Togo, Injustice : Il y a un an, la voiture du Col Tchalim Bawanam fauchait Fangnon Adolphe à Notsé.

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Il y a bientôt un an, la voiture du Colonel Tchalim Bawanam fauchait un tailleur juste devant l’entrée de l’hôpital de Notsé. Par deux fois, les os cassés ont refusé de se remettre en place, après trois mois d’hospitalisation. La victime n’a dû son salut qu’à un tradi-praticien auprès duquel elle a passé deux autres mois, sans compter les longues périodes de rééducation. A en croire les informations, le Colonel a « juste » dépensé 45.000 FCFA. Parce que la voiture n’était pas assurée. Et depuis un an, aucune suite n’est donnée à ce drame.

Togo, Injustice : Il y a un an, la voiture du Col Tchalim Bawanam fauchait Fangnon Adolphe à Notsé.

« Je ne suis pas sûr que si c’était un parent du Colonel à qui cet accident était arrivé, les choses se passeraient comme ce à quoi j’ai été soumis. Sa voiture n’avait pas d’assurance, mais rien n’a été fait pour lui faire assumer ses responsabilités ». Telles sont les premières phrases de Fangnon Adolphe, maître tailleur que nous avons rencontré à Notsé. C’était fin mars dernier.

23 avril 2016. Ce jour-là, le chef de l’Etat inaugurait l’usine d’assemblage de moto à Notsé. « Je revenais de la Barrière vers le quartier Adimè et me préparais à tourner dans la rue qui fait face à l’hôpital. Je n’ai pas su ce qui est arrivé, et quand je m’étais réveillé, j’avais le pied gauche dans le plâtre jusqu’à la hanche. Le verdict parlait de double fracture à la jambe », nous a raconté Fangnon Adolphe à Notsé. Les informations recueillies confirment que c’est depuis Atakpamé que le chargé d’établir le constat était venu et que la voiture avait été considérée comme appartenant à la présidence. Parce qu’aucune assurance n’avait été présentée pour prouver que le véhicule était couvert dans cette situation. N’était-ce pas la raison pour laquelle une partie des frais d’hôpital avaient été pris en charge ? Le Procès-verbal N°056 a été transmis au Commandant de brigade de Notsé le 20 mai 2016. Mais quelle suite peut-on en attendre puisque la voiture appartient à un haut gradé ? Jamais le juge à qui ce dossier aurait été transmis, n’a donné de signe de vie.

Selon la victime de l’accident, les fractures étaient telles qu’il a d’abord passé 45 jours dans le plâtre ; mais à l’heure du bilan, aucune évolution. Les infirmiers ont cassé le dispositif d’immobilisation pour lui en remettre. 45 autres jours plus tard, toujours pas d’amélioration. Il a fallu qu’Adolphe soit transporté à Agbavé auprès d’un tradi praticien où il a passé deux autres mois pour qu’enfin les os se remettent en place. A leur façon. S’en est suivi un long moment de réadaptation au cours duquel il se déplaçait à l’aide de béquilles.

Si la voiture de marque Toyota Avensis 9017-AI disposait d’une assurance, certainement que celle-ci aurait été brandie et une suite moins triste aurait été donnée à cet accident qui a failli ôter la vie à ce tailleur dont la femme était décédée, lui laissant leur quatre enfants à sa charge. Puisque ce n’était pas le cas, il nous a été rapporté qu’en tout et pour tout, le Colonel Tchalim Bawanam, Directeur de cabinet militaire à la Présidence de la République a dépensé 45.000 FCFA pour venir en aide à un accidenté qui a passé plus de cinq mois immobilisé.

Nous avons appris que les voitures de la présidence de la République ne disposent pas d’assurance, simplement parce qu’il existe un fonds dédié à couvrir les cas d’accidents qui surviendraient. C’était ce que nous avions pensé, raison pour laquelle nous avions contacté le Colonel Tchalim pour des échanges.

Après nous avoir demandé de déposer nos téléphones hors du bureau, il avait paru étonné qu’on veuille l’interroger sur un accident qui date de presqu’un an. Pour le Colonel, il avait fait ce qu’il fallait et trouve que si le jeune tailleur avait des difficultés d’ordre financier, il pouvait l’aider, mais que ce n’était pas la meilleure manière de s’y prendre. Selon sa version, il aurait même donné de l’argent à la famille de Fangnon, chose que l’intéressé a niée catégoriquement. « Je suis à Notsé avec ma petite famille et mes parents sont de l’autre côté de la frontière au Benin ; comment a-t-il pu remettre de l’argent à mes parents ? A moins qu’il ne se soit rendu au Benin, ou qu’il les connaisse auparavant », nous a répondu l’accidenté qui, soit dit en passant, porte et trainera des séquelles indélébiles pour le restant de sa vie.

De la jambe cassée à deux niveaux, il reste que les os se sont mal remis en place, ce qui laisse voir une distorsion patente de la jambe. A supposer que la voiture du Colonel ait été assurée, tous les frais engagés par la victime de l’accident auraient pu être pris en compte par l’assureur et un dédommagement pour tout le temps passé en hospitalisation et dans l’immobilisme aurait pu être comptabilisé. Mais dans la négative, Fangnon Adolphe fut abandonné, sans possibilité de bénéficier d’une quelconque réparation. « Je ne suis pas certain que si c’était un taxi ou quelqu’un d’autre qui avait causé cet accident à un membre de sa famille, le Colonel serait resté sans réaction, surtout que la voiture n’a présenté aucun papier d’assurance », a fait remarquer le frère de l’accidenté. « Même si c’était sa voiture de fonction, la présidence se serait occupée de l’état de mon frère », a-t-il poursuivi.

L’assurance des véhicules est une exigence, mais si des officiers supérieurs, qui plus est, Directeur du cabinet militaire de la présidence, peuvent se permettre de ne pas assurer leurs voitures personnelles, on se demande où va le Togo. Et le pauvre Fangnon Adolphe qui n’a personne pour plaider sa cause, n’a que ses yeux pour pleurer. L’uniforme est-il au-dessus de l’obligation d’assurer les voitures qui est faite à tout propriétaire de véhicule ? Dimanche prochain, le jeune tailleur se souviendra qu’il y a un an, il a failli perdre la vie par accident, et en guise de « compensation », 45.000 FCFA du Colonel Tchalim Bawanam, Directeur du cabinet militaire à la présidence ont suffi pour le « rétablir dans sa dignité ».

Source : Abbé Faria, Liberté N°2422 du Jeudi 20 Avril 2017

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