Les ayants-droits de feu Augustino de Souza Gazozo ne s’accordent pas sur ses biens. Une guerre oppose deux parties autour de la gestion confiée au notaire Me Aquereburu-d’Almeida Madjé, qui se fonde sur l’appui d’une partie pour continuer à gérer tandis que l’autre lui dénie ce droit.
21 décembre 2015. La partie constituée de Nati de Souza, Augustin Coco, Ayabavi de Souza, Essann Bruce, Ayi Ajavon, Francisca de Souza, Rosemonde Akpokli, Kueiaue Folly assistés de leur avocat, Me E. Edorh, pensait avoir remporté une bataille judiciaire qui a duré plusieurs années et qui l’oppose au notaire Me Aquereburu-d’Almeyda Madjé, administrateur et liquidateur des biens de feu Augustino de Souza Gazozo. Sa gestion est décriée par ces héritiers et le Tribunal de première instance de première classe de Lomé a ordonné sa révocation. Elle était assistée de son conseil Me Gakpo. Mais la décision n’est toujours pas appliquée. L’autre partie la conteste.
« Ordonnons la révocation pure et simple de la requise ; lui ordonnons en outre de procéder dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente ordonnance, à la reddition de compte de sa gestion des biens de ladite succession depuis nomination jusqu’à ce jour ; désignons maître Kadjaka-Abougnima Molgah, notaire à Lomé, à l’effet de poursuivre l’administration et la liquidation de ladite succession ; confirmons le juge commissaire dans ses fonctions », lit-on dans sa décision du 21 décembre 2015. En clair, la justice a dessaisi Me Aquereburu-d’Almeida Madjé, administrateur et liquidateur des biens de feu Augustino de Souza Gazozo. Me Kadjaka-Abougnima Molgah est désignée pour la remplacer. Mais cette dernière n’est jamais rentrée dans ses fonctions. Et pour cause, un nouveau round judiciaire s’est ouvert. La notaire Aquereburu-d’AlmeidaMadjé a fait appel. A l’en croire, la majorité des héritiers lui a demandé d’ester contre la décision. Et depuis, les deux parties vont de procès en procès et de report, en report rendant impossible toute voie de conciliation.
La version des deux parties
Pour les héritiers dont Me E. Edorh est le conseil, il y a un imbroglio dans cette affaire qui traîne encore en justice. Ils ne comprennent pas pourquoi cette affaire peut y être encore pendante.
La partie composée de Nati de Souza, Augustin Coco, Ayabavi de Souza, Essan Bruce, Ayi Ajavon, Francisca de Souza, Rosemonde Akpokli, Kueiaue Folly qui conteste la gestion de Me Aquereburu-d’Almeida Madjé voit dans ce feuilleton une cabale tendant à différer la décision rendue par le Tribunal de première instance de première classe de Lomé. Elle estime que l’autre partie fait du dilatoire. « Attendu qu’il ressort clairement des déclarations contradictoires des parties et surtout des pièces du dossier que contrairement à ses prétentions, la requise ne s’est point conformée à sa mission contenue dans l’ordonnance qui la nommait », relève le fond du dossier. Il précise qu’ « après 04 années de co-gestion des maîtres Wilson-Bahun Têtê ; que prenant en compte ces griefs, le Président du Tribunal de céans a, par ordonnance de référé N°900/2006 rendue le 24 octobre 2006, ordonné la révocation de maître Wilson-Bahun Têtê, laissant maître Aquereburu-d’Almeida Madjé seule dans les fonctions d’administrateur et de liquidateur de la succession ».
Mais depuis la nomination de Me Aquereburu-d’Almeida Madjé, plusieurs irrégularités ont été constatées. «…Malheureusement, constat est fait aujourd’hui que celle-ci ne fait pas mieux que l’autre ; que l’administration et la gestion des biens de la succession sont laissées, sans aucun contrôle et compte rendu, à la merci de maître Aquereburu-d’Almeida Madjé qui s’oppose à toute initiative prise par les héritiers ; que seul le rapport de gestion fait en 2010 sur la période allant du 07 février 2007 au 31 décembre 2010, depuis sa nomination en 2006, recèle plusieurs anomalies ; que depuis 2006, elle n’a jamais convoqué d’assemblée générale des héritiers alors même que cette exigence est de règle ; qu’aujourd’hui, force est de constater qu’elle rechigne elle aussi à rendre compte à la succession comme le lui demandent l’ordonnance 2002, les textes en vigueur ainsi que les héritiers ; qu’aussi, les rapports trimestriels auxquels l’ordonnance susvisée l’astreint n’ont jamais été faits par maître Aquereburu-d’Almeida Madjé», mentionne la décision.
Outre cela, il y est indiqué que « même depuis la nomination d’un juge commissaire; que les ordonnances N°2844/2013 du 08 octobre 2013 et 3244/2013 du 18 décembre 2013 prises à pied de requête par le Président du Tribunal de Lomé ordonnant à maître Aquereburu-d’Almeida Madjé de faire la reddition des comptes de sa gestion et désignant messieurs Tomety Evariste Tata et Kuevidjin Michel, experts comptables avec pour mission de faire la lumière sur la situation patrimoniale et financière de la succession ainsi que la régularité et la sincérité des comptes que le notaire dressera dans le cadre des opérations de reddition de compte (…) » n’ont pas été traduites dans les faits.
