prétexte aux autorités pour interdire systématiquement toutes les manifestations publiques depuis mars 2020, alors que des membres des forces de défense et de sécurité seraient responsables des meurtres de personnes ne respectant pas les mesures restrictives prises par les autorités pour lutter contre la propagation du virus ».

Dans la perspective d’adoption de ces lois, les nations-unies, déjà à l’époque inquiètes, ont eu à faire des démarches auprès du pouvoir du Togo en vue de dépêcher sur les lieux, une délégation du groupe de travail sur la détention arbitraire, puis du rapporteur spécial sur la liberté de réunion et du rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau et à l’assainissement. Mais nos autorités ont tout simplement décliné ces demandes, du coup ceux-ci n’ont eu l’occasion de mettre pied sur le sol togolais depuis tout ce temps. En outre, le Togo n’a daigné répondre à la communication de quatre rapporteurs spéciaux relative à la loi révisée en 2019 sur les réunions et les manifestations. Dans cette communication, ces rapporteurs interpellaient opportunément l’Etat du Togo sur la violation de ses obligations internationales, par le vote d’une telle loi.

En l’absence de réponses en temps opportun à toutes ces démarches et interpellations, il est clair que tous ces acteurs attendront de pied ferme la délégation togolaise à Genève en vue de l’entendre se prononcer sur ces sujets ainsi esquivés depuis des années. Au vu de tout ceci, le gouvernement prendra-t-il, dès à présents, des dispositions pour desserrer l’étau en matière de liberté d’expression, de réunion et d’association ainsi que pour offrir d’autres ouvertures en vue de donner des arguments de défense à la délégation togolaise qui aura la lourde charge de se prononcer, au nom de notre pays, à cet examen ? La question reste entière et seuls les faits nous permettront d’apprécier la suite.

Luc ABAKI

Source : icilome.com