La start-up suisse spécialisée dans la médecine et les données génomiques s’ouvre sur l’Afrique, grâce à des partenariats avec une demi-douzaine de centres médicaux installés sur le continent.
Créé en 2011, au Parc d’innovation de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et basé à St-Sulpice, en Suisse, Sophia Genetics propose aux centres médicaux sa plateforme analytique Sophia DDM pour l’analyse de l’information génomique des patients grâce à l’intelligence artificielle.
Interrogé par Jeune Afrique, le Français Jurgi Camblong, docteur en sciences de la vie (Université de Genève) et co-fondateur de Sophia Genetics, explique que « le séquençage de l’information génomique à haut débit et son analyse permettent d’identifier les causes de la maladie et non plus seulement ses conséquences ».
Après un démarrage centré sur les centres médicaux et hôpitaux d’Europe occidentale, Sophia Genetics a étendu son réseau à l’Europe de l’Est, à l’Amérique latine et désormais au continent africain. Environ 257 centres médicaux à travers 45 pays utilisent la plateforme Sophia DDM, qui permet de mutualiser les données et le savoir accumulé au fil des recherches.
Six affiliations africaines
Six centres africains sont affiliés ou en cours d’affiliation avec la start-up suisse : au Maroc, le Centre d’oncologie Al Azhar, le Centre de biologie Riad et ImmCell (Rabat), PharmaProcess (Casablanca), en Afrique du Sud le centre CPGR Artisan Biomed (Cape Town), et, dernière recrue en date, l’Hôpital de district de Bonassama, au Cameroun. Sur le continent, l’entreprise travaille directement avec les hôpitaux et quatre experts couvrant l’Afrique du Sud, le Cameroun et le Maroc.
L’utilité des études ADN dans la détection des prédispositions héréditaires pour certaines maladies – notamment le cancer du sein – est reconnue. Toutefois, rappelle une étude de l’International Journal of Breast Cancer, 96% des sujets inclus dans les études d’associations pangénomiques (identification des gènes et des biomarqueurs associés à des maladies communes) sont d’ascendance européenne. Par ailleurs, poursuivent les auteurs, la diversité génétique des populations africaines est plus élevée, ce qui « exige une différenciation des sous-populations dans l’étude des déterminants génétiques de la santé ».
« Le séquençage de l’information génomique permet de détecter des prédispositions génétiques à certaines maladies héréditaires et à certains cancers, mais également d’identifier les causes précises d’un cancer, afin de proposer un traitement ciblé », ajoute l’entrepreneur français. Entre un coût de traitement du cancer souvent supérieur à 100 000 dollars et une analyse sur la plateforme Sophia DDM de l’ordre de 500 à 600 dollars, le calcul est vite fait, avancent les responsables de la start-up suisse.
33 millions de dollars levés
Contacté par Jeune Afrique, le Docteur Hicham Mansour du Centre d’oncologie Al Azhar rappelle que le partenariat avec Sophia Genetics est en phase préliminaire. Il souligne toutefois que la technologie mise au point par Sophia Genetics « propose des solutions permettant un traitement plus facile et à moindre coût », comparé à ceux proposés par la concurrence.
Créé en 1994, Al Azhar propose des tests génétiques à des patients originaires du Maroc et d’autres pays africains (Mauritanie, Gabon, Sénégal, Cameroun et bientôt Côte d’Ivoire).
Co-fondé par Jurgi Camblong, Pierre Hutter (docteur en génétique, Université d’Édimbourg) et Lars Steinmetz, professeur de génétique à Stanford, Sophia Genetics a récolté près de 33 millions de dollars auprès de spécialistes européens et américains du capital-investissement.
En 2014, 5 000 profils génomiques ont été analysés via sa plateforme. Ce nombre a crû à 27 000 en 2015, 80 000 en 2016 et 100 000 fin mars 2017. L’objectif est d’atteindre 1 million de profils d’ici 2020. Sophia Genetics compte 130 employés, dont 60 au siège.
Jeune Afrique