Selon les objectifs de la mission de contrôle, les vérifications ont consisté à relever des dysfonctionnements qui impactent l’atteinte des objectifs de la SAFER (Société autonome de financement de l’entretien routier). Mais l’Inspection générale d’Etat (IGE) constate que les maux dont souffre cette société sont relatifs à l’insuffisance de mise en œuvre des recommandations des audits antérieurs, au caractère non inclusif de la stratégie globale d’implantation des péages, à la gouvernance, à la gestion administrative, financière et comptable, dans un langage poli.
Parce qu’en réalité, les constats relevés et les recommandations font état de dysfonctionnements qui devraient avoir été corrigés après les conclusions des audits antérieurs, mais qui ont été ignorés par les premiers responsables de la SAFER. Et quand le rapport enjoint par exemple le PCA à rembourser une somme indûment perçue dans le cadre d’une activité non incluse dans les prérogatives de la SAFER, c’est dire comment cette structure est gérée avec légèreté.
Le rapport n’a pas étalé toutes les irrégularités, mais à travers les recommandations, chacun peut se faire une idée du panier à crabes qu’est la SAFER qui, chaque année, crie au besoin en fonds pour l’entretien routier. Mais allez savoir comment ces fonds sont gérés.
Ci-dessous les irrégularités constatées et la liste des recommandations. Pendant ce temps, les postes de péages continuent de se métastaser sur les routes togolaises.
Irrégularités
Au niveau de la gouvernance, on note :
– la non application des décisions du conseil d’administration ; – la non clarification des textes sur les rôles des acteurs impliqués dans l’organisation et la gestion de l’entretien routier; – Le carburant indûment accordé aux membres du conseil d’administration ; – Le non-respect des règles d’exemplarité entrainant des conflits d’intérêt ; – Le service d’audit interne non conforme aux standards internationaux.
La gestion administrative révèle des faiblesses suivantes :
– L’absence d’expression formelle de besoins par les services utilisateurs avant les recrutements ; – Le dossier du personnel a relevé le cas des faux diplômes.
Les déficiences constatées dans la gestion financière et comptable sont :
– L’insuffisance des ressources de l’entretien routier ; – Le retard dans le transfert d’un compte UTB de l’ex-CAPER à la SAFER ; – L’investissement hasardeux ; – L’inefficacité du mécanisme de collecte des droits d’usage de la route ; – Irrégularités constatées dans l’exécution des dépenses de fonctionnement ; – La gestion irrationnelle de la ligne appui au MITP.
Recommandations
La stratégie globale d’implantation des péages
– Inclure la SAFER dès la phase d’étude préalable et à toutes les étapes afin que le choix des sites des postes de péage se fasse de manière concertée entre le MITP et la SAFER pour ainsi anticiper les difficultés rencontrées lors de la phase d’exploitation.
En matière de gouvernance
– Prendre des mesures nécessaires pour que toutes les décisions prises par le conseil d’administration depuis 2015 et reprises pour les années suivantes soient mises en application par lui-même et la direction générale de la SAFER ;
– Désigner des personnes ressources (DG ou comités ad hoc) qui seront chargées d’étudier les sujets pertinents et lui proposer en retour des actions ;
– Faire transposer la directive n°11/2009/CM/UEMOA afin que le MITP/DGTP assure les volets planification, programmation, ainsi que le contrôle de qualité des travaux d’entretien routier ; la SAFER joue son rôle de financement et l’exécution des travaux d’entretien routier soit confiée à une Agence d’Exécution des Travaux afin d’éviter les conflits de compétences et d’intérêts.
– Relire le décret n°2012-013/PR portant création de la SAFER du 26 mars 2012 pour clarifier les rôles et les responsabilités des différents acteurs impliqués dans l’organisation et la gestion de l’entretien routier tout en tenant compte des dispositions prévues par la directive en ses articles 2 et 12 ;
– Faire rembourser les dotations de carburant indûment reçues par les anciens et nouveaux membres du conseil d’administration ;
– Faire respecter monsieur José Kwassi SYMENOUH (PCA) des dispositions prévues par le décret portant création de la SAFER relatives à l’incompatibilité de certaines fonctions vis-à-vis de sa qualité d’administrateur, lui faire rembourser les fonds reçus soit cinq millions (5 000 000) francs CFA dans le cadre des activités de la Journée du Consommateur d’Assurance ;
– Se conformer aux normes internationales pour la pratique professionnelle de l’audit interne.
