Taxe d’habitation: la cerise sur le gâteau de Faure Gnassingbé?

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C’est le comble. Le bouquet final pour parfaire la rançon de
la prise d’otage. Le Togolais dont la vie consiste, tous les jours, à
tirer le diable par la queue se doit de payer une taxe d’habitation. Il
en est tenu, lui qui ne trouve même plus de diable à tirer, s’il veut
jouir du seul droit que l’État devenu fou lui garantit, le droit de
dormir. Une sorte d’Impôt sur le sommeil! Dans un contexte de
grandissime corruption, c’est un coup de massue. Fâcheux. Si l’on sait
que sous la gouvernance Faure, c’est l’argent public qui enrichit le
plus. Des individus sans scrupule, ses proches, impunément, s’en mettent
plein les poches. Lorsque ces voleurs, les soirs, sont libres de dormir
dans leurs somptueuses villas privées construites avec l’argent public,
au nez et à la barbe des juges eux aussi corrompus, au vu et au su des
(soi-disant) élus du peuple, on peut voir dans cette taxe d’habitation,
non pas une charge citoyenne mais un indu, un frais d’entretien du
non-État, de l’État de non-droit. Mais n’allons pas croire que les
insupportables douleurs de cette taxe vont troubler l’âme du Togolais.
Non! Parce qu’il est soumis, parce qu’il sait vivre du peu, presque de
rien.

Lire aussi: Taxe d’habitation: les Togolais remontés contre l’OTR

Les recettes fiscales sont primordiales pour le développement durable
car elles donnent à l’État les ressources nécessaires à
l’investissement dans le développement, la réduction de la pauvreté et
la fourniture de services publics, ainsi que dans le renforcement des
capacités de l’État, de sa redevabilité et de son aptitude à répondre
aux attentes des citoyens. Nous sommes un pays pauvre, pour ne pas dire
un pays en voie de sous-développement. Et, pour bâtir une économie
prospère, attirer les entreprises, créer des emplois et éradiquer la
pauvreté, il faut une gouvernance qui, avec les taxes bien gérées,
renforce les capacités de l’État et étoffe ses infrastructures. La
fiscalité, c’est le levier du développement. Il faut, pour cela, lutter
de façon hardie contre la corruption et instaurer un système financier
transparent. Car, une taxe qui enrichit quelques privilégiés couverts
par le pouvoir au lieu de renflouer les caisses publiques est une
arnaque pure et simple. Où en est le Togo dans ces prescriptions de
l’OCDE? Omerta totale, nous sommes dans un régime fiscal informel.

Sous le ciel Togolais, tout est coiffe par le mensonge. Annonces
d’investissement et pauses de premières pierres sont mensongères. A des
fins politiques. Mme les projets qui connaissent un début d’exécution
sont minés par la corruption, donnant lieu à des ouvrages finis au
rabais. Ici, « on vole à ciel ouvert », en plein jour, parfois devant
témoins. Des deux mains, on puise dans les deniers publics. La simple
proximité avec le pouvoir ou avec la chaîne de commande militaire
suffit. Dans l’impunité totale, des milliards s’évaporent avant même que
les projets ne commencent. Conséquence, en dehors de la capitale, Lomé,
qui mérite le statut d’une ville, toutes les contrées du pays ont le
visage rabougri, tels des bourgs laissés à l’abandon, désertiques, sans
attrait, où tout manque, l’eau courant notamment. Dans ces villes,
l’accès aux infrastructures de base relève plutôt d’un luxe hors de
portée. Et pourtant, commerçants et vendeurs des marchés, partout dans
ces mêmes localités arides, voient leurs maigres revenus journaliers
ponctionnés. Sur les routes, gendarmes et policiers ne sont pas en
reste. De faux tickets (reçus) sont émis aux fins d’empocher l’argent
collectes ? Le peu d’argent qui rentre dans les caisses publiques est à
son tour malmené, transvasé avec grands éclats de rire.

Lire aussi: Taxe d’habitation: ce qu’il faut savoir sur les tarifs annoncés par l’OTR

Les habitants d’Adidogomé, leurs voisins d’Amadahomé et de Ségbé, ont
de quoi hurler leur rage sur l’état apocalyptique des routes qui les
desservent. Où va l’argent du péage installé au nord d’Adidogomé sur la
nationale Café-Cacao communément appelé route de Kpalimé? Pourquoi au
Togo, même le péage ne peut pas remplir sa mission: améliorer les
circuits routiers? Et pourtant ce péage constitue un droit de passage
qui se lève pour servir à la construction d’une chaussée, d’un pont ou
pour leur entretien? Où vont les fonds levés tous les jours et à
longueur de journées aux points de péage? Toujours à l’entretien de
notre fameuse armée pléthorique et budgétivore?

