« Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir » (Jean de La Fontaine)
Faute de pouvoir inquiéter son ennemi public N°1, le chef de l’Etat togolais, Faure Gnassingbé, cible les personnalités proches de l’ancien Premier ministre. On parie que le fils du père doit regretter chaque instant de n’avoir pas pu coffrer son trublion d’opposant et de l’avoir laissé filer au nez et à la barbe. En juillet 2020, le pouvoir togolais avait émis un mandat d’arrêt international contre le candidat de la Dynamique Monseigneur Kpodzro (DMK) Agbéyomé Kodjo qui se réclame toujours vainqueur du scrutin présidentiel du 20 février 2020. Tout était affiné pour l’envoyer derrière les barreaux pour plusieurs mois. Quatre mois plus tôt, l’immunité parlementaire de l’ancien Premier ministre a été levée comme une lettre à la poste. Il s’est vu collé une montagne de charges contre sa personne : « Troubles aggravés à l’ordre public, diffusion de fausses nouvelles, dénonciations calomnieuses, atteinte à la sûreté intérieure de l’État ». Son crime : avoir humilié le jeune Prince des Gnassingbé dans les urnes. Mais droit dans ses bottes depuis son « champ de maïs » (clandestinité), Agbéyomé Kodjo trouble quasi quotidiennement la quiétude de Faure Gnassingbé et de son mentor Macron.
A défaut d’Agbéyomé Kodjo, le régime de Faure Gnassingbé traque impitoyablement son entourage. Fin novembre 2020, deux membres de la DMK, la coordinatrice Brigitte Kafui Adjamagbo Johson et Gerard Djossou ont été cueillis et ont passé plusieurs semaines dans les geôles de la dictature sous le fallacieux prétexte d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat. L’implication de Mme Adjamagbo-Johnson, figure de proue de l’opposition, dans un présumé plan de déstabilisation du Togo, n’était que le fruit de l’imagination fertile du régime. Sous forte pression, Faure Gnassingbé n’a eu d’autre choix que de l’élargir.
Bien avant, c’est le prophète Esaïe Dekpo, proche d’Agbéyomé Kodjo qui a été appréhendé au motif qu’il aurait prédit un Waterloo électoral au fils du père. Il passera 12 mois dans l’enfer de la prison civile de Lomé, de quoi lui faire comprendre que toutes les prophéties ne sont pas bonnes à faire.
Début mai 2021, le partriarche de 90 ans et père spirituel d’Agbéyomé Kodjo, Mgr Kpodzro très incisif contre le régime est contraint à l’exil avec son assistant Marc Mondji. Des sources proches de la DMK, ils auraient été exfiltrés en Suède par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR) pour des raisons sécuritaires.
Le 18 mai 2021, Paul Missiagbéto, Conseil spécial d’Agbéyomé Kodjo, a été interpellé manu-malitari à son domicile par des éléments de la Gendarmerie lourdement armés. La justice aux ordres n’y est pas allée de main morte. Accusé de délit d’opinion, Paul Missiagbeto est condamné à 48 mois de prison.
Le 4 novembre 2021, c’est au tour de Jean-Paul Oumolou refugié politique en Suisse et activiste proche d’Agbéyomé Kodjo d’être enlevé par des agents du Service de recherches et d’investigations criminelles (SCRIC), la redoutable police politique de Faure Gnassingbé. Accusé de délit d’opinion pour s’être montré très critique à l’endroit du régime cinquantenaire, il encourt jusqu’à 20 ans de prison.
Aujourd’hui, sur le tableau de chasse très garni de Faure Gnassingbé sont accrochés pas moins de 115 otages politiques.
Médard Amétépé
Source : Liberté / libertetogo.info
Source : 27Avril.com