La chefferie traditionnelle est une des sources de tensions récurrentes au Togo. Depuis une dizaine d’année, la désignation des chefs traditionnels exacerbe le climat social car ne faisant pas souvent l’unanimité au sein des villages et cantons.
Le cas du village Klabè-Apegamé dans la préfecture de Wawa en est une illustration. Des sources bien renseignées, les préparatifs pour la remise de l’arrêté de reconnaissance au chef Ameto Koffi Abouewoudja IV suscite de vives réprobations. Nos sources renseignent que tôt le samedi 20 janvier, les préparatifs ont commencé avec l’immolation d’une bête dans une ambiance électrique. « Samedi à 2 heures du matin, le Régent de Klabé Efoukpa et le Régent de Klabé Adape et ses membres et le chef du village de Klabé Soto sont arrivés à Klabé Apegamé sous l’ordre du préfet de Wawa en commençant les opérations à 2 heures du matin en immolant la bête pour les préparatifs de l’intronisation du chef en question. La population étant informée, s’est précipitée vers le lieu de la cérémonie. On a frappé sérieusement tout le monde qui était sur les lieux. La Gendarmerie est arrivée à 6 h du matin. On note beaucoup de blessés. La tension reste tendue », révèle une autre source.
Le problème est né de la contestation du nouveau chef. Des sources proches de la famille Obympè, après le décès du chef Ani Kodjo Eugène Obympè II en 2007, Oyabe Bouka Kossi a assuré la régence pendant trois ans. Ensuite Utsa Kwaku Ebenezer Obympè III a été désigné en 2012 par les trois quartiers du village. La population attendait la reconnaissance officielle quand survint en 2015 Ameto Koffi Abouewoudja qui a été aussitôt reconnu par le ministère de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités Locales.
Depuis lors, la tension est toujours vive dans le village. Dans une correspondance en date du 28 novembre 2016, adressée au ministre Payadowa Boukpessi de l’Administration territoriale par des « doyens et sages » du village, il est mentionné « nous avons continué nos investigations et on nous faisait savoir que c’est le ministre Sessénou Fiatuwo qui a dit et insisté au ministre Payadowa Boukpessi que c’est les Ameto ou rien à qui revient le chef du village Klabè Apégamé. Le ministre poursuit en disant qu’il a pris toutes les dispositions adéquates et nécessaires pour la remise de l’arrêté ministériel, et qu’il n’y aura rien et que rien ne se passera. Nous vous rappelons que le ministre Sessénou n’est pas natif de Klabè Apégamé pour mieux connaître les réalités et l’histoire de Klabè Apégamé. Permettons-nous de revenir sur la position du ministre Sessénou. Dans le courant 2015, nous l’avons rencontré à Lomé dans son cabinet ministériel pour ce problème et il nous a fait savoir ceci : « Ce sont les Ameto qui me soutiennent financièrement dans ma politique donc mon collègue de l’Intérieur demanderait et tiendrait compte de mon dernier mot, l’exemple du canton de Gobé en est une preuve justificative ». Faisons un tour en arrière au poste des ministres des aînés Akposso. Le feu Kounalè Eklo a été ministre et a eu le plein pouvoir de l’intérieur mais il n’a pas touché aux affaires coutumières des peuples Akposso, paix à son âme. Monsieur Adadé Santi Sany a été ministre, il n’a pas fait trafic d’influence sur les affaires coutumières des Akposso. Les ministres Elia Dafo et Iloudje Ebina sont aussi des Akposso mais n’ont pas bouleversé les strates de la chefferie traditionnelle Akposso. L’Honorable député Gbakenou, un natif du terroir des Klabè n’a jamais osé toucher à l’intégrité de la chefferie de Klabè en général.
Aujourd’hui, c’est Sessénou qui est présent sur la scène politique du côté des Akposso et qui se croit tout permis en disant qu’il détient le pouvoir, nous n’avons pas de force, c’est lui seul qui détient le pouvoir. Le ministre Sessénou a toujours déclaré qu’il est l’ami personnel du chef de l’Etat et que tout ce qu’il lui demande et lui dit, il accepte. Pour cela, donner l’arrêté ministériel au ministre Sessénou pour venir remettre à la collectivité Ameto à Klabè Apégamé, car il a beaucoup lutté et gagné pour les Ameto, nous l’attendons fermement. Avec ses relations et ses amis, il peut mobiliser toutes les forces possible pour cette mission mais ils n’atteindront jamais leurs objectifs prévus, tous les projets en cours et éventuels seront boycottés par la majorité de la population. Or, la collectivité Ameto ne fait même pas 1% selon les statistiques démographiques ».
Pour finir, la note rappelle qu’ « en définitive, Monsieur le Ministre, il convient de vous signaler que la signature que vous venez d’apposer sur l’arrêté ministériel sous l’influence de votre collègue Sessénou de celui-là qui n’est pas désigné ni par le conseil coutumier mis en place dans le village Klabè Apégamé ni par les sages et doyens, a allumé le feu aux poudres et cela peut déclencher une guerre civile d’une grande envergure. Qui va l’éteindre ? Le reste de la balle est dans votre camp ».
A la suite de cette correspondance, les deux parties ont été invitées au ministre de l’Administration Territoriale. Mais visiblement, la solution du ministre Boukpessi ne semble pas passée. L’illustration a été faite le samedi dernier avec la vive tension suscitée par le début des préparatifs des cérémonies de remise officielle de l’arrêté de reconnaissance du nouveau chef prévues pour le samedi 27 janvier prochain.
Joint par la Rédaction, M. Ameto Nestor, un proche parent du nouveau chef désigné, il confirme la tension actuelle à Klabè-Apégamé mais rejette les accusations portées contre son frère. « Je n’étais pas moimême au village, mais j’ai appris que des gens sont venus faire violence samedi au village. Nous avons voulu réagir mais les autorités nous ont calmés. Au départ, les gens disaient que la tête de celui qui a été désigné ne leur plait pas. On est venu voir le ministre. On l’a changé mais ils continuent de gesticuler. La chefferie, c’est à nous. Les Ameto sont chefs depuis le temps des Allemands. Je ne comprends pas ces gens qui ne veulent pas le développement de notre village. Le chef sera intronisé le samedi prochain. Rien ne se passera. Toutes les dispositions sont prises », a-t-il déclaré.
S’agissant du soutien du ministre Fiatuwo Sessénou à la désignation du nouveau chef, M. Ameto Nestor trouve que « le ministre est du côté de la légalité et sait que la chefferie nous revient. Les Obympè ne sont pas de la famille royale ». Toutes nos tentatives pour joindre le ministre Sessénou ont été vaines.
La grande question qui se pose est comment Obympè I et II ont pu être chef à un moment donné de l’histoire de ce village. Il importe que les ministres de l’Administration Territoriale et de la Sécurité prennent la mesure de la situation pour sauver la paix civile dans ce village.
Kokou Agbemebio
Source : Le Correcteur
27Avril.com