Sur la forme aussi, le Tribunal a statué qu’« Attendu par ailleurs que l’action des requérants a été dans les forme et délai prévus par la loi ; qu’elle est donc régulière et partant recevable ». Se fondant sur la forme comme sur le fond du dossier, les héritiers (les clients de Me Edorh) estiment que la justice a débouté Me Gakpo et sa cliente Me Aquereburu-d’Almeida Madjé et qu’ils devraient rapidement trouver un autre administrateur comme ils le souhaitent. Mais, ils devront attendre, puisque la décision a fait l’objet d’un appel de la part du gestionnaire. Pour elle, cette action en justice est l’œuvre d’une minorité des héritiers. La majorité ne serait pas d’accord avec elle et l’a mandatée de faire appel.Toutefois, elle apporte sa version.
« En réalité, je n’ai pu prendre effectivement fonction qu’au mois de mai 2007 car, compte tenu des conflits judiciaires, mon confrère Me Wilson-Bahun avait refusé de me transmettre le rapport de l’inventaire du titre foncier N°52 et celui de l’inventaire des biens immobiliers se trouvant au Centre-ville de Lomé et à l’intérieur du pays, nonobstant mes nombreuses lettres de relance dont celle du 23 avril 2007, j’ai quand même entre-temps et dans des conditions extrêmement difficiles, réussi à faire l’état des comptes bancaires de la succession », explique Me Aquereburu-d’Almeida Madjé qui précise qu’elle a fait « l’inventaire global ou la masse des biens » et même dressé un projet de partage partiel qu’elle a fait « notifier à tous les héritiers des 29 branches de la succession ou à leurs représentants suivant exploit d’huissier en dates des 03 et 17 juillet 2009 » moins de deux ans après sa prise de fonction.
Me Aquereburu-d’Almeida Madjé indexe une minorité des successeurs de feu Augustin de Souza Gazozo qui ne lui a pas rendu la tâche facile. Car elle estime que ces héritiers ont gardé par-devers eux « des immeubles successoraux qu’ils ont loués pour leur propre compte et à leur seul profit » et se sont constitués « en une coalition anti-partage, pour s’opposer à ce projet par tous les moyens y compris la force malgré les ordonnances de référé sur assignation N°0236/2007 et 0164/2008 rendues respectivement les 05 avril 2007 et 20 mars 2008 par le Président du Tribunal de première instance de Lomé, l’ordonnance de référé d’Appel N°167/08 du 09 juillet 2008 et l’ordonnance à bas de requête N°1288/2009 rendue le 10 juillet 2009 par le juge commissaire Kobauyah Kpatcha-Tchamdja ». Aussi se justifie-t-elle que « Malgré cette situation délétère marquée par des relations interpersonnelles compliquées entre les héritiers de la succession, issus parfois d’une même branche », elle a fait sa mission et établi « un rapport de gestion des années 2007, 2008, 2009 et 2010 suivi du rapport financier du Cabinet ICS et de ses annexes qu’elle remis à tous les héritiers des 29 branches de la succession ou à leurs représentants suivant exploit d’huissier du 09 février 2012 ».
L’administrateur des biens de feu Augustino de Souza Gazozo estime qu’ « Il est absolument faux de prétendre que c’est elle qui refuse de procéder au partage partiel ». Elle parle plutôt d’injustice. « Ce qui est injuste, c’est que cette minorité d’héritiers qui constitue la coalition anti-partage, continue de percevoir, à l’instar des autres héritiers, les pensions. En outre, je n’ai jamais refusé de coopérer avec quelque héritier que ce soit en vue de trouver des solutions idoines à l’aboutissement du projet de partage partiel des immeubles ».
de Souza contre de Souza ?
Il apparaît qu’une bataille judiciaire rangée oppose les héritiers de feu Augustino de Souza Gazozo. Chaque camp accuse. La partie de Me Edorh voit des collusions suspectes de certains de leurs frères avec Me Aquereburu-d’Almeida Madjé. A les en croire, cette situation profite à l’administrateur. Mais cette dernière pense plutôt le contraire, que c’est la minorité qui fait feu de tout bois. « Il échet que ces héritiers confiscateurs sont ceux-là mêmes qui ont initié plusieurs procédures en vue du blocage de l’exécution des décisions de justice rendues, du partage partiel et surtout de ma révocation », se défend-elle. Alors que l’autre brandit la décision de justice qui l’a déboutée.« …La requise ne s’est point conformée à sa mission contenue dans l’ordonnance qui la nommait et s’est permis, en complicité avec certains héritiers, de procéder à une gestion opaque des biens de la succession au détriment de la grande majorité (…) », mentionne la décision du Tribunal de première instance de première classe de Lomé rendue le 21 décembre 2015.
Tout compte, ce feuilleton judiciaire est loin d’être terminé. Des biens légués par feu Augustino de Souza Gazozo semblent aiguiser des appétits de tous ordres. C’est la caverne d’Ali Baba. L’héritage continue d’alimenter une intrigue familiale. Jusqu’à quand ?
A suivre.
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