La mauvaise foi, cette disposition à nier l’évidence, à masquer les réalités, et à refuser de se confronter à la vérité, est une constante qui gangrène la gouvernance au Togo. Les exemples de cette attitude qui fausse le débat public et retarde les avancées sociales et économiques abondent.
Une analyse approfondie des faits et pratiques du pouvoir en place révèle un fossé inquiétant entre les discours officiels et les réalités vécues par la majorité des Togolais. Comment expliquer cette déconnexion entre la rhétorique étatique et le quotidien d’un peuple en souffrance ?
L’un des symptômes les plus marquants de cette mauvaise foi est sans doute la manipulation des classements internationaux pour masquer la dureté des conditions de vie des citoyens. Le Togo se trouve souvent en tête de certains indicateurs flatteurs de développement, selon des rapports commandés ou influencés par le gouvernement.
Pourtant, sur le terrain, la population continue de subir des conditions de vie précaires : la majorité peine à se nourrir convenablement, à accéder à des soins de santé de qualité ou à offrir une éducation décente à leurs enfants. Ces classements flatteurs ne sont que des rideaux de fumée qui occultent une réalité alarmante.
Plutôt que de s’en féliciter, la priorité des gouvernants devrait être de reconnaître les échecs et de travailler sur des solutions tangibles.
Au nord du Togo, particulièrement la région des Savanes, on assiste à une dégradation constante de la situation sécuritaire due aux activités des groupes armés. Malgré les alertes répétées sur la gravité de la situation, le gouvernement persiste à mettre en avant les « réussites » du Programme d’Urgence pour la Région des Savanes (PURS) comme solution miracle.
Pourtant, la réalité sur le terrain est tout autre : des populations déplacées, des villages en proie à la terreur, et une crise humanitaire qui se profile. Au lieu de faire preuve de transparence et de traiter cette crise avec le sérieux requis, l’accent est mis sur des mesures de communication, faisant croire que tout va bien.
Autre exemple patent de cette mauvaise foi : l’état des marchés. Le coût des denrées alimentaires augmente de façon exponentielle, et le pouvoir d’achat de l’écrasante majorité des Togolais est en chute libre. Là encore, les discours officiels ne cessent de louer la « stabilité » et les « efforts » du gouvernement pour contenir l’inflation.
Pendant ce temps, les ménages peinent à subvenir à leurs besoins de base. Cette réalité n’est pas le fruit d’une « manipulation extérieure » comme le gouvernement aime le suggérer, mais plutôt la conséquence d’une gestion économique mal calibrée qui ne profite qu’à une poignée d’élites.
Sur le plan politique, la mauvaise foi prend une dimension inquiétante. Alors que la grande majorité des Togolais se disent lassés du régime actuel, celui-ci s’arroge une majorité sans précédent au parlement, lors d’élections largement critiquées pour leur manque de transparence.
Comment comprendre ce paradoxe ? Le rejet du système est palpable dans les rues, et pourtant le pouvoir s’en félicite. Plutôt que de reconnaître ce rejet et d’engager un dialogue sincère, le gouvernement choisit l’autosatisfaction, se congratulant pour des victoires qui ne reflètent en rien la volonté populaire.
L’une des plus grandes ironies de cette mauvaise foi est de voir le parti au pouvoir, qui détient toutes les cartes pour impulser le développement, accuser l’opposition de son propre immobilisme.
En effet, les leaders du parti justifient régulièrement l’absence de réformes profondes ou d’avancées sociales par l’inaction d’une opposition qu’ils empêchent eux-mêmes de s’organiser et de mener des activités politiques.
La vérité, c’est que cette opposition est délibérément étouffée par des pratiques antidémocratiques qui visent à la marginaliser, tout en l’accusant de ne pas jouer son rôle. Cet art de blâmer les autres pour des échecs qui relèvent du pouvoir en place est un exemple frappant de la mauvaise foi qui nourrit la stagnation.
Les contradictions ne s’arrêtent pas là. Alors que les militants du parti au pouvoir clament publiquement que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, il est de notoriété publique que des dissensions profondes minent même les cercles dirigeants.
Les conflits internes, les rivalités et les haines intestines sont bien réelles, mais tout est fait pour dissimuler ces fractures sous une unité de façade. Là encore, l’art du déni s’exerce, et les Togolais sont les premières victimes de ces faux-semblants.
À travers ces divers exemples, il est clair que la mauvaise foi, qu’elle soit délibérée ou involontaire, est un obstacle majeur au progrès au Togo. Plutôt que de regarder la réalité en face et d’y apporter des réponses adaptées, le gouvernement se complaît dans une sorte de fiction qui lui permet de justifier son inaction et son inefficacité.
Or, la bonne foi, au contraire, suppose d’admettre les échecs et de prendre des décisions basées sur des faits. C’est en agissant de bonne foi, en reconnaissant les vérités douloureuses, que l’on pourra instaurer une véritable démocratie, où le bien-être du citoyen est au centre des préoccupations.
Source: lalternative.info
Source : 27Avril.com