Malgré tous les efforts du parti UNIR (que certains continuent d’appeler un parti-État) pour se donner une virginité, les sorties de ses membres sur les médias révèlent que ce ne sont que des initiatives trompe-œil.
En même temps que le régime tend sa main droite pour le dialogue, il ne lâche pas dans sa main gauche la gâchette. Et le pouvoir s’en sert pour réprimer les militants de l’opposition au point qu’il dispose d’un abattoir, comme l’insinue Anaté Kouméalo, ex-ministre de la Communication, aujourd’hui directrice de l’Institut des sciences de l’information, de la communication et des arts (ISICA) à l’Université de Lomé.
Le psychanalyste autrichien Sigmund Freud nous enseigne que les lapsus sont souvent les révélations de nos vraies pensées. Pris sous cet angle, on peut aisément comprendre les motivations du régime en place en envoyant ses missi dominici sur les médias. Ces derniers non seulement remuent le couteau dans la plaie par leurs déclarations provocatrices, mais aussi confirment que le parti cinquantenaire ne sait que parler le langage des armes.
Invitée lundi dernier (au lendemain de la marche des femmes à Lomé) sur une radio de la place, Mme Germaine Anaté Kouméalo a versé dans une longue réprobation contre les 14 partis de la Coalition de l’opposition. Dans ses envolées, l’ancienne ministre a lâché une phrase qui, loin d’être un lapsus, révèle que pense son parti à l’égard des manifestants de l’opposition. Elle a accusé Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson, la Coordinatrice de la Coalition, de conduire les enfants à l’ «abattoir». Les mots ont leur sens et Anaté Kouméalo, linguiste de formation et qui a eu à occuper le portefeuille de Communication au gouvernement, sait pertinemment à quoi elle fait allusion. A moins que la présidente de l’Association des écrivains du Togo (AET) n’ait réellement pas la maîtrise du lexique, et on est tenté d’y croire. Car beaucoup de mystères entourent ses publications.
Abattoir, dans un sens premier, est un bâtiment dans lequel on abat les animaux. Au figuré, le mot se rapporte au massacre, l’élimination systématique et physique des populations. Dans les deux sens, l’idée de tuerie en masse est bien présente dans la pensée et dans la déclaration de l’écrivain Anaté Kouméalo Germaine. Et si on se réfère au massacre de Fréau jardin, les morts de la lagune de Bè sous Gnassingbé 1er, les massacres de 2005 avec l’avènement sanglant de Gnassingbé fils au pouvoir, les tueries d’enfants, les répressions depuis le 19 août 2017, il apparaît clairement que l’emploi du mot abattoir n’est pas du tout superflu. Il est loin de l’apaisement prôné par le régime et de la « PAIY », ce « mot de quatre mots ». Aussi le pouvoir en place et ses apparatchiks excellent-ils dans les actions et langages belliqueux.
A travers l’intervention d’Anaté Kouméalo, il transparaît comment le RPT/UNIR dont elle est membre, considère les militants de l’opposition. Et cela peut s’entendre par le lien qu’il faut établir entre les animaux et les enfants qu’on amène à l’abattoir dont l’ancienne ministre connaît sûrement l’existence. Sur son piédestal et adossé à l’armée, le régime cinquantenaire a pendant longtemps réprimé et continue d’étouffer toute velléité de contestation de son pouvoir dans le sang. Il tue ses propres citoyens comme des bêtes. En 2013, deux élèves, Anselme Sinandare (12 ans) et Douti Sinalengue (21 ans) qui ne réclamaient que le retour en classe de leurs enseignants qui revendiquent de meilleures conditions de travail et de vie, ont été tués à Dapaong (l’extrême nord du Togo). Récemment, l’élève Jojo Zamké a succombé à Lomé sous les balles des forces de l’ordre à la suite des manifestations des 14 partis politiques de l’opposition. Celle qui est devenue la directrice de l’ISICA par une alchimie, sait certainement où se trouve l’abattoir. En effet, elle connaît où réside le système répressif du régime cinquantenaire qui régit le Togo et devrait avoir une idée précise du plan macabre de son parti. Un pouvoir qui s’illustre par des assassinats politiques, des meurtres sur des populations aux mains nues.
Malgré les moyens matériels, financiers et humains dont dispose le parti-Etat UNIR, il traîne des lacunes. Et cela s’observe par ses piètres communicants. Parmi eux, il y a ceux qui confondent insulte et communication, ceux qui bégaient sur les plateaux des chaînes internationales, des va-t-en guerre, des belliqueux comme Anaté Kouméalo, une linguiste qui maîtrise mal le sens et la portée des mots. Et c’est malheureux pour ce pays puisqu’occuper la fonction de ministre exige beaucoup plus de tact que d’amateurisme.
Au Togo, la promotion de certains passe par des canaux aux couleurs bleu UNIR. Et la directrice de l’ISICA ne nous démentira pas. Elle fait également partie du « comité central » de la Présidence de l’Université de Lomé piloté par le Prof Dodji Kokoroko, le « grand réformateur » du campus universitaire aux méthodes expéditives.
Source : L’Alternative
27Avril.com