« Le combat politique ne doit plus s’exprimer dans la rue » Gilchrist Olympio
« C’est proprement ne valoir rien que de n’être utile à personne ». Cette vérité nue transcrite dans Le Discours de la méthode met en évidence ce que coûte à une société, à une communauté nationale la faiblesse d’esprit de ceux qui prétendent être à l’avant-garde de l’évolution politique dans leur pays sans en avoir la saine appréciation des réalités pour trouver des répondants aux problèmes qui se posent en leur cité. La perspicacité active du jugement de chaque citoyen et la puissance de son action pour porter les aspirations communautaires aident les princes dans leur incomplétude autant que dans leurs dérives à se rectifier.
Si nous nous dérobons à nos responsabilités pour nous déguiser à nous-mêmes, nous n’avons que la trahison à servir à nos peuples. Le bon sens, la morale et l’éthique sont les fondements de la personnalité qui construisent indubitablement l’âme politique capable de diffuser des valeurs dans une pédagogie par l’exemple qui remorque les populations dans le combat. Les principes faux d’évolution de ceux qui font office de leaders les relèguent dans la liturgie du scandale et du grotesque qui leur font perdre la crédibilité, l’honorabilité et la confiance des populations.
Le pavé est nécessairement le dernier recours des populations pour réclamer leurs droits. La rue est une arme politique de convenance démocratique. Occulter cette fonctionnalité démocratique du combat politique est une légèreté plantureuse qu’étale superbement le sens atrophié de responsabilité au carrefour des avaries de leadership. Depuis 1789, les Français sont dans la rue pour le combat politique. Ils l’ont été davantage en mai 1968 et le sont jusqu’à ce jour. De même, les Etats Unis, une grande démocratie qui a pris son envol dans la rue pour aboutir le 4 juillet 1776 à la Déclaration d’indépendance, continuent d’envahir la rue au nom des aspirations qu’expriment les populations.
Ceux qui servent à la fois les rois et les peuples ont un jugement aiguisé, une démarche mesurée pour situer le sommet et la base face à leurs responsabilités respectives.
Au nom de quel principe peut-on demander à un peuple de renoncer à lui-même, à ses aspirations, à ses droits, à ses engagements républicains pour s’aliéner à une dynastie avec des illusions et des utopies de doux rêveur, que le prince se déciderait d’opérer des mutations démocratiques de lui-même ou par enchantement d’une collaboration frappée d’un ostracisme populaire?
Si les négociations ont permis d’aboutir à des accords est-il possible d’imaginer encore des négociations pour mettre à exécution ce qui relève d’un consensus national certifié par des assises républicaines ?
Est-ce pour des récompenses étriquées que l’esprit peut baver jusqu’à la bâtardise argumentaire, dans une foire aux non-sens et aux dénis des moyens constitutionnels du combat politique au Togo ?
1- Gilchrist Olympio au foyer du surréalisme ou la désintégration du sens logico-éthique.
Georges Dougueli de Jeune Afrique a tôt fait de présenter le fils du père de l’indépendance du Togo comme homme d’affaires sorti de la London School of Economics et à Oxford. Mais, il est des références sans effet, désadaptées aux circonstances particulières et en contraste avec les minables prouesses de ceux qui vont à reculons dans le choix d’intelligence et de responsabilité pour se complaire dans les perversités conceptuelles et dans les morbidités des résultats de leurs actions. Ce ne sont pas les universités et les écoles de renom qui font les grands hommes, mais ce sont les mérites et la puissance des hommes à donner des secousses particulièrement révolutionnaires à leur époque, à leur siècle qui font les facultés dont ils sont sortis. Koffi BUSIA fut enseignant à Oxford, il est rentré au pays pour prendre la gouvernance du Ghana en main en provoquant une crise sèche de vingt-cinq ans qui a jeté le Ghana dans les ténèbres économiques, sociaux, culturels, courageusement relevé par le pragmatisme d’un capitaine d’aviation Jerry RAWLINGS.