En gestion administrative
– Se conformer au statut du personnel de la SAFER lors des recrutements ;
– Mettre en place une gestion stratégique des emplois et des carrières incluant un recrutement sur la base des besoins réels et des compétences ;
– Instaurer la bonne tenue du dossier du personnel ;
– Faire authentifier et homologuer les diplômes avant tout recrutement.
En gestion financière
– Revoir le train de vie de la SAFER ;
– Procéder à une revue de son budget afin de supprimer certaines lignes de dépenses qui n’apportent aucune valeur ajoutée pour l’atteinte de ses objectifs ;
– Eviter le gaspillage à travers certaines dépenses somptueuses pour relations publiques.
En gestion comptable
– Eviter des investissements hasardeux, les ressources dont la SAFER dispose doivent plutôt servir à l’entretien routier ;
– Réclamer auprès de la SIAB des dommages et intérêts pour les préjudices moraux et financiers afin de pouvoir couvrir les frais de procédures et d’intervention d’avocat et huissiers;
– Elaborer chaque mois, un état de réconciliation des recettes collectées par les caissiers et celles reçues par les chefs de poste des percepteurs et procéder aux régularisations nécessaires ;
– Revoir les documents à utiliser par tous les acteurs impliqués dans l’enregistrement des recettes au niveau des postes de péage et pesage ;
– Veiller à la bonne tenue des documents ou registres pour une bonne traçabilité des recettes ;
– Organiser des formations périodiques à l’attention de toutes les catégories d’agents engagées dans la collecte des recettes (caissiers, chefs d’équipe, chefs poste et régisseurs) ;
– Exiger aux chefs de poste de procéder au recouvrement journalier des recettes auprès des chefs d’équipes après vérification rigoureuse des fiches de recettes de vacations ;
– Mettre fin aux dotations de carburant pour les relations publiques ;
– S’impliquer davantage dans la gestion rigoureuse des fonds alloués aux missions pour éviter le gaspillage ;
– Veiller au respect d’utilisation des documents exigés par le manuel de procédures dans le cadre des missions afin que les pièces justificatives des missions soient classées et archivées pour un meilleur suivi ;
– Mettre fin aux dépenses d’étrennes de fin d’année en dehors des dépenses d’étrennes publicitaires conformément à la note circulaire du ministre de l’économie et des finances du 17 novembre 2021 ;
– Réduire considérablement les achats de gadgets pour 1er mai et les dépenses engagées pour les diverses réceptions de ses partenaires ;
– Mettre fin à l’assurance Individuel Accident et retenir la police Décès/ Invalidité toutes causes qui dispose d’une couverture plus complète au profit du personnel ;
– Renoncer au renouvellement de la police Responsabilité Civile Chef d’Entreprise et maintenir la police Global Dommages ;
– Faire payer 15 % de la prime d’assurance de la retraite complémentaire par son personnel et prendre en charge 85% au prochain renouvellement de ce contrat ;
– Mettre fin aux dotations allouées à la mutuelle SAFER ENTRAIDE ;
– Faire rembourser annuellement par le Bureau Exécutif de la mutuelle une somme de vingt millions (20 000 000) francs CFA pour le paiement intégral des fonds de la SAFER;
– Accorder des prêts exceptionnels aux chefs de services une seule fois au cours de leur carrière et ces prêts seront soumis au taux d’intérêt de 4% ;
– Mettre fin aux dépenses d’assistance et de sponsoring afin de dégager des ressources suffisantes pour l’entretien routier ;
– Définir à la fin de chaque année avec le MITP et le MDPR les activités inhérentes à l’entretien routier qui doivent être financées par la SAFER au cours de l’année à venir. Ces activités doivent être budgétisées et validées par le conseil d’administration de la SAFER ;
– Faire en sorte que les activités financées sur la ligne « entretien routier » fassent l’objet d’une comptabilité régulière tenue par les services compétents des ministères en charge des infrastructures routières et des pistes rurales afin de faciliter la traçabilité et le contrôle, conformément aux procédures d’exécution des dépenses publiques et des règles de la comptabilité publique ;
– Enregistrer les opérations chronologiquement dans un journal et que les pièces justificatives soient classées et archivées ;
– Prévoir dans les budgets respectifs du ministère des infrastructures et des travaux publics et celui des pistes rurales les dépenses relatives aux événements tels que les cérémonies d’investiture, d’inauguration et de lancement ainsi que le paiement des salaires de leurs agents d’appui pour ne plus faire recours à la SAFER.
Godson K.
Source: Liberté / libertetogo.info
Source : 27Avril.com