« Un dictateur n’a pas de concurrent à sa taille tant que le peuple ne relève pas le défi » -François Mitterrand
Depuis les imprévisibles démonstrations de force des forces démocratiques, Awa Nana a disparu des écrans radars. L’annonce de la fin prématurée de sa tournée pour disait-elle, accélérer l’agenda des réformes se révèle plutôt « une retraite anticipée ».
A l’aune des derniers développements de l’actualité avec en point d’orgue l’adoption en conseil des ministres d’un avant-projet de réformes, plus personne ne se fait d’illusions quant au sort réservé à la Commission dite des Réformes. Au final, ceux qui hésitaient encore ont la preuve tangible de ce que la mise en place de cette commission participait à des manœuvres dilatoires dont sont coutumiers Faure Gnassingbé et consorts. Ils sont où les avocats défenseurs de cette commission au demeurant non confinée dans un délai d’action et dotée d’un mandat « intemporel » ? Incontestablement, le modus operandi du pouvoir était de se servir à nouveau d’Awa Nana, pour se tirer d’affaire en prétendant que les populations ont opté pour le scrutin uninominal à un tour. Mais même à ce jeu, le pouvoir a été pris à son propre piège, le plan « awa-nanique » s’étant révélé un véritable désastre.
Face à un dictateur, la politique n’a de sens que dans un jeu de rapport de forces permanent. C’est l’un des grands enseignements des derniers développements de l’actualité politique dans notre pays. Lorsque ce rapport est en faveur du tyranneau et de son attirail, la Commission des intellectuels reste l’unique maître de la situation. Et cette commission prend son temps, tout son temps. Rien ne presse. Des discours sur des réformes holistiques, des réformes qui embrassent tout et pas que celles constitutionnelles, institutionnelles et électorales peuvent avoir le vent en poupe. Mais lorsque ce rapport de force change au détriment du pouvoir, tout le dispositif « awa-nanique » s’écroule. Plus personne n’en fait mention. C’est à peine si l’on s’en souvient. En conseil des ministres extraordinaire, on adopte un avant-projet de loi de révision constitutionnelle. Dans la foulée, on écourte les vacances des députés. Incroyable célérité de la part du pouvoir sur un sujet qu’il trouve aussi rebutant. Ainsi donc pendant onze ans, il n’a jamais été mis autant sous pression. Que dire donc ? La pression est et reste la clé ; le sésame d’Ali Baba.
L’extrême méfiance des opposants vis-à-vis de ce que les thuriféraires du régime qualifient de geste de bonne volonté a ceci d’intéressant qu’elle leur dicte la bonne attitude de l’heure. L’ouverture et même la poursuite des débats parlementaires sur le sujet des réformes ne sauraient émousser la dynamique contestataire. Au contraire, plus longs seront les débats, plus fort sera le message de la rue. Tout part de la rue et tout revient à la rue. Face à toute manœuvre de blocage notamment sur la fameuse exigence de non-rétroactivité ou sur le refus d’application immédiate, recours devrait être fait à la rue. Que nul ne se méprenne sur la question. Rien n’est donné. Tout est acquis, mieux, conquis. Au prix de hautes luttes et d’innombrables sacrifices. Désormais, la lutte pour l’alternance démocratique dans notre pays ne devrait être appréhendée qu’au travers de deux prismes : la dynamique unitaire des forces démocratiques et l’adhésion totale des populations au combat. Au final, la rue reste bien l’ultime recours. Sauf cataclysme politique, souvenez-vous, aucun dictateur, mais alors absolument aucun n’est évincé du pouvoir par les urnes.
Meursault A.
Source : Liberté
27Avril.com