A titre d’exemple, le chef de la délégation (Maire) de Lomé peut-il
dire aux habitants de la capitale comment a été financièrement gérée sa
ville pendant ces dix dernières années? Chez nous au Togo, la liste des
scandales financiers s’étend à perte de vue: pillage, détournements,
corruption à grande échelle, retro-commission … en toute impunité.
Doit-on rappeler aux griots et indéfectibles soutiens du trône qui, tels
de beaux diables, se démènent dans la défense du régime que les impôts
ont pour but de renflouer les caisses de l’État et non les poches des
individus? L’argent public se respecte. On détourne dans tous les pays
mais quand le voleur est pris, il va en prison et ses biens frauduleux
sont saisis. Doit-on rappeler: les 26 milliards de francs disparus dans le projet de construction de la route Lomé-Vogan-Anfoin,
les 600 millions détournés sur le financement de la CAN 2017, les 10
milliards du projet Santé BIDC, les 6 milliards disparus de la CNSS sous
l’ancien Directeur Général, les 118 815 moustiquaires imprégnées
détournées soit l’équivalent à 400 millions F CFA? Sans oublier
l’ardoise des 20 milliards a la CEET, les pots aux roses découverts au
CHU dans l’achat de scanners, la mise a sac de Togotelecom en 2010

…. la liste est longue. Très longue, mais personne n’est puni. Et c’est
justement cet état de chose qui rend contestable, injuste, voire
illégale la taxe d’habitation. En son temps, Eyadema emprisonnait les
voleurs de grande ampleur. L’ancien Maire de Lomé, Amouzouvi Akakpo,
universitaire, a fait la prison, 2001-2004, pour avoir frauduleusement
soutire des centaines de millions des ressources communales.

Paradoxe des paradoxes, les juges, sous Faure, n’emprisonnent que les
auteurs de larcins et de contestations politiques mineures. Le
contribuable togolais à qui l’OTR impose la taxe d’habitation a droit à
ces chapitres qu’aucun citoyen intelligent ne peut traiter par
l’indulgence. Les Togolais, vont-ils escalader la peur pour briser
l’onerta familiale et soumettre à un jugement sans concession ceux qui
s’en donnent à cœur joie dans le détournement des deniers publics? En
Occident, le contribuable jouit des fruits des taxes qu’il paie: routes,
éclairage public, autoroute, police, sapeurs pompiers, centres de
santé, écoles … etc. Au Togo, Chacun est bien fondé, aujourd’hui, pour
mieux comprendre la destination de la nouvelle taxe, de voir le fond de
la boîte de Pandore.

Lire aussi: Togo: ce qu’il faut savoir sur la Taxe sur les Véhicules à Moteurs

Malheureusement, les Togolais, incapables de s’organiser pour
mettre hors d’état de nuire les prébendiers de la république vont se
morfondre mais iront payer cette nouvelle taxe
. Leur psychodrame va se poursuivre.
Au fil des ans, parce que le Togolais a pris son mal en patience. Parce
qu’il a appris à rebondir, à s’adapter aux situations. Même les plus
désespérées. Les violentes intrusions dans ses espaces de liberté déjà
étroits, il les encaisse, taisant ses affreuses douleurs. Ses misères,
il jongle avec, se contentant du minimum, en bon peuple du peu, histoire
de maintenir le moral. Quand son train-train quotidien est des plus
rudes, il regarde le ciel, le Togolais. Il a fait de la débrouille sa
seconde nature, de la résilience, sa principale qualité.

Ça fait longtemps que cela dure. Cinquante ans au bas mot. Mais il
fait semblant de garder espoir, le Togolais. Que les choses vont être
mieux. Très bientôt. Même devant le sentiment qu’à défaut de gouverner
pour le futur, le pouvoir fanfaron ne travaille que pour entretenir le
train de vie de quelques riches, lesquels baignent dans un luxe
ostentatoire et indécent qui choque. Oui, des fois, et même trop
souvent, le Togolais se confie au ciel d’où, sans raison valable, il
attend une sorte de plan miracle. Même si, depuis cinquante ans que son
calvaire dure, le « Tout-puissant d’en haut » ne donne aucun signe de
vie ou semble occupé à autre chose sous d’autres cieux. C’est à
se demander si cette nation togolaise n’est pas victime d’un maudit sort
pour avoir commis le blasphème de vénérer en lieu et place de Dieu, des
décennies entières, un monstre qui a passé son règne dans le déni total
de chacun des dix commandements
. Aujourd’hui, il doit s’en
rendre compte, le Togolais, que le Père céleste n’aime pas le peuple
faible et sans génie, qu’il punit par son silence le peuple qui languit
sous le syndrome de Stockholm.

Le Togo est, au plan mondial, en tête de liste des pays du mal-vivre.
Jusqu’à quand le Togolais va-t-il continuer de supporter la tactique de
la terre brûlée de ses gouvernants, de regarder, le ventre à moitié
vide ou totalement creux, les gens d’en haut couler du champagne au
rythme nargueur d’un progrès qui, en réalité, n’en est pas un ? Jusqu’à
quand le Togolais va-t-il continuer de débourser des tonnes d’énergies
avant de maintenir le cœur en activité dans sa poitrine, avant de se
chausser, se vêtir, boire de l’eau fraîche, bref vivre comme un homme
normal? Enfin, la taxe d’habitation sera versée, dit-on, aux
collectivités locales décentralisées. Question: est ce que tous les
contours politiques de la décentralisation sont définitivement connus,
consensuellement acceptes par tous et largement expliques aux
populations? C’est une autre paire de manche.

Kodjo Epou
Washington DC
USA

Source : Togoweb.net