Togo : Dans un marché de 91,789 millions FCFA, le CRD déboute la Commission de passation du ministère de l’Agriculture

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Togo : Dans un marché de 91,789 millions FCFA, le CRD déboute la Commission de passation  du ministère de l’Agriculture

Les formations passées dispensées aux commissions de passation des marchés au sein des autorités contractantes seraient-elles de vaines opérations desquelles des agents ne tirent aucun profit ? Après que la commission au ministère de l’Agriculture a attribué un marché d’une valeur de 91,789 millions FCFA à l’entreprise APPROBAS-B, le Comité de règlement des différends (CRD), après un recours de l’entreprise ETB et analyse, a annulé les résultats provisoires du lot n°11 et décidé de la reprise de l’évaluation des offres. Et pourtant, les faits coulaient de source et n’avaient pas besoin d’arriver jusqu’au niveau du CRD.

Suite à l’appel d’offres national n°005/2018/MAEP/SG/PRMP/PASA/SPM du 22 mars 2018 relatif aux travaux de construction des infrastructures au profit des Entreprises de services et organisations de producteurs (ESOP) et Zones d’aménagement agricole planifiées (ZAAP) (Lot n°11), la commission de passation, après analyse des offres, a déclaré attributaire provisoire l’entreprise APPROBAS-B du lot, alors qu’elle n’était pas moins disante. Aussi, non satisfaite de se voir déboutée, l’entreprise ETB a introduit un recours qui met à nu la mauvaise foi de la sous-commission d’analyse des offres au ministère de l’Agriculture.

Ainsi, il est ressorti du recours que : l’offre d’ETB est déclarée non conforme au motif que le poste « installation et repli de chantier » est omis, alors que ledit poste ne figure ni dans le bordereau des prix, ni dans le cadre de devis du dossier d’appel d’offres transmis aux candidats ; l’autorité contractante a omis ce poste dans les quinze premiers lots du dossier d’appel d’offres transmis aux candidats ; pour remédier à cette erreur, la sous-commission a demandé à tous les soumissionnaires de prendre en compte ce poste dans la préparation de leurs offres lors d’une réunion de présentation du projet organisée le 13 avril à leur intention, réunion à laquelle ETB n’était pas présente et dont le procès-verbal ne lui est jamais transmis, sauf aux candidats présents.

Le CRD, dans ses analyses, a relevé, entre autres,des points suffisants qui ont sous-tendu sa décision et qui méritent attention.

A l’issue de la présentation du projet, l’autorité contractante a fait dresser une liste de présence et une liste de retrait annexées au procès-verbal de réunionqu’elle a versé au dossier ; toutefois, ces documents ne font aucunement mention des dénominations, adresses, contacts et émargement de l’entreprise ETB ; il résulte de ce constat que non seulement la requérante n’était pas présente à la réunion sus indiquée, mais aussi que l’autorité contractante n’a pas daigné lui notifier le procès-verbal modifiant le DAO (dossier d’appel d’offres) aux fins d’en tenir compte dans la préparation de ses offres ;

Or, conformément à l’article 39 du code des marchés publics et de la combinaison des clauses 11.1 et 11.2 des instructions aux soumissionnaires, il est admis que pour être valables et considérés comme faisant partie intégrante d’un dossier d’appel d’offres, les amendements ou addendas doivent préalablement être publiés et communiqués par écrit à tous les soumissionnaires moyennant un accusé de réception ;

Parce que l’obligation de publicité et de communication des amendements ci-dessus assignée à l’autorité contractante obéit aux principes fondamentaux de transparence et d’égalité de traitement des candidats qui régissent la passation des marchés publics ;

L’autorité contractante tente de justifier sa défaillance de n’avoir pas fait publier le procès-verbal ni notifié celui-ci aux candidats ayant acquis le dossier d’appel d’offres absents à la réunion en reprochant à la requérante de n’avoir pas participé à la réunion de présentation du projet où l’information relative aux amendements du DAO a été communiquée aux candidats ;

Mais dès lors que l’obligation réglementaire de publicité et d’information est formellement assignée à l’autorité contractante, celle-ci ne saurait s’en exonérer en invoquant une quelconque négligence du candidat ;

L’autorité contractante a privé ETB d’une information essentielle pourtant nécessaire à la préparation de son offre en choisissant de ne notifier les changements à prendre en compte dans le DAO qu’aux candidats présents à la réunion ;

Pire, cette pratique adoptée par la sous-commission d’analyse qui permet, dans une même procédure d’appel à la concurrence, à certains soumissionnaires d’intégrer un poste dans leurs cadres de devis alors qu’il n’est pas pris en compte chez le concurrent, rend impossible toute comparaison des offres sur une base égalitaire ;

L’omission du poste constaté n’est pas imputable à la requérante dans la mesure où, d’une part, ce poste a été ignoré dans le DAO et d’autre part, le procès-verbal contenant les modifications relatives audit DAO ne lui a pas été notifié ;

Aussi, les irrégularités ci-dessus relevées portent sérieusement atteinte au principe d’égalité de traitement des candidats et sont susceptibles d’entrainer l’annulation de la procédure de passation du lot concerné.

Alors, il est demandé à la sous-commission d’analyse de tout reconsidérer en ne tenant pas compte du prix du poste « installation et repli du chantier ».

Voilà comment, n’eut été l’intervention du CRD, une énième entreprise aurait été pénalisée, non pas pour avoir fauté, mais du simple fait de l’inefficacité de certains agents indélicats dans des commissions et sous-commissions d’analyse des offres au sein d’autorités contractantes. C’est le lieu de rappeler que le respect des mandats doit être scrupuleusement suivi, afin que les brebis galeuses aillent voir ailleurs.

Godson K.

Source : Liberté No.2894 du 04 avril 2019

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