Start-up africaine de la semaine : un triporteur marocain pour remplacer motos et mobylettes

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Installé à Kénitra, au Maroc, Brahim Belghiti veut partir à la conquête des routes africaines avec son triporteur robuste, capable de porter de lourdes charges.

Un immeuble de bureau à Kénitra : des plans étalés sur une table où apparaît un rectangle en 3D bordé de toutes sortes de mesures. Dans un coin de la pièce, des roues de cycles, pneus épais noirs ou blanc et des jantes brillantes. L’équipe Pickalty, qui peaufine son projet de triporteur, est à pied d’œuvre.

Il y a Brahim Belghiti, le fondateur de la start-up, un stagiaire de l’ENSET (École nationale supérieure de l’enseignement technique) de Rabat, et une personne en charge du volet administratif. « Trois sous-traitants munis d’un cahier des charges et qu’on a mis en concurrence ont livré des prototypes, explique Brahim Belghiti, mais je ne suis pas satisfait, même si ça passe pour un œil non entraîné… »

Verdict : retour à l’atelier, les industriels devront remettre l’ouvrage sur le métier. « On essaie de faire en 3-4 mois ce qui prend d’habitude 1 à 2 ans. Il faut que le modèle évite à tout prix les retours pour non conformité ou problèmes techniques ». Avec un prix de vente de 12 000 dirhams (1 000 euros), Pickalty veut séduire une clientèle qui, aujourd’hui, doit débourser entre 20 et 30 000 dirhams pour un modèle à moteur d’entrée de gamme.

Une unité de production à Kénitra

Pickalty envisage à terme d’ouvrir une unité de production à Kénitra. D’ici là, des entreprises locales seront chargées de fabriquer le triporteur. Installé depuis six mois dans cette ville moyenne au nord de Rabat, Brahim Belghiti souligne que le marché est porteur. Le véhicule qu’il est en train de développer pourra transporter jusqu’à 300 kilos de charge, grâce à une caisse située à l’avant.

« On recense environ 280 000 deux-roues au Maroc, sans compter ceux qui ne sont pas enregistrés, ça fait 1% de la population [qui compte 34 millions d’habitants]. Dans un premier temps on vise les projets populaires, professionnels ou privés. Les petits vendeurs, le transport de marchandises ou même un service de messagerie urbain, par exemple. » À terme d’autres utilisations sont envisagées, comme les loisirs et le tourisme.

Un tripoteur c’est quand même plus sûr que devoir transporter un agneau en mobylette.

Avec la mise en œuvre de la réglementation sur les deux-roues au Maroc, qui impose leur identification, « Pickalty sera la seule alternative », estime le jeune dirigeant, qui se dit frappé par les prises de risques qu’il constate sur les routes marocaines : « Un tripoteur c’est quand même plus sûr que devoir transporter un agneau en mobylette. »

Originaire de Tiznit, aux portes du Sahara, Brahim Belghiti arrive en France à l’âge de huit mois. Sa famille est alors installée à Denain, dans le Nord, en plein bassin minier, une ville frappée de plein fouet par le déclin de l’industrie de l’acier.

Après avoir passé son baccalauréat en génie mécanique, il suit un BTS technicien commercial. Il travaille ensuite comme mécanicien dans l’industrie et enchaîne les postes en intérim.

Depuis un premier contrat de professionnalisation, il poursuit, en parallèle de ses activités entrepreneuriales, sa carrière en conseil auprès de grands groupes dans de nombreux secteurs, Hamon, Altran, Alstom, Clemessy Nucléaire, L’Oréal… Il est aujourd’hui engagé auprès de Kelvion, un des leaders mondiaux des échangeurs thermiques.

Sans parler de malimousine.fr, site de location de limousines haute gamme, récompensé par plusieurs prix, dont il est également à l’origine.

Levée de fonds de 3 à 4 millions de dirhams

Mais pour Pickalty, désormais, « l’objectif est de réussir à rassembler 3 à 4 millions de dirhams, si on arrive à lever 50% ce sera parfait », évalue Brahim Belghiti. Le reste sera un apport personnel. La start-up aimerait être présente au prochain salon Pollutec. À terme, le dirigeant se voit bien investir l’Atlantic Free Zone, la zone franche de Kénitra.

Et table sur l’effet d’entraînement des politiques actives menées par le Maroc en terme d’énergies propres et de l’élan insufflé par la COP22 de Marrakech.

Une fois construite, l’unité de production de Kénitra devrait produire 10 000 triporteurs par an dès 2018, 20 000 à partir de 2020. Brahim Belghiti voit bien son Pickalty rouler au-delà du marché marocain : « J’aimerais exporter en Espagne et en Europe du Sud, mais ce sont surtout les marchés africains qui me paraissent très prometteurs. »

Jeune Afrique