Ce 27 avril 2018 marque le 60e anniversaire de la victoire électorale du 27 avril 1958 par laquelle le peuple togolais a arraché son indépendance nationale « ABLODE ! » à l’impérialisme français et à ses suppôts dans notre pays.
Le premier terrible bilan de ces 60 ans d’indépendance nous impose de constater que le peuple togolais n’en a véritablement joui que pendant les 4 ans et 9 mois écoulés depuis cette historique victoire jusqu’à la sanglante tragédie du 13 janvier 1963 qui l’a fait basculer dans les 55 ans de souffrances qu’il endure depuis lors. Cette date où le père de cette indépendance, Sylvanus OLYMPIO, fut lâchement assassiné sur les ordres de l’impérialisme français qui ne lui a jamais pardonné d’avoir dirigé la lutte qui a soustrait le Togo à sa domination coloniale.
Comment s’étonner que le programme officiel, concocté à cette occasion par les autorités togolaises, ait tout mis en œuvre pour masquer la profonde signification de cet événement en n’organisant que la commémoration du 58e anniversaire de la proclamation de notre indépendance nationale qui survint deux années après cet historique événement ? Comme si la proclamation du 27 avril 1960 aurait pu avoir lieu sans l’historique victoire du 27 avril 1958. Somme toute, ce négationnisme est compréhensible de la part d’une dynastie EYADEMA-GNASSINGBE au pouvoir, poursuivie par la honte familiale du rôle joué par son devancier, Etienne, qui, enrôlé dans les troupes coloniales françaises, excellait dans le massacre des nationalistes d’Indochine et d’Algérie combattant, eux aussi, pour leur indépendance, à l’époque où cette victoire était arrachée au Togo.
Vu l’importance d’un 60e anniversaire dans la vie d’un homme ou d’un peuple, c’est un devoir sacré de rappeler la profonde signification de cette victoire pour le passé, le présent et l’avenir alors que le peuple togolais se débat actuellement dans une situation tragique pour se libérer de la férule sanglante de cette plus que cinquantenaire dictature dynastique.
Le contexte :
La victoire électorale du 27 avril 1958 est intervenue au terme d’une lutte engagée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale dont les peuples togolais et africains sont sortis révoltés et insurgés contre les affres de l’oppression et de la surexploitation qui leur ont été imposées pendant ces six longues années (1939 – 1945) au titre de l’effort de guerre.
Menaçant de balayer la domination coloniale française dans ses colonies d’Afrique, cette insurrection des peuples a poussé celle-ci à opérer un premier recul par la concession d’un train de réformes destinées à alléger leurs souffrances, notamment par la suppression du travail forcé et de l’indigénat, puis à les associer à sa gestion à travers la création de parlements locaux.
Ce fut dès cette époque que le nationalisme togolais fit son irruption sur la scène politique en raflant la majorité des sièges lors des premières consultations électorales organisées en 1946 pour mettre en place une Assemblée représentative du Togo (ART). De 1946 à 1951, les nationalistes dominèrent les nouvelles institutions d’où ils ne furent exclus que par les fraudes électorales et la répression colonialiste organisées par les tristement célèbres gouverneurs Jean DIGO et Laurent PECHOUX.
Ainsi donc, de 1951 à 1958, ce fut une traversée du désert pour les nationalistes qui subirent une féroce répression et leur mise à l’écart des institutions jusqu’à la mascarade de référendum sur l’autonomie interne unilatéralement organisée au Togo par le pouvoir colonial français, le 28 octobre 1956, sans l’accord de l’ONU sous la tutelle de laquelle le pays avait pourtant été placé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Il s’agissait de prendre de vitesse cette institution internationale pour annexer à l’Union française le reste du territoire du Togo qui venait d’être démembré par un référendum inique organisé le 9 mai 1956, vote par lequel les peuples du Togo britannique ont été à nouveau arbitrairement séparés de leurs frères pour être rattachés à la Gold Coast à la veille de la proclamation de son indépendance où il prit le nom de Ghana, le 6 mars 1957.
27 avril 1958, une mémorable victoire électorale :
Ce fut grâce à son incessant combat, notamment auprès de l’ONU, que la coalition des partis nationalistes togolais qui rassembla autour du Comité de l’Unité togolaise (CUT), le Mouvement populaire togolais (MPT), et la Juvento, arriva à obtenir que de nouvelles élections législatives soient organisées ce 27 avril 1958. Du fait de l’important enjeu qu’il eut dans le contexte politique d’alors, cette consultation électorale eut la signification d’un référendum sur l’indépendance nationale au vu surtout des conditions mêmes de son organisation sous la supervision d’une Mission de l’ONU dirigée par Max DORSINVILLE, représentant de la République de Haïti au Conseil de tutelle, dont la présence permit de limiter les fraudes systématiquement organisées jusqu’alors par le pouvoir colonial français.
Et, ce 27 avril 1958, une remarquable organisation de la coalition nationaliste sur le terrain déjoua les multiples manœuvres et fraudes des colons français, arrivant à mobiliser le peuple togolais sur toute l’étendue du territoire national pour imposer l’éclatante victoire de l’« Ablodé ! » qui arriva, à la surprise même des nationalistes et, de l’aveu de personnalités attachées à l’ordre colonial, « avec l’ampleur d’une lame de fond » qui balaya irrémédiablement la domination française. Sur les 46 sièges de député en compétition pour la nouvelle assemblée législative, les nationalistes en raflèrent une confortable majorité de 33 !
