C’est un secret de Polichinelle. Le Togo frappé par un surendettemment seulement quelques années après son admission à l’initiative PPTE, a signé un accord de crédit dans le cadre de la Facilité Élargie de Crédit (FEC) avec le Fonds Monétaire International (FMI). A ce titre, un montant total de 176,16 millions FCFA remboursable est alloué au Togo. Ce nouvel accord triennal a été signé le 05 mai 2017.
« Tous les crédits accordés par le FMI aux Etats membres sont libellés en DTS qui sert d’unité de compte au FMI. Les crédits sont remboursés au fonds en DTS. Le DTS est indexé sur un panier de devises majeures, notamment le dollar américain, l’euro, le yen japonais, la livre sterling et en septembre 2016, du renminbi chinois. Un système de pondération permet d’évaluer la valeur du DTS en fonction des cours de ces devises. Il faut préciser que ces devises sont choisies en fonction du poids de la devise dans les échanges extérieurs. La Chine ayant fini par imposer sa monnaie au monde, par le volume de son commerce international, a intégré pour la première fois ce panier en 2016. Dans le cadre du crédit accordé au Togo, il y aura dans un premier temps une conversion en dollar, en euro, puis finalement en F.CFA si le crédit sera utilisé dans la zone CFA. Le remboursement passera certainement par le même cheminement », a expliqué Dr Thomas Koumou, président de l’association Veille économique.
Et d’ajouter : « Il faut préciser que lorsque vous gérez bien votre économie, vous n’aurez jamais besoin de ces institutions. Mieux, lorsque vous réalisez des excédents au niveau de votre balance des paiements, vous pouvez créer un fonds souverain et l’indexer en partie sur les actifs du FMI en mettant des ressources en devises à la disposition du fonds. Ce sont la mauvaise gestion, la paresse et l’incompétence de nos gouvernants qui conduisent nos pays à recourir à ces institutions. Les rapports du FMI étant crédibles, ils servent de référence aux autres partenaires lorsqu’ils souhaitent nouer des relations économiques avec nos Etats. Ce sera dorénavant la posture que tiendra la Chine puisqu’elle vient d’intégrer le panier du DTS. Le jour où nous aurons à la tête de nos pays des dirigeants de haute moralité et avertis sur le fonctionnement du monde et de leur pays, qui ne seront ni paresseux, ni incompétents, nos Etats seront mieux gérés. Les relations avec ces institutions seront différentes ».
Dans le cadre de cet accord, il est recommandé au Togo de précipiter la finalisation de la fusion annoncée de l’Union Togolaise de Banque (UTB) et de la Banque Togolaise pour le Commerce et l’Industrie (BTCI). Mais ce qui fâche le plus dans tout ça, cette fusion pourrait se passer sans audit, connaissant justement le Togo. Les banques publiques, à l’instar d’autres sociétés, sont gérées comme des épiceries. Le pillage systématique est la règle au sein de ces institutions. Le cas de la BTCI et de l’UTB, objets de plusieurs scandales révélés dans les colonnes des journaux est manifeste. Les auteurs de la faillite de ces banques ne sont pas inquiétés. Ils sont tranquilles et se la coulent douce, sous bonne garde du Prince. « La question que nous nous posons est celle-ci : les gouvernants veulent – ils effacer les traces de la mauvaise gestion de ces banques en procédant à une fusion, à l’image de ce qui se fait entre Togotelecom et Togocellulaire ? Les participations des deux banques d’Etat à l’effort budgétaire sur les trois dernières années, selon nos gouvernants, sont (sources budget 2017) : Impôts sur les sociétés (IS) : BTCI 118 568 000 FCFA (2015) ; 108 500 000 FCFA (2016) ; 101 540 000 FCFA (2017). UTB 635 652 000 FCFA (2015); 680 000.000 FCFA (2016); 195.582.000 FCFA (2017); Dividendes : BTCI rien sur les trois années. UTB 2 000 000 000 FCFA (2015) ; 2 000 000 000 FCFA (2016) ; 500 000 000 FCFA (2017) », rappelle M. Komou.
« Dieu seul sait si ces ressources ont été effectivement versées à l’Etat puisque les lois de règlement, les états financiers et les rapports annuels de ces banques sont introuvables. Je rappelle que les deux banques sont des banques d’Etat. C’est-à-dire que c’est votre argent qui a servi à créer ces deux banques. En gouvernance moderne, Les documents financiers de ces banques doivent figurer sur leurs sites internet.En réalité, les opérations de fusion sont conseillées en finance d’entreprise lorsque deux entités veulent renforcer leur position sur un marché concurrentiel par la mutualisation des moyens en réduisant les coûts d’exploitation synonyme d’une optimisation de rentabilité sur le marché en question. Est-ce réellement l’objectif de la fusion des deux banques ? Nous émettons de sérieux doutes dès lors que tout ceci se fait comme d’habitude, dans une totale opacité. Et pourtant il s’agit bien des ressources des contribuables », s’est-il inquiété.
« Nous proposons la création d’une holding de reprise servant de locomotive à quatre filiales bancaires. Nous aurons ainsi un groupe bancaire public avec des filiales spécialisées. Je préfère passer sous silence le montage et les segments d’activité que ces filiales doivent couvrir. Il faut ensuite recapitaliser ce groupe bancaire en fonction de la situation intenable de notre endettement public. Il est donc impératif, face à la situation actuelle de notre économie, que le Togo ait un groupe bancaire solide bien géré et suffisamment capitalisé afin de financer de façon optimale notre économie. Il est regrettable que son excellence le Président de la République sollicite des banques privées pour financer notre agriculture. Ce qui risque de renchérir les coûts de production en réduisant les marges commerciales des agriculteurs dans un monde aussi compétitif. Ce n’est pas acceptable », a-t-il indiqué.
Source : L’Alternative No.615 du 23 mai 2017
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