Un ami m’a rapporté un jour, avoir eu un échange avec un dirigeant qui expliquait toute sa difficulté à composer son gouvernement. Entre autres arguments, ce dernier soutenait qu’il lui fallait tenir compte de la géopolitique, des militants qui se sont battus pour son élection, des réseaux d’influence et d’autres critères qui m’ont paru particulièrement curieux.
Au bout du compte, c’est à croire que choisir les hauts commis de l’État, les acteurs de l’appareil directionnel du pays, c’est d’abord récompenser des gens qui ont rendu ou doivent rendre des services personnels à l’élu ou à sa famille politique ou biologique.
En clair, les postes de l’Etat sont bien considérés comme un gâteau dont on fait cadeau à des gens, non pas sur la base de leurs aptitudes à servir la cause commune, mais sur celle de leur appartenance à une ethnie, à un clan, à une région ou des services de toutes natures qu’ils ou elles sont susceptibles de rendre à titre personnel au dirigeant. Il n’y a rien de plus biaisé et de plus maladroit qu’une telle perception de la gouvernance d’État.
Car ce faisant, glisse de côté, la recherche objective des compétences et des convictions autour des valeurs, qui seules, sont en mesure d’impacter significativement la vie du peuple souverain et de le transformer dans les règles de l’art, comme se veut la vocation même du choix du dirigeant dans une société. Naturellement avec cette perception biaisée du service public, l’efficacité et la culture de résultats cèdent littéralement la place au griotisme, au culte de la personnalité et des égos qui ne forgent en réalité que des femmes et des hommes d’apparence puissants, mais dont le contenu est très relatif, donc incapable de génie, surtout en situation difficile et éprouvante pour le peuple.
Nos politiciens en Afrique sont-ils prêts à comprendre et à assumer ce principe que le service d’État est un sacerdoce qui sollicite du citoyen une disponibilité entière à mouiller totalement le maillot pour la cause d’autrui, pour la cause commune? Rien n’est moins sûr, surtout que pour l’instant, l’on accourt vers un poste de direction non pas pour la noblesse du service, mais pour son jus dont on doit jouir à satiété. Pourquoi donc s’étonner de la médiocrité dans les performances de nos gouvernants ?
Pourquoi s’offusquer de l’incapacité de certains responsables, directeurs généraux ou ministres, à démissionner après des bourdes, ou du dirigeant lui-même à démettre des collaborateurs pour absence de résultats, de maladresse, de mauvaise conduite ou autres ? L’on vous dira en effet que c’est délicat et à cause bien sûr de cette délicatesse, le décideur est prêt à se coltiner, des années durant, avec des hommes et femmes dont personne, au sein de la masse destinataire de toute gouvernance, ne voit les résultats !
Luc Abaki
Source : icilome.com