Personne ne l’a vu venir. Le pouvoir en place ne vendait pas cher son jeune parti, puisqu’on pensait que c’est une formation politique de plus qui ne réussira qu’à se perdre dans le lot de partis qui ne faisaient plus peur au le régime. Au niveau de l’opposition, l’échec du Front Tchoboé dont il est l’un des initiateurs, rassurait les uns et les autres que le parti au cheval blanc n’est pas un sérieux concurrent qui mérite les attentions. Mais Tikpi Atchadam, puisque c’est de lui qu’il s’agit, réussira à déjouer tous les pronostics, avec le Parti national panafricain (PNP) dont il est le président. La débandade créée par ce nouveau venu, secoue non seulement le régime cinquantenaire, mais aussi des partis politiques de l’opposition.
C’est avec un travail de fourmis (mobilisation porte à porte, des réunions hebdomadaires, des rencontres et discussions citoyennes, etc.) que Tikpi Atchadam a fini par déclencher la révolution le 19 août 2017 dans plusieurs villes du Togo, en Europe, aux Etats-Unis, dans plusieurs pays en Afrique et même en Asie. Comme un seul homme, les Togolais, à travers tout le monde entier, se sont soulevés contre le régime de Faure Gnassingbé à qui ils demandent de partir, à défaut du retour à la Constitution de 1992 et le droit de vote aux compatriotes de la diaspora. C’est le début d’une aventure qui aura fait des morts, des blessés à vie, des réfugiés, mais aussi permettra de redistribuer les cartes sur le paysage politique togolais.
Avant le 19 août 2017, le régime de Faure Gnassingbé profitait du calme précaire qui prévalait pour narguer l’opposition traditionnelle. Il faisait fi des manifestations publiques à travers lesquelles cette opposition revendiquait les réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales. Ce semblant de sérénité faisait son chemin lorsque, comme un orage, la révolution est arrivée.
Que ce soit à Lomé, Kpalimé, Atakpamé, Sokodé, Kara, Bafilo, Mango, Dapaong, ou encore en Allemagne, en Belgique, aux USA et dans des pays en Afrique où résident des Togolais, ces derniers ont manifesté leur colère contre le régime. Les manifestations publiques pacifiques se suivaient. Et comme réponse, Faure Gnassingbé et son clan les accueillaient dans un bain de sang, grâce aux forces de l’ordre et défense qui tiraient sur les manifestants aux mains nues. Inutile de revenir en détails sur ces événements dont les Togolais vivent encore les conséquences.
En effet, Tikpi Atchadam a eu le mérite d’avoir redistribué les cartes politiques au Togo depuis le 19 août 2017. La première conséquence reste l’unicité d’actions décidée par des partis de l’opposition qui se sont réunis dans la Coalition des 14. « Le peuple togolais demande la fin du système des Gnassingbé, il demande l’alternance au sommet de l’Etat. Et c’est conformément à cette demande que la revendication de la C92 a été formulée, correspondant aux aspirations profondes du peuple togolais. C’est sur cette base que les mouvements ont été lancés. Ces mouvements ont continué avec la Coalition, c’est –à-dire le groupe des 14 », avait laissé entendre Tikpi Atchadam.
Ensemble, ils arrivent à s’imposer au régime en place qui, même s’il affiche un semblant de sérénité, est sérieusement ébranlé. Ce dernier aurait organisé la mascarade électorale depuis s’il n’y avait pas eu cette révolution qui, malheureusement, n’est pas allée jusqu’au bout. Puisque le pouvoir, paniqué, a fait appel au dialogue que la CEDEAO tente d’arbitrer comme elle peut aujourd’hui. Malgré la présence des Facilitateurs désignés par l’institution communautaire dans ce processus de dialogue, le régime continue d’user de subterfuges pour se dédouaner. Grâce à ce 19 août 2017, la CEDEAO a formulé aujourd’hui des recommandations pour une sortie pacifique de la crise au Togo.
Mais là aussi, le pouvoir, après avoir charcuté le document, en fait une interprétation partisane, avec une Commission électorale nationale indépendante (CENI) instrumentalisée qui poursuit le processus électoral de façon unilatérale, en contradiction avec la feuille de route qui a ordonné sa recomposition.
Un an après le déclenchement de cette révolution, le principal artisan se retrouve hors des frontières togolaises, craignant pour sa sécurité. Toutefois, son parti, le PNP, continue de se battre aux côtés de ses camarades de la Coalition des 14 pour traduire dans la réalité les aspirations profondes du peuple togolais, notamment l’alternance et le départ de Faure Gassingbé.
Dans tous les cas, comme l’ont déjà fait remarquer de nombreux observateurs, rien ne sera plus comme avant dans le paysage politique togolais. L’implication des chefs d’Etat de la CEDEAO, surtout avec le Comité de suivi des recommandations qui s’apprête à tenir sa première séance de travail avec les protagonistes en leur expliquant point par point les termes de la feuille de route, promet des rebondissements intéressants dans les jours à venir. Aujourd’hui, personne ne peut plus prétendre être le seul maître à bord du navire Togo, dans la situation actuelle.
« Le peuple veut l’alternance. Et un peuple debout arrive toujours à bout de n’importe quel dictateur », avait indiqué TikpiAtchadam. Pourvu qu’un jour, les Togolais puissent dire que la libération de leur pays a commencé un 19 août 2017. C’est en cela que les sacrifices de ces compatriotes tombés sous les balles assassines de la soldatesque ne seront pas vains
Source : L’Alternative
27Avril.com