Gilbert Bawara, ministre de la Fonction publique, du Travail et de la Réforme administrative au Togo, revient pour Jeune Afrique sur le dialogue prévu par les pays médiateurs entre le président Faure Gnassingbé et l’opposition, prévu le 15 février prochain, pour mettre un terme à la crise que traverse le pays depuis août 2017.
Au lendemain de la publication du communiqué des médiateurs dans la crise que traverse le Togo depuis août 2017, Gilbert Bawara, ministre de la Fonction publique, du Travail et de la Réforme administrative, qui représente le gouvernement dans les discussions relatives au dialogue politique, a reçu Jeune Afrique. Une occasion de s’expliquer sur la date retenue pour le démarrage du dialogue (le 15 février), les modalités envisagées et le référendum prévu pour l’adoption des réformes.
Jeune Afrique : Dans quelles circonstances la médiation guinéenne et ghanéenne, dont les émissaires sont venus fin janvier à Lomé, a-t-elle débouché sur le communiqué de vendredi ?
Gilbert Bawara : Tout le monde a constaté qu’il y avait quelques tergiversations et un certain enlisement en vue d’un accord entre le pouvoir et l’opposition. Des visites ont été effectuées à Conakry et à Accra par des acteurs de l’opposition. La manière dont certaines initiatives sont restituées à l’opinion par les leaders de la coalition de l’opposition donne le sentiment que nous sommes loin du démarrage du dialogue.
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À un moment donné, il fallait une clarification, et c’est ce qui vient de se faire avec la mission des ministres ghanéen et guinéen, dont les dirigeants s’investissent pour aider les acteurs politiques togolais dans la voie du dialogue. Le gouvernement leur sait gré pour leurs initiatives et leurs efforts de bons offices.
Pourquoi l’ouverture du dialogue était-elle bloquée jusqu’ici ?
Il faudrait poser la question à ceux qui invoquent constamment des préalables, en posant des exigences avant d’aller au dialogue. L’initiative est venue du gouvernement le 5 septembre, lorsque le projet des réformes constitutionnelles a été adopté en conseil des ministres.
La finalité de ce dialogue, c’est de contribuer à la décrispation du climat politique, d’offrir l’occasion aux acteurs politiques d’apporter leur contribution et d’assurer ainsi leur adhésion aux réformes envisagées. En définitive, la réalisation des réformes devra respecter les règles et les procédures prévues par la Constitution.
Faites-vous référence au projet de référendum qui continue d’être évoqué par le gouvernement ?
En 2014, le gouvernement avait déjà pris une initiative afin d’adopter de telles réformes, mais cela n’avait pas abouti. À l’époque, certains avaient pu avoir le sentiment que le gouvernement n’avait pas fait tout son possible pour faire passer le texte, occultant ainsi le radicalisme et l’intransigeance d’une frange de l’opposition parlementaire d’alors. Il faut en tirer toutes les conséquences.
Notre souhait est que le dialogue permette à la classe politique de se rassembler autour d’un texte qui sera soumis au verdict du peuple
Cette fois-ci, le président de la République, le gouvernement et la majorité sont unanimes à afficher leur détermination en vue d’aller au bout du processus engagé. La nécessaire onction du peuple constitue le seul moyen d’assurer qu’il n’y aura pas d’obstruction de la part de qui que ce soit. La consultation populaire n’est pas un épouvantail que la majorité agite comme un chiffon rouge face à l’opposition. Ce n’est pas un chantage mais la réaffirmation d’un engagement ferme : le processus des réformes ira cette fois jusqu’au bout. Notre souhait est que le dialogue permette à la classe politique de se rassembler autour d’un texte qui sera soumis au verdict du peuple.
Comment expliquer l’attitude de l’opposition, qui se montre réservée, estimant qu’il y avait dans le texte des points méritant une clarification ?
C’est une question à poser à la porte-parole de la coalition – mon objectif n’est pas d’embarrasser qui que ce soit. Il avait été envisagé que le communiqué soit également signé par la coalition et par le gouvernement. Or les hésitations, sur cette question, ne sont pas venues du gouvernement.
Il n y a pas à polémiquer sur la tenue de manifestations par un camp ou par l’autre
Au moment où nous parlons, les supporters de la coalition sont toujours dans les rues. N’y a-t-il pas là une violation des dispositions du communiqué des médiateurs, qui demande aux acteurs de suspendre les manifestations publiques jusqu’à l’ouverture du dialogue ?
Pas du tout. Je serais vraiment malhonnête et hypocrite si je devais considérer la manifestation du 3 février comme une violation des points convenus dans le communiqué de presse des ministres ghanéen et guinéen. Il est logique et compréhensible que les activités politiques préalablement prévues le week-end dernier par les deux camps puissent se tenir. La question a été évoquée avec les représentants du Ghana et de la Guinée. Il n y a donc pas à polémiquer sur la tenue de manifestations par un camp ou par l’autre.
En revanche, il faut souligner qu’un certain nombre d’engagements implicites ont été pris par les deux parties : la question des détenus s’adresse sans doute davantage au gouvernement, et l’arrêt des manifestations incombe avant tout à la coalition. Chacun doit jouer sa partition pour donner une chance au dialogue.
Propos recueillis par Angelo Akué, à Lomé.
Jeune Afrique