Les énergies renouvelables sont devenues depuis quelques années l’alternative aux énergies fossiles et hydroélectriques. Même si les climato-sceptiques continuent de ne pas y croire, les effets du changement climatique et leurs conséquences sur planète poussent les dirigeants du monde, du moins une grande partie, à amorcer le virage des énergies renouvelables pour une planète plus saine. Dans ce sens, la conférence de Paris sur les changements climatiques de 2015 (COP21) a été un tournant décisif dans la lutte contre le réchauffement climatique. Même si les objectifs sont loin d’être atteints et certains pays comme les USA remettent en cause cet accord, il est indéniable que la course pour les énergies renouvelables est désormais lancée.
Dans cette compétition, l’Afrique est encore à la traine, même si certains pays ont fait ces dernières années des efforts, comme le Sénégal, le Ghana, le Maroc, la Burkina Faso qui ont lancé et inauguré de grande centrales solaires. Lorsqu’on parle des énergies renouvelables, on parle en réalité des financements, et il convient de dire ici que c’est ce volet qui a constitué l’un des aspects majeurs de l’accord de Paris lors de la COP 21.
En Afrique, c’est la course pour l’obtention de ces gros financements dont la plupart serviront à garnir les comptes bancaires des dirigeants. Le Togo n’a pas encore un grand projet de centrale solaire, du moins à notre connaissance. En revanche des panneaux solaires sont implantés depuis quelques années sur quelques artères de la capitale, dans les villes de l’intérieur et dans des campagnes. Les financement proviennent de certains partenaires et tournent autour de plusieurs milliards. Même la CEET engrange des milliards par an sur l’éclairage public facturé à un franc sur l’impulsion. Suffisant pour attirer la meute des corrompus dont regorge le régime cinquantenaire RPT/UNIR. Comme le cas d’autres projets juteux qui ont fini dans les poches des barons en toute impunité, le projet d’implantation des lampes solaires sur l’ensemble du territoire ressemble à une grosse arnaque. Surfacturation, matériel inadapté, détournements…
Nous avons fait un tour dans plusieurs localités du Togo du Sud jusqu’au Nord, interrogé les citoyens pour savoir ce que sont devenus les lampadaires solaires implantés un peu partout sur l’ensemble du territoire. Le constat est sans appel, la plupart ne s’allument plus. Et pourtant certains sont implantés il y a à peine deux ans. Cette situation nous a poussés à demander l’avis d’un expert qui nous a décrit de bout en bout le scandale qui entoure l’implantation de ces lampadaires. Selon cet ingénieur en électricité, les lampadaires solaires qui sont implantés un peu partout au Togo ne sont pas adaptés à nos réalités. Il faut comprendre d’abord qu’il en existe deux sortes : une dont la plaque solaire et la batterie sont en hauteur, l’autre où la plaque solaire est en hauteur et la batterie dissimulée dans le sol sous le poteau. C’est cette seconde option utilisée par les sociétés d’implantation des lampadaires au Togo qui cause problème. En effet les batteries enterrées sous terre se retrouvent hors d’usage en si peu de temps sous l’effet de la chaleur. A cela il faut ajouter la qualité douteuse des panneaux solaires. Un autre facteur non moins important, la poussière qui recouvre ces panneaux solaires et les empêche de fonctionner.
Ces facteurs combinés mettent rapidement hors d’usage ces lampadaires solaires dont le coût avec les surfactures revient à 1. 300 000 F ( Un million trois cent mille francs cfa ) l’unité. Et c’est là tout le scandale. Et pourtant lors de la réception d’une première phase d’implantation des lampadaires solaires ( 7042 lampadaires ) par la société chinoise ZTE, Abiyou Tcharabalo, le Directeur Général de l’Energie au ministère de l’Energie et des Mines a laissé transparaitre tout son enthousiasme en ces termes : « Nous sommes satisfaits de l’exécution de ce projet dans la mesure où ZTE Corporation a sous-traité les travaux avec les entreprises locales en mettant à leur disposition ses ingénieurs », avant de poursuivre : « La deuxième phase du projet permettra l’installation de 5958 lampadaires. L’objectif de cette initiative est la réduction du coût de l’éclairage public. Les factures d’éclairage public sont de plus en plus élevées au point où les collectivités locales n’arrivent plus à les payer. »
Prendre des prêts de dizaines de milliards auprès de la Chine pour réaliser des ouvrages approximatifs le régime en place est devenu expert en la matière. Les scandales qui touchent les contournements d’Alédjo, l’aéroport de Lomé, n’ont pas encore fini de faire leurs effets que voilà, un autre scandale s’ajoute à la longue liste. Celui des lampadaires solaires sur financement de la Chine. Il suffit pour n’importe quel profane de multiplier le coût surréaliste de 1 300 000 francs CFA par le nombre de lampadaires annoncé plus haut dans la déclaration du Directeur de l’Energie pour avoir une idée des fonds engloutis dans ce projet qui apparait de plus en plus comme une arnaque. Et ceci ne concerne que les fonds obtenus auprès de la Chine. Il existe d’autres partenaires comme l’UEMOA qui mettent également des milliards de francs dans ces projets de lampadaires solaires.
Un tour dans nos villes, même à Lomé ici, permet à n’importe qui de constater que ces lampadaires sont devenus depuis quelques mois des objets d’ornement. Le projet participe beaucoup plus à entretenir l’obscurité pendant que les initiateurs se pavanent tranquillement avec des milliards détournés en poche. Bienvenue dans le business des énergies renouvelables au Togo. Bon à suivre !
Source : L’Alternative No.723 du 31 juillet 2018
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