Le pouvoir togolais a plus qu’il n’en faut montrer ses limites quant à la gestion calamiteuse des affaires qui impliquent de près ou de loin les citoyens. Tout avait commencé le 7 janvier 2013 lorsque le Grand Marché de Kara embrasait. Le 12 courant, le Grand Marché de Lomé a à son tour flambé. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Beaucoup de larmes aussi. Depuis, les autorités se sont tues, muettes comme des carpes. On sent comme une volonté délibérée de leur part de ne conduire à bout ce que d’aucuns considèrent comme une machination secrète.
Qui eût en effet, cru que cinq ans après les désastres dont ont été victimes les Togolais dans l’affaire des deux incendies, qu’on n’en soit pas à même de faire l’état des lieux ? Qu’après cinq bien sombres années nombre de victimes en soient encore à subir les séquelles du drame, d’autres croupir dans les geôles ; d’autres encore payer l’ultime tribut qu’est la mort ? Qu’après cinq années, l’Etat togolais se serait à l’arrivée montré voyou face audit dossier, indifférent, mutique et par-dessus le marché, irresponsable? Circulez, y a rien à voir.
Si le quotidien des commerçants s’en est ressenti et continue de l’être jusqu’à ce jour, parce que touchés de plein fouet, le pouvoir de Faure Gnassingbé, lui, n’a cure de tout ça. Il a mieux à faire que de composer avec le triste destin de pauvres commerçants laissés sur la paille. Il a mieux à faire, que de prendre pour de bon en main un dossier et de le conduire enfin à terme pour faire trouver le bout du tunnel à nombre de ces malheureux. Non, Faure et sa clique ont d’autres chats à fouetter, et ce ne sont pas les vocables « incendies », « Kara », « Lomé » qui leur feront s’apitoyer, fût-ce un instant, sur le sort de ces laissés pour compte. Le stupre est poussé jusqu’à la déraison, et ça, n’en doutez point, vous êtes bien au pays des Gnassingbé. Rien n’a été fait, voilà. S’il faut sous d’autres cieux instruire un procès dans les formes et ne pas broder face à un aussi urgent dossier que celui des incendies des marchés de Kara et de Lomé, comme on en voit partout ailleurs, le système Rpt/Unir trouve quant à lui qu’il faut cinq ans et plus. Pendant ce temps, ce sont des innocents qui trinquent. Remettons-en une couche, l’Etat togolais est un Etat voyou, sinon il y a beau temps qu’on aurait conclu le sort des pauvres victimes. Les autorités, hélas, valent mieux que leur jeu jusqu’ici joué.
Satisfaire aux revendications du peuple, et le tour est joué Le pouvoir de Faure Gnassingbé est en proie à la fébrilité. Comme de ces dynasties éternelles qui ne veulent pas passer la main avant que de subir la furie de tout un peuple, le système Rpt/Unir a suffisamment montré les symptômes d’un pouvoir vacillant pour que l’on s’attende à autre scénario que celui dont il fait montre. Depuis les manifestations républicaines pacifiques qui n’ont de cesse de le secouer depuis le 19 août, pour « parer au plus pressé », le pouvoir semble avoir trouvé le filon.
Boucher au possible les artères de la capitale paraît de beaucoup l’option la meilleure. Pas moyen de circuler librement, tant que dureront les manifestations des journées. Ainsi tout le quartier de Bè à chaque manifestation pacifique se trouve-t-il quadrillé. Par des dispositifs ô combien alarmants, la présence des soldats est plutôt ressentie comme une Chappe de plomb sur les lieux mêmes où se déroulent les manifestations. D’Avépozo à Agoè, d’Adidogomé la Pampa à la Lagune de Bè, impossible de rallier les autres artères de la ville, si ce n’est qu’après l’accalmie.
On a pu voir des motocyclistes rebrousser chemin, passer par des contournements difficiles pour de nouveau être confrontés au même exercice ailleurs. La règle a encore été respectée quant aux marches organisées la semaine passée, si bien que ce n’est qu’après 18 heures que certaines artères ont recouvert leur circulation normale. Une situation qui est d’autant plus embarrassante, qu’il ne se passe presque rien avant que le pouvoir crie au loup, en barrant les routes. En quoi cela avance nos autorités ? Pourquoi chercher des ennuis là où il n’y en a pas ? On comprend facilement l’affolement d’un pouvoir en perte de vitesse, qui pédale dans la choucroute, qui croit aller au-devant des choses et qui n’arrive à la fin à rien de bien bon.
Toutes ces tracasseries peuvent très vite connaître un point d’orgue, si et seulement si… Si et seulement si Faure et sa clique auront daigné écouter le peuple. Si, pour éviter ces dérangements le régime aura satisfait aux préoccupations primordiales des populations qui n’’aspirent qu’à l’alternance à travers les réformes. Ce n’est pas aussi sorcier que cela !
Source : Le Correcteur No.800 du 15 janvier 2018
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