Depuis plusieurs mois, les mariages, à Lomé, ne sont célébrés qu’à la marie centrale. Mais ce qui devrait être une occasion de joie, devient très vite un supplice pour les prétendants et leurs invités, faute d’infrastructures d’accueil dignes.
Chaque mardi, jeudi et samedi, la Cour de la mairie centrale de Lomé est bondée de monde. Pas moins de dix mariages sont célébrés à chacun de ces jours. Hier jeudi par exemple, 13 unions ont été célébrées. Et chaque couple, à cette heureuse occasion, se fait accompagner de ses invités.
En réalité, la cérémonie devant le maire ne dure qu’en moyenne une vingtaine ou trentaine de minutes, y compris les processions d’entrée et de sortie. Mais à la mairie de Lomé, ces 30 minutes sont biens souvent précédées de longues heures d’attentes pénibles des prétendants et accompagnants qui laissent totalement indifférents les premiers responsables des lieux.
Pour une cérémonie prévue pour se dérouler à 10 heures, il arrive que vous quittiez les lieux à 14 heures. Mais si, par une trop grande ponctualité, les couples et accompagnants arrivaient plus tôt, ils peuvent donc passer au-delà de cinq heures à attendre leur tour. Ce qui est pénible, ce n’est pas que la durée de l’attente qui en soi, constitue aussi un manque de respect pour toutes personnes. Car il suffit d’une bonne organisation et un souci de rendre confortable le bref séjour des visiteurs de la mairie pour réduire considérablement cette attente. Et cette longue attente a le mérite de révéler en quoi la mairie de Lomé est un bâtiment qui ne répond plus aux besoins actuels.
Il est vrai que le Togo court derrière des élections locales depuis plusieurs décennies. Mais cela ne devrait pas suffire pour justifier le manque d’investissements criard dans des structures d’accueil des citoyens. Les milliards de FCFA que brasse la Délégation spéciale proviennent des citoyens. Même les projets financés sur des prêts seront remboursés par les citoyens. Et ces derniers ont droit à un minimum d’égard de la part des autorités municipales. Ce respect passe déjà par des petits détails.
Dans la cour de la mairie où se massent des centaines de personnes chaque semaine, c’est à peine qu’on dispose de quelques dizaines de chaises au profit des visiteurs. L’écrasante majorité est obligée de se tenir debout de longues heures, soit à l’ombre, soit en dehors du périmètre même de la mairie. Les personnes d’un autre âge et tous ceux qui ne peuvent pas supporter ce supplice sont obligé de s’asseoir à même le sol sur les marches de la mairie. Ou sur les racines des arbres situés sur la cour. Comment peut-on être responsable municipal et rester insensible à une situation pareille où des citoyens venus de parfois très loin, bien endimanchés soient obligés de s’asseoir par terre ou sur des racines ? Cette situation dure depuis des années. Mais aucune solution n’est trouvée.
Pis, quand cela lui plaît, la Vice-présidente des lieux qui ne supporte pas que la terrasse de la mairie soit encombrée, se met à renvoyer les personnes qui, ne pouvant plus se tenir debout, décident de poser leurs fesses sur les marches de la terrasse municipale. « Allez loin sous les arbres », a-t-elle lancé d’un ton autoritaire à certaines femmes assises, hier jeudi. Elle sait pourtant que « sous les arbres », il n’y a même pas les marches pour y poser les fesses.
Que l’entrée des locaux de la mairie ne soit pas encombrée est une chose. Mais le problème ne devrait pas être posé en termes de renvoyer ceux qui s’y asseyent. Il est vrai qu’au Togo, les rapports entre les préposés aux postes publics et les citoyens sont rythmés par la force. Mais cela ne relève pas de l’apanage d’un quelconque génie de réfléchir à doter la cour de la mairie en reposoirs et de hangars. On n’a pas besoin ni de milliards ni d’être une fée pour y penser. Il suffit simplement de se mettre à la place des hommes et femmes, souvent pères et mères de familles, responsables dans leurs milieux professionnels ou même simples citoyens, ou tout simplement avoir la conscience du service public pour chercher à trouver des solutions à ces genres de problèmes.
Comment comprendre que des prétendants au mariage, souvent en costume ou en robe et soigneusement maquillés soient entassés comme des prisonniers dans une petite salle de quelques mètres carrés, fermée, sans climatisation… pendant des heures ? Et il arrive même que certains couples ne trouvent pas de place pour s’asseoir, parce que les places prévues sont toutes occupées. Pendant ce temps, leurs parents, dehors, sont obligés de se tenir eux-assis debout, ou d’errer çà et là. Et lorsqu’ils ont des besoins physiologiques, ils doivent contourner le bâtiment pour aller se soulager derrière, sous les fleurs.
Parlant plus haut d’organisation, depuis qu’il a été décidé de centraliser les célébrations de mariage, les autorités municipales auraient pu penser à construire une seconde salle pour des cérémonies simultanées. Si, comme toujours, elles estiment ne pas disposer de moyens, la mairie a des démembrements dans la ville. Elle peut aménager une ou deux autres salles où peuvent se déplacer officiants et mariés pour les célébrations. Cela éviterait que les familles viennent s’agglutiner chaque mardi, samedi et jeudi dans une structure mal équipée et pas du tout confortable pour ses hôtes.
En octobre dernier, à cause du sommet sur la sécurité maritime, les périmètres du quartier administratif étant bouclés, la mairie était obligée de délocaliser les célébrations de mariage. Et elle a dû recourir à une salle du centre communautaire de Bè. Pour qui connaît ledit centre, l’environnement dans lequel il est situé, le confort (sic) de sa grande salle, ne peut qu’être choqué que la mairie n’ait pas d’autres solutions que celle-là. Ce centre peut bien servir à d’autres activités communautaires. Mais si la Délégation spéciale décide de le retenir comme une solution alternative, il a alors besoin d’être proprement aménagé. Et Dieu seul sait que la mairie a les moyens pour se doter d’une ou de plusieurs autres salles confortablement équipées pour des cérémonies de mariage et bien d’autres. Si elle n’en a pas les moyens (ce qui n’est probablement pas le cas), elle peut procéder par une approche partenariat public-privé. Si elle ne le fait pas, c’est soit par paresse intellectuelle, soit par déficit d’ambition, soit par cynisme à l’égard des citoyens usagers des services municipaux.
Quoi qu’il en soit, Fogan Adégnon le plus grand cumulard de la République et son adjointe Suzanne Aho doivent aller au-delà des signatures de dossiers et des récitations des parties du Code de la Famille et s’investir pour véritablement faire de la mairie une structure d’accueil responsable des usagers. En tout cas, pendant qu’ils y sont encore…
Source : L’Alternative No.607 du 14 avril 2017
27Avril.com