Depuis le jeudi 18 mars dernier, les frais de péage connaissent une augmentation au Togo. Cette fois, les motocyclistes doivent aussi désormais passer au guichet. Une décision qui intervient après que le projet ait été annoncé, quelques mois plus tôt, par le gouvernement. Mais l’exécutif national ce serait abstenu de le traduire dans les actes, les moments n’étant pas propices, avait-on fait spéculer. Mais c’est à se demander si la situation actuelle est au demeurant le plus indiqué pour une telle charge sur la tête du frêle consommateur togolais.
Les véhicules légers paient aux péages depuis le jeudi 18 mars 2021 500 F, contre 300 F auparavant. Les minibus de 9 à 15 places déboursent désormais 600 FCFA, les autocars/bus 1500 FCFA, les poids lourds à 2 essieux 2500 FCFA, ceux à 3 essieux 3000 FCFA, les 4 essieux 3500 FCFA et les 5 essieux et plus 5000 FCFA. La grande nouveauté, c’est l’imposition des tricycles et des motos. Ils sont contraints de payer respectivement 100 et 50 F à chaque passage aux péages.
Jeudi, jour d’entrée en application des nouveaux tarifs, tôt dans la matinée, de Tsévié à Dapaong en passant par Kpélé Adeta, de nombreux usagers de la route ont exprimé leur indignation suite à cette augmentation des tarifs aux péages. Des motocyclistes et conducteurs de voitures ont bloqué quelques heures les différentes routes des villes citées plus haut. Ces usagers exigent la suppression des nouveaux tarifs.
Des mouvements d’humeurs ont également ont été signalés au niveau d’autres péages notamment sur la Nationale N°5 (Kpalimé-Atakpamé) où les conducteurs de taxi-moto ont également bloqué la voie. A Kpélé Adéta, la manifestation a dégénéré. Des gaz lacrymogènes ont été tirés pour disperser les manifestants. Des courses poursuites, des jets de pierres et des arrestations ont été signalés.
A ce jour, la Ligue des consommateurs togolais réclame toujours la libération des manifestants arrêtés.
Mais n’a-t-on pas oublié les vélos-cyclistes… ?
En effet, si la decision d’augmenter les frais de péage est des plus inopportunes, celle de l’elargir aux motocyclistes composés majoritairement des conducteurs de taxi de moto l’est encore plus. Et pour cause, ils sont aujourd’hui des milliers de jeunes togolais, sans emploi à se lancer dans ce métier pour gagner leur pitance quotidienne.
Parents pauvres d’un pays régenté depuis plus de 50 ans par une seule famille où le développement est complétement désarticulé, ces jeunes togolais désoeuvrés dont la majorité sont diplômés, doivent se tourner vers ce travail pour survivre. Avec toutes les conséquences sur leur santé. L’augmentation du nombre de motocyclistes contribue aux accidents de la circulation qui, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), constitue un véritable problème de santé publique.
D’ailleurs, dans les pays développés, l’utilisation de la moto comme unique moyen de déplacement est découragée. Ceux qui en possèdent en sont en fait des passionnés de deux roues. Et dans ces pays, les motos d’aisance utilisées n’ont rien à voir avec les petits cylindrés de fabrication asiatique qui inondent les marchés africains. Utilisée hier à titre privé et présenté comme une expression d’ascension sociale la moto est devenue dès les années 90 un outil de transprt commercial dans beaucoup de pays de l’Afrqiue de l’ouest et central. Une expression de la conjecture sociale qui s’est installée dans ces pays avec la fracture nette entre les minorités pilleuses des ressources publiques et la majorité cloisonné au bas de l’échelle. Ainsi au Togo, avoir une moto, n’est devenue autre que le signe de la pauvreté et des difficultés économiques auxquelles sont soumises la majorité des concitoyens.
Et c’est avec ce cliché qu’on contraint ces togolais à se plier à l’obligation des taxes dans un contexte de crise sanitaire qui a déjà plongé le secteur informel dans l’agonie. Un véritable saignement à blanc des citoyens du bas.
Et comme le gouvernement semble ne pas être à l’écoute des gémissements des populations, il aurait pu ajouter à la liste des usagers soumis au payement des frais de péages, les vélo-cyclistes. Ainsi, les apprentis, les vendeurs à la sauvette, les fermiers et autres utilisateurs de la petite reine passeront également à la caisse. Pathétique !
Pendant ce temps, certains profitent des deniers publics détournés…
Entretien et modernisation du réseau routier togolais, c’est la motivation avancée par le gouvernement au conseil des ministres du 23 décembre 2020 pour décider de la hausse des frais de péage. «Chaque année, le besoin de financement pour l’entretien régulier des routes revêtues et non revêtues s’élève à environ 30 milliards de francs CFA », alors que « les ressources budgétaires totales mobilisées se situent en moyenne autour de 17 milliards de francs CFA par an », avait dardé le conseil des ministres. Il y a donc un gap de 13 milliards FCFA à combler à tout prix.
Parlant d’entretien routier, il s’est révélé avec les tollés soulevés contre les hausses abusives des prix du carburant à la pompe que la structure de ces prix prend en compte un fond de péréquation reversé au Fonds d’entretien routier avec d’autres panoplies de taxes ou prélèvements qui grèvent ces coûts à la pompe. Il est de l’ordre de 35 F prélevé sur chaque litre de carburant acheté. Le Togo, selon les indiscrétions, commande chaque trimestre trente millions (30 000 000) de litres, soit cent vingt millions (120 000 000) de litres par an. C’est dire que le fameux gap dans les fonds nécessaires pour l’entretien routier est censé être déjà comblé, en ce sens que le parc automobile augmentant évidemment chaque année, la courbe des recettes ne peut que le suivre. C’est dire que l’Etat doit s’en prendre à sa gestion et rien d’autre. Avec la hausse des tarifs des péages, le contribuable est donc doublement ponctionné pour l’entretien routier.
En effet, le rapport d’audit de l’Inspection générale des finances (IGF) commandité par l’Etat togolais, à la suite de l’affaire « Pétrolegate », est venu confirmer des détournements et autres manœuvres évalués à quatre cent soixante-seize milliards sept cent quatre-vingt-treize millions six cent trente-trois mille cinq cent vingt-deux (476.793.633.522) FCFA. Les personnes citées dans le rapport ne sont point inquiétées à ce jour malgré les fermes recommandations des auditeurs.
Il nous souvient également des graves allégations de détournements révélées par les médias privés au niveau de l’ancien Fonds d’Entretien Routier (FER) devenu SAFER.
Tous ces dossiers semblent être mis sous éteignoirs. Et pendant que, certains profitent des deniers publics détournés, l’Etat demande aux Togolais déjà ballottés de faire encore des efforts. Ce qui provoque naturellement des remous au sein de l’opinion.
Source : Fraternité
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Source : 27Avril.com