Togo : Halte aux ratonnades antiadja dans les préfectures de Bassar et Dankpen

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apedo-amah togoata

Depuis décembre 2019, les agressions, le sac des magasins et des domiciles des ressortissants de la communauté Adja sans défense dans les préfectures de Bassar et de Dankpen, constituent des crimes horribles et lâches contre des innocents. De véritables taches d’ignobilité sur le visage de la République.

Le prétexte : le vol impardonnable d’un bébé dont on ignore l’auteur. Un ressortissant Adja est soupçonné d’être l’auteur du crime parce que des préjugés saugrenus courent au sujet des grigris des Adja, lesquels feraient soi-disant des sacrifices humains. Qu’on me désigne une seule communauté sans grigris au Togo !

Admettons que le criminel soit un Adja, ce criminel a-t-il été sollicité par sa communauté pour commettre l’odieux crime en son nom ?

Soyons sérieux. Il ne faut pas, comme c’est déjà le cas, qu’une culpabilité individuelle devienne une culpabilité collective. Chacun est responsable, à titre individuel, de ses fautes vis-à-vis de la loi. C’est cette chasse à l’homme visant des Adja qui est intolérable, inacceptable, criminelle. Nous n’accusons pas les communautés Bassar et Dankpen qui sont des peuples très civilisés, comme les Adja, d’ailleurs.

Ce qui nous choque dans ces ratonnades organisées par une poignée d’individus, c’est le fait que les forces de l’ordre semblent, d’après les victimes Adja, jouer le rôle de pompiers après l’incendie. Mais diantre ! que font les élites Bassar et Dankpen pour sauver la vie des victimes ? Leur silence fait froid dans le dos. Approuvent-ils les crimes ? Nous n’osons le croire et nous n’y croyons pas. Alors, est-ce par lâcheté vis-à-vis de leurs propres communautés ? C’est ce que nous croyons parce que les yeux des extrémistes sont rouges de haine, d’aveuglement et de fanatisme. Il est des circonstances où le langage de la raison est difficile voire dangereux. Car l’accusation de trahison vous indexe d’office comme un ennemi à abattre.

Mais ces élites doivent faire preuve de courage. Tous les Togolais les soutiendront dans cette démarche citoyenne, courageuse et noble.

Mais où se sont terrés les chefs traditionnels de ces deux préfectures, si prompts à faire des marches de soutien au profit de la dictature et de la manipulation politique ? Mais où sont-ils donc, que diable ? Nous apprenons que l’autorité publique est en train de traquer les criminels, fort bien, mais quelle assurance ont nos pauvres compatriotes terrorisés que ces crimes vont cesser contre leur communauté, en juillet 2020 ? Pourquoi ne rassemblent-on pas les représentants des protagonistes pour tenir des discours de paix, comme cela se fait lors des affrontements communautaires en pareille circonstance, avec une large médiatisation ?

L’État a le devoir de protéger tous les citoyens sur tout le territoire national. Nul Togolais ne saurait être étranger au Togo même au sein d’une autre communauté. Que le gouvernement assume avec responsabilité son rôle régalien pour éviter plus tard des représailles en pays adja ! Lorsque les citoyens ne croient plus à la protection de l’Etat et de la justice, ils tendent à se substituer à ces deux entités pour se faire justice. C’est alors le début de l’anarchie.

La politique du bouc émissaire a toujours été une politique criminelle qui offre à un peuple des distractions sanglantes pour le détourner des vrais responsables de ses problèmes. Or quels sont les problèmes dans ces deux préfectures ? Ce sont les mêmes partout ailleurs au Togo : un chômage sans nom, une misère crasse, une démocratisation bloquée, une culture de l’impunité et une valorisation des contre-valeurs. Ce n’est pas par hasard que l’essentiel des agressions contre les commerçants Adja se solde par le pillage de leurs magasins.

Nous demandons que cesse la chasse à l’homme. Les Adja ne sont pas du gibier. Les élites des communautés bassar et dankpen, osez parler, je vous en prie, ne vous cachez pas derrière votre ombre ! La patrie vous en sera reconnaissante. Il y a une communauté en grave danger de mort. Il est des circonstances où le silence exhale la puanteur de la complicité, la puanteur de cadavres.

Il fallait le dire !

Ayayi Togoata Apedo-Amah

Source : 27Avril.com