En politique, on ne fait jamais de miracle avec des principes de rêve. Gilchrist Olympio récuse le droit au pavé, une prérogative citoyenne et constitutionnelle de combat politique. Aucun politique n’est assez fort pour se substituer entièrement à l’expression populaire et prévoir ce qui vaut le mieux pour tous et prescrire à tous ce qu’il faut pour asseoir une cité démocratique. Les peuples sont suffisamment dans une autonomie de conscience. Quand ils ne trouvent pas leur compte dans l’action politique ou dans les égarements de ceux qui se font passer pour des leaders, il n’y a aucun moyen de leur interdire de manifester. Un homme ne fait pas un peuple.
Par des rêveries solitaires, M. Olympio s’échine à supprimer la puissance réactive des populations mises en sevrage par un pouvoir méprisant, violent qui a pris résidence dans la Violation des DROITS HUMAINS. Le « génie de l’audace » à inventer des bouchons pour taire tout un peuple est au-delà des capacités humaines. Dans sa balançoire égocentrico- narcissique, il frappe de mutisme tout un peuple par ses ordonnances de négociations sans la moindre lecture psycho sociologique d’une population qui trace ses sillons, sa voie. A force d’être toujours absent au Togo pour y revenir épisodiquement en quarante ans, M. Olympio, connaît à peine la personnalité togolaise et les mutations subtiles qui ont cours avec l’évolution historico-politique de notre peuple.
Il s’est toujours mal pris dans la lecture du combat démocratique au Togo, parce que l’ivresse de sa personnalité narcissique l’a emmuré dramatiquement dans un dessèchement pragmatique qui ne lui donne aucune chance de preuve perspicacité et de jugement fécond. Il a longtemps cru qu’il suffit d’être le fils de Sylvanus OLYMPIO pour se frayer un boulevard politique au Togo au mépris du cours de l’histoire et de l’espérance collective. La maturité intrinsèque de la grande majorité des Togolais ne se détourne jamais des hommes de valeur qui portent en valeur l’espérance collective. Un sous-accord RPT/UNIR-UFC qui tient à distance l’Accord Politique Global, un consensus national est d’un effet de torpille de la Volonté générale et sonne le glas d’un ostracisme dont M. OLYMPIO ne s’est jamais remis. De la cime populaire à l’abîme fracassant, ne disposant plus d’aucune marge de mobilisation, il se résout à traîner la lutte démocratique dans le gouffre du désespoir. Ce cynisme politique de contentement de peu et de caution à l’exécrable immobilisme est une singularité de noyade qui a révolté Djovi GALLY de l’Union des Forces de Changement à crier haut et fort sur les radios locales « Je ne suis pas un comédien » avant d’affirmer sa défection du parti.
Edgar PISANI, ancien président de la Commission CEE, l’actuelle Union Européenne, affirmait sur TF1 en Aout 1991 « En politique, il faut avoir le courage de reconnaître ses erreurs et de dire qu’on s’est trompé ». Quand on ne possède pas le tranchant de l’âme politique pour des rectifications judicieuses dans le but de créer des mutations aux résultats palpables, efficaces, on fait proprement un abri de vacuité à ses rêves.
Il n’y a pas de combat démocratique qui puisse se passer de la rue. Même Mahatma GANDHI, le plus grand pacifiste n’a osé supprimer la rue des réclamations citoyennes. De même, Martin Luther King, érigé en monument pour le combat démocratique au panthéon des célébrités à Washington ne s’était jamais passé de la rue. Le recours au pavé est un acte démocratique majeur qu’une rare faiblesse de l’esprit peut exclure. Dans sa Lettre, à Alexandre 1er, le 02 Février 1802, NAPOLEON 1er écrivait à juste titre « Les hommes qui ont changé l’univers n’y sont jamais parvenus en gagnant des chefs, mais toujours en remuant des masses ».
