Thomas Dodji Koumou fait l’état général de l’économie nationale

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Après plusieurs publications et explications sur la dette du Togo qui crève les plafonds, et sur l’économie togolaise en général, mise à genou par les dirigeants qui se vautrent dans la mauvaise gouvernance, l’expert en économie et président de l’association « Veille Economique » revient avec la « situation du Togo à l’état actuel des événements ». Lecture !

Nous allons clôturer cette série de publications sur les ressources qu’utilisent nos gouvernants pour diriger le pays, par une brève présentation sur notre dette publique. Nous rappelons que suite à la signature du FEC (Facilité Elargie de Crédit) avec les gouvernants, le FMI a indiqué que la dette publique de notre pays est évaluée à la fin de l’année 2016 à 80% du PIB avec un pic à 81% à la fin de 2017. Cela représente plus de 2 260 milliards de FCFA de dette publique lorsque nous considérons le niveau de PIB donné par les gouvernants pour fin 2017.

Quelle est en réalité la situation du Togo au stade actuel des évènements ?

Selon le Budget 2017, le Togo attend des ressources propres de 681,27 milliards de FCFA. Nos dépenses en personnel (masse salariale) sont évaluées à 191,63 milliards de FCFA. Nos dépenses en matériels (fonctionnement de la fonction publique) sont évaluées à 168,75 milliards de FCFA. Les subventions de l’état sont estimées à 112,8 milliards de FCFA. Ces trois postes du budget constituent les dépenses primaires, vitales pour le fonctionnement normal du pays. Les dépenses primaires sont ainsi évaluées dans le budget 2017 à 473,18 milliards de FCFA. Lorsque vous déduisez cette somme des 681,27 milliards de FCFA, vous obtenez 208,09 milliards de FCFA.

A côté de ces dépenses primaires, nous avons des dépenses en investissement qui sont évaluées à 310,27 milliards de FCFA, les dépenses pour les intérêts sur la dette qui sont évaluées à 56,35 milliards de FCFA, les dépenses en amortissement de la dette qui sont évaluées à 378,92 milliards de FCFA. Le total de ces postes de dépense nous donne 745,54 milliards de FCFA. Lorsque vous comparez cette somme aux 208,09 milliards de FCFA, on constate que le Togo doit rechercher 537,45 milliards de FCFA. C’est quasiment notre déficit budgétaire. Lorsque vous rapportez ce montant à notre PIB, vous obtenez 18,95%.

Pour vous éclairer davantage, nous allons faire le raisonnement de bas en haut. Supposons que nous avons pour obligation de payer notre dette (les échéanciers de 2017) afin de ne plus avoir des arriérés de dette. Il nous faut payer 378,92 + 56,35 milliards de FCFA soit 435,27 milliards de FCFA pour 2017. Il nous restera sur nos propres ressources 246 milliards de FCFA. Il faut payer les salaires pour 191,63 milliards de FCFA. Il nous reste des 246 milliards de FCFA 54,37 milliards de FCFA. Nous devons faire fonctionner l’administration publique avec 168,75 milliards de FCFA. Il nous reste des 54,37 milliards de FCFA – 114,38 milliards de FCFA. J’ai l’impression que notre argent est fini et il nous faut déjà à ce stade trouver 114, 38 milliards de FCFA. Alors qu’il nous reste les dépenses liées aux subventions et les dépenses d’investissement. Je comprends pourquoi les hôpitaux publics souffrent.

J’imagine aisément qu’à ce stade de ce simple raisonnement tout le monde comprend pourquoi il ne faut pas s’endetter pour acheter du chocolat.

Et pourtant c’est exactement ce que nos gouvernants ont fait. C’est la raison pour laquelle nous disons que le pays se trouve dans une situation de quasi insoutenabilité de la dette. Voilà pourquoi en économie nous disons que le Togo finance sa dette avec de la dette. Puisque pour combler ce trou, nous avons recours aux partenaires et bailleurs de fonds pour aller chercher entre autres de la dette. A titre d’exemple dans le budget 2017, les gouvernants prévoient pour les emprunts projets, les emprunts et les emprunts obligataires respectivement, 127,98+156,89+127,30= 412,17 milliards de FCFA de nouvelles dettes. Nous allons payer 378,92 milliards de FCFA et contracter 412,1 milliards de FCFA.

Il parait que le FMI aurait décrété un blocus sur les nouveaux endettements. On verra bien.

Examinons à présent l’évolution de la situation sur les trois dernières années.

Nous sommes passés de 33,15 milliards de FCFA d’intérêts sur la dette en 2015 à 56,35 milliards de FCFA en 2017, soit une progression de 69,98% en trois ans. Nous sommes passés de 90,20 milliards de FCFA d’amortissement de la dette en 2015 à 378,92 milliards en 2017 soit une progression de 320% en trois ans. En terme de déficit budgétaire, nous sommes passés d’un déficit de 258,06 milliards de FCFA en 2015 soit 10,48% du PIB, à 371,78 milliards de FCFA en 2016 soit 14,07% du PIB puis à 537,45 milliards de FCFA en 2017 soit environ 19% du PIB. C’est dans ces conditions que nous apprenons qu’il y a un processus de réévaluation de notre Produit Intérieur Brut. Si ceci est avéré, je me demande ce qu’un tel bricolage changera à la situation actuelle du pays. Au lieu de penser à faire progresser rapidement les ressources propres du pays, on préfère modifier les ratios de structure par une réévaluation du PIB et engager le pays dans un autre trou noir par une augmentation insensée de la dette publique. Ceci est d’autant plus dangereux que cette situation est gérée par les mêmes gouvernants.

Le remboursement de notre dette passe nécessairement par la réduction de notre déficit budgétaire. Ce dernier ne peut être réduit que s’il y a une véritable maitrise des dépenses couplée avec une nette augmentation des ressources propres du pays. Ceci permettrait également l’amélioration du solde primaire ainsi que de la balance des paiements.

Il est clair que celui qui n’a pas été capable de faire la différence entre fog et gof (loi de composition interne), ne peut pas résoudre un problème à double ou à triple intégrale (∬ ou ∭). Celui qui n’a pas été capable de faire la différence entre attribut et épithète (classe de 4ème et 3ème), ne peut pas résoudre un problème de nature et culture ou de conscient – inconscient.

Je vais finir en disant à nos compatriotes que toute souffrance est sacrée.

Je vous souhaite à tous une bonne fin de semaine.

Puisse la Divine providence veiller sur nous et marcher à nos côtés.

Thomas Dodji Nettey KOUMOU
Veille Economique

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