La restriction des espaces de liberté continue au Togo sous la dictature cinquantenaire. Et les signes que ce pays soit au même niveau que la Corée du Nord sont en train d’être progressivement mis en place. Après les partis politiques, les associations, les syndicats, c’est le tour des Organisations Non Gouvernementales (ONG) d’être mises sous coupes réglées. La dictature veut tout contrôler, même les actions et les financements de ces entités qui, en l’absence du gouvernement, apportent un soulagement aux populations qui sont visiblement des laissés pour compte, surtout celles qui vivent à l’intérieur du pays et côtoient la misère au quotidien.
En effet, par décret N°2022-002/PR adopté le 5 janvier 2022, le gouvernement a fixé les conditions de fonctionnement et de coopération avec les ONG. Selon l’exécutif, ce décret vise à «accroître l’alignement des actions des ONG sur les priorités de développement définies par le gouvernement ». C’est dans ce cadre que le ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et du Développement des territoires, Payadowa Boukpessi et son collègue de la Planification du Développement et de la Coopération, Secrétaire générale de la Présidence de la République, Ablamba Johnson, ont, par note circulaire N°0079 en date du 6 avril 2022, demandé aux maires, préfets et directeurs régionaux de la Planification et de l’Aménagement du territoire; de prendre toutes les dispositions appropriées pour s’assurer que toute action à entreprendre par une ONG réponde aux critères définis par le gouvernement. Et donc toute activité que doit entreprendre une ONG est portée préalablement à la connaissance des préfets, maires et directeurs régionaux de la planification du développement et de l’aménagement du territoire, à défaut, cette activité sera suspendue.
Il apparaît clairement que le gouvernement togolais veut contrôler les ONG qui sont installées sur le territoire. Une situation que vont digérer difficilement les partenaires qui financent ces organisations. Vont-ils accepter cela ? Déjà, certains parlent de la ligne rouge que franchit le gouvernement en imposant ses desiderata à ces entités dont l’apport au développement est très significatif.
Par définition, une Organisation non gouvernementale (ONG) ne s’aligne pas sur les directives de l’exécutif pour mener ses actions. Elle est indépendante. Mais ce décret et la note circulaire des ministres vont permettre aux maires, aux préfets et à ces directeurs régionaux d’interférer dans les affaires des ONG. Et puis, comme on le leur connaît, ces autorités locales peuvent décider que tel projet ne doit pas être exécuté dans telle ou telle localité, selon leurs intérêts politiques. Et c’est aussi une manière de contrôler l’argent qui rentre dans les caisses de ces ONG. La conséquence à cette malencontreuse situation, c’est que les ONG qui ne voudront pas de cette intrusion des autorités locales dans la gestion de leurs affaires vont vouloir quitter le pays. Une grande perte donc pour les populations qui sont les grands bénéficiaires de leurs actions.
Ce n’est un secret pour personne que dans certaines contrées du pays, le gouvernement a démissionné. Et ce sont ces ONG qui se mobilisent au chevet de ces populations prises en otage par une misère indescriptible, pour leur construire des hôpitaux, des établissements scolaires, des marchés, des centres de loisir, des toilettes publiques, etc. La situation est beaucoup plus préoccupante dans l’extrême nord du pays où ce sont les ONG qui remplacent presque le gouvernement. Il est clair que le départ de ces ONG qui ne voudront pas de ces interférences dans leur gestion, va pénaliser ces populations qui sont des « oubliés de la République ». C’est sûr que les partenaires en développement vont réagir à cette décision du gouvernement qui veut tout contrôler dans le pays.
Il y a quelques semaines, les responsables des Universités sociales du Togo (UST) ont vu un projet de construction de latrines publiques refusé par un préfet à l’intérieur du pays. Ce dernier a demandé aux responsables de cette association d’aller obtenir la permission du ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et du Développement des territoires, avant de construire ces latrines publiques dont les populations ont urgemment besoin. Le projet est actuellement mis en jachère pendant que les populations de cette localité continuent de souffrir le martyre. Et la défécation à l’air libre continue d’avoir le vent en poupe dans cette localité. C’est donc comme ça qu’on fait la décentralisation au Togo sous le régime cinquantenaire qui, en réalité, veut concentrer tous les pouvoirs entre ses mains.
Ce décret, il faut le dire, participe au renforcement de la dictature au Togo. Actuellement, c’est le débat sur la loi 1901 relative à la création des associations et autres qui se pose. Le gouvernement, dans son projet de mettre sous surveillance toutes les associations et ONG, veut changer cette loi. Ce qui ne plait pas aux acteurs de la société civile qui ont réagi vigoureusement contre ce projet. En tout cas, le débat continue. Le chemin pour mettre les ONG sous coupes réglées commence donc déjà. Et c’est ça la décentralisation qu’on brandit aux partenaires en développement qui, cette fois-ci, sont déconcertés face à l’exagération de la dictature cinquantenaire qui veut renforcer son assise.
Source : L’Alternative
Source : icilome.com