2- Des contradictions insurmontables d’un homme de 80 ans
Dans son interview publiée par Jeune Afrique le 02 mai 2017, ni la raison ne conduit le file de ses idées, ni l’esprit ne garde la maîtrise et la cohérence argumentaire, ni l’éthique politique ne suit le but de cette sortie calamiteuse, ni un soupçon de sagesse ne marque d’un sceau de dignité le choix de pacotille argumentaire, au point qu’on a peine à croire de son naufrage assidûment éclatant, que cet homme garde son âme entier de ses déboires politiques, de sa popularité dramatiquement dépouillée pour ses feuilletons de reculade maladivement à l’écran d’un héroïsme rebours.
A la question « Il y a sept ans, votre parti a rejoint le gouvernement. Était-ce finalement une bonne idée ? », M. OLYMPIO estime : «Même si on est loin du compte, notre pays est en voie de démocratisation…Nos cadres y apprennent à gouverner… Ils voyagent, parlent aux autres dirigeants et se constituent un carnet d’adresses ».
Les hommes communément plus sages et plus habiles ne se contentent jamais de vétilles, parce que le sens de responsabilité qui les habite met en aiguillon leur honorabilité pour être exigeants envers eux-mêmes et envers les autres. Quand vous êtes loin, très loin du compte dans un accord, dans une démarche, la complaisance coupable vous sort de votre engagement pour laisser la maîtrise du terrain à un partenaire solitaire qui vous tient par la gorge. A quoi bon de se constituer un carnet d’adresses si vous n’avez aucun pouvoir de décision et en situation de strapontin d’un garçon de courses pour ceux qui vous tiennent à la périphérie de leur royaume ? Les hommes sérieux ne renoncent jamais aux promesses faites à leur peuple. Quand M. OLYMPIO déclare : « Il n’est pas judicieux de se cantonner à ces réformes », de quoi veut-il négocier après avoir promis il y a sept ans, qu’en six mois, les réformes seront exécutées ?
En outre, le vieux leader, pendu publiquement sans corde par un accord comique dans les ravins de l’histoire politique n’a de meilleurs réflexes que d’encenser son bourreau et de le différencier de son père : « …les deux n’ont rien à voir. Ils ne partagent pas les mêmes idées ».
En réalité, c’est Gilchrist qui est à l’opposé de la personnalité de son père, sans charisme, ni hauteur politique pour créer l’espérance. Tout leader qui se déguise d’un pas à l’autre assure la trahison à son peuple. Faure, lui, respecte scrupuleusement « la volonté testamentaire » de son père et se proclame garant de son exécution. Il s’est déjà extasié dans ce rôle au Palais des Congrès en affirmant haut et fort que leur père leur a appris avant sa mort que si le pouvoir leur échappait, ils allaient lui courir après sans jamais le rattraper.
Tout politique a besoin d’une bonne dose de psychologie et de psychologie sociale pour voir de sa terrasse ses interlocuteurs, les comprendre et lire l’opinion promptement. Faure est comme son père dans le cramponnement au pouvoir. Comme son père, il est un spécialiste des accords sans issue, des simulacres de dialogues, de la farce des commissions, de l’usurpation du pouvoir, des élections frauduleuses, de l’onction à la violence et à la répression fauve dans le but de conserver le pouvoir. Les crimes de masse d’avril 2005 le témoignent en comparaison avec le drame de la Lagune de Bè, sous la gouvernance de son père.
Il y a sûrement un enfantillage politique en cet homme qui se croit à un cran de célébrité à accompagner Faure à la prestation de serment de Nana Akufo-Addo, le nouveau président du Ghana. Ce n’est certainement pas au troisième âge qu’on apprend aux gens doués que le chat ne nous caresse jamais, mais il se caresse à nous.
Quand on n’est pas capable d’une analyse globalisante et totalisante des faits de gouvernance, on affiche son leadership de pacotille pour être en politique toujours en situation d’hors-jeu. Gilchrist OLYMPIO s’accroche au subsidiaire et accouche des concepts exceptionnellement puants. Cruel destin d’une misère politique à plaindre à quatre-vingt ans !
Didier Amah Dossavi
Source : L’Alternative No.621 du 20 juin 2017
27Avril.com