13 janvier 1963 : la sanglante revanche de l’impérialisme français…
Après la victoire électorale du 27 avril 1958, Sylvanus OLYMPIO et ses compagnons nationalistes négocièrent la fin du régime de tutelle, la proclamation de l’indépendance deux ans plus tard, le 27 avril 1960, et l’adhésion du Togo à l’ONU qui lui conféra son accession à la souveraineté internationale avec ses attributs : drapeau, hymne, nouvelles institutions, etc.
Ils s’apprêtaient alors à prolonger la souveraineté politique ainsi acquise par la dotation du pays des attributs de sa souveraineté économique à travers la création d’une monnaie nationale. Mais cette évolution, qui allait mettre fin au contrôle de l’économie togolaise par l’impérialisme français, était envisagée avec terreur par ce dernier dont elle allait sonner le glas de la domination sur les anciennes colonies qu’il continuait à considérer comme ses chasse-gardées. Alors chef de l’Etat impérialiste français, De GAULLE, à travers les réseaux de son tristement célèbre Secrétaire d’Etat aux Affaires Africaines et Malgaches, Jacques FOCCART, fit assassiner Sylvanus OLYMPIO pour empêcher cette création monétaire, dans une sanglante revanche sur les nationalistes togolais qui, les premiers en Afrique, avaient osé arracher leur indépendance à la France coloniale.
Quel bilan ? : 55 ans d’impasse et de souffrances pour le peuple togolais !
Depuis lors, c’est un terrible bilan de 55 ans d’impasse, d’assassinats en masse, de pillage, de gabegie, de corruption et de souffrances pour le peuple qui s’impose à l’analyse de l’évolution d’une situation togolaise totalement bloquée par l’imposition de l’omnipotence d’une seule et même dynastie dictatoriale assassine sur l’ensemble des rapports sociopolitiques au Togo. Situation qui a une double cause et origine.
D’une part, ces impasse et souffrances découlent, de l’oppression et de la surexploitation que la domination de l’impérialisme, principalement français, organise à l’ombre du régime dictatorial malfaisant qu’il a mis en place et n’a jamais cessé de soutenir pour pouvoir continuer à piller systématiquement notre pays. C’est notamment ce que nous voyons actuellement avec le rebondissement, devant les tribunaux français, des affaires de corruption de la dynastie au pouvoir lors des campagnes électorales au Togo, au profit de la concession à l’homme d’affaire français BOLLORE du Port de Lomé.
D’autre part, ces impasse et souffrances n’ont véritablement jamais cessé de perdurer comme conséquences de la collaboration contre-nature de ceux-là mêmes qui se sont portés à la direction de la lutte du peuple togolais avec la sanglante dictature qui l’opprime depuis 55 ans. Cela, depuis les entreprises traîtresses de « Table ronde d’union et de réconciliation nationales » dans lesquelles nombre de compagnons de Sylvanus OLYMPIO ont sombré dans la collaboration avec ses assassins au premier rang desquels EYADEMA, au lendemain de son assassinat en 1963. Jusqu’aux 28 dialogues, négociations et accords qui se sont succédé en autant de marchés de dupes continuellement renouvelés par cette « opposition démocratique » collaborationniste pour sauver la dynastie EYADEMA-GNASSINGBE dont le peuple togolais n’a pourtant jamais cessé de chercher à se débarrasser depuis le soulèvement populaire du 5 octobre 1990. Inlassablement, la lutte de tout un peuple a été trahie, bradée, liquidée comme nous le voyons actuellement avec le mouvement engagé depuis le 19 août 2017 à l’initiative du Parti national panafricain (PNP), sombrant dans un énième « dialogue » sans issue avec la dictature dynastique assassine, sous l’égide de l’impérialisme principalement français et de dictatures sous-régionales à leur botte.
Combattre pour la reconquête de l’indépendance et de la souveraineté nationales :
Face à la situation tragique à laquelle le peuple togolais est actuellement confronté, 60 ans après la conquête de son indépendance nationale, il ne peut y avoir d’issue que dans la voie du combat pour la reconquête des véritables indépendance et souveraineté nationales jadis arrachées de haute lutte, selon les deux axes suivants :
- la mise à bas de la dictature assassine de la dynastie EYADEMA-GNASSINGBE et, dans ce cadre, la démission inconditionnelle et immédiate de son actuel représentant au sommet du pouvoir, Faure Essozimna ;
- la rupture avec l’impérialisme principalement français qui n’a jamais cessé de chercher à prolonger sa domination coloniale d’hier au Togo en œuvrant au maintien de la dynastie EYADEMA-GNASSINGBE à l’ombre de laquelle il poursuit jusqu’aujourd’hui la même entreprise de pillage impérialiste de notre pays.
Lomé, le 26 avril 2018
Pour le Parti des travailleurs,
Le Secrétaire chargé de la coordination
Claude Ameganvi
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