Devant la presse, le jeudi 26 août dernier, le Président de la Cour Suprême du Togo a dénoncé une justice jugée corrompue, avec des justiciers indélicats et à gourmandise insatiable. Cette déclaration de celui qui est, par ailleurs, président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) du Togo est au goût inachevée pour nombre d’observateurs qui n’en voient que de mots politiques.
«On n’est pas juge pour nous-mêmes, il faut voir la population, les justiciables. On n’est pas juge juste pour porter des robes, couvrir d’apparat, avoir de modestes privilèges, non ! Il y a une portée sociale », a fait comprendre, d’entrée le Président de la Cour suprême qui, dans l’ensemble, n’a pas manqué de mots pour dénoncer la corruption, la mauvaise organisation, la lenteur excessive, le délai inconsidéré, l’accroissement du contentieux, la complexification des procédures, la compromission des auxiliaires de justice à savoir les avocats, les huissiers, les notaires et autres.
Le diagnostic de Yaya
« Lorsqu’on prétend juger une affaire qui oppose deux parties mais qu’on le fait en catimini, il y a anguille sous roche. Il faut appeler un chat un chat. Ces dossiers vidés à l’insu des parties, c’est des dossiers dans lesquels il y a des constitutions régulières des avocats, qui ne sont mêmes mis au courant. Il arrive même qu’on tranche des affaires à des jours non ouvrés et ouvrables. C’est grave ! », a déclaré le Président Yaya. Pour y aller avec plus de précisions, le président de la Cour suprême a, dans son réquisitoire, cité la Cour d’appel de Lomé et le Tribunal de Première Instance de Lomé, comme exemples de juridictions où ces manquements sont observables. «Traditionnellement, tout le monde sait qu’on ne cajole pas un abcès pour en guérir, plutôt on l’incise. Les agissements de ces juridictions jettent du discrédit sur tout le corps », a-t-il insisté en s’attaquant à ces pratiques que fait fleurir ce qu’il appelle une minorité. « Cette minorité agit tout simplement par manque de vocation soit elle est entrée dans la corporation par infraction ou par procuration mais le résultat est là, source de discrédit sur le corps », a réaffirmé M. Yaya.
Pour conclure… «vous ne serez plus seuls (…). Nous sommes conscients que nous faisons partie du mal mais désormais nous allons nous reprendre », a laconiquement promis M. Yaya qui estime que ce qu’il dénonce ne vient pas de la bouche de quelqu’un qui est meilleur, de la tête de quelqu’un qui est parfait non plus. «Mais je crois que nous sommes les moins mauvais et nous avons des responsabilités à assumer. Personne n’est parfait mais il y a des situations où il faut refuser. Si vous ne pouvez pas exercer ce métier, si vous n’avez pas la dévotion, mais c’est pour mystifier vos semblables ou c’est pour piétiner l’esprit sacerdotal de ce métier pour le plonger dans une entreprise d’embourgeoisement indus, là nous composerons avec les autorités pour arrêter cette hémorragie d’enrichissement qui s’apparente à un racket, à un rançonnement de justiciable en cachant ses propres incapacités», a-t-il conclu.
Du formalisme
Si cette sortie aura permis de dévoiler, une énième fois, la vraie face de la justice togolaise, le diagnostic fait par le juge Yaya n’est, en effet, qu’un secret de polichinelle. En son temps, son prédécesseur, Akakpovi Gamato en avait fait le même diagnostic. Il n’y a rien de nouveau que le juge Yaya aura dit qui soit méconnu du togolais qui espérait que de mesures drastiques soient prises pour arrêter l’hémorragie. Mais se contenter juste du constat sans mesure dissuasive, comme si l’idéal recherché était de faire signe de vie, s’apparente plus à du formalisme. Du bruit pour ne rien dire à la fin si ce ne sont que des mots politiques. Autrement, le juge Yaya n’a juste fait que jouer au Ponce Pilate.
Source : Fraternité / fraternitenews.info
Source : 27Avril.com