Le 24 mai 2017 Faure Gnassingbé se rend au Gabon pour rencontrer son homologue dictateur de ce pays frère. Et comme les dictateurs font ce qu´ils veulent quand ils le veulent, nous ne saurons jamais s´il s´agit d´une visite privée ou officielle, car à son retour à Lomé il ne rendra compte à personne, ni sur les dépenses effectuées, ni sur l´objet de son voyage. Et c´est ça qui confère le caractère totalitaire aux régimes comme celui du Togo incarné par Gnassingbé depuis un demi-siècle.
Mais ce n´est pas ce volet du voyage qui nous intéresse ici. Revenons à l´aéroport de Libreville pour retrouver Faure Gnassinbgé accueilli par Ali Bongo, un autre fils de son père, le maître du Gabon. Au sein de ce petit monde venu pour aider à dire bienvenue au président du Togo, il y a deux groupes de togolais: d´une part des togolais qui brandissent des drapelets aux couleurs de notre pays, chantant les éloges du président qui se sent désormais plus à l´aise à l´étranger qu´au Togo. Les compatriotes de ce groupe s´agitent pour se faire voir. Histoire de ne pas se faire oublier au moment du partage du butin que laissera Faure Gnassingbé.
D´autre part, un deuxième groupe de togolais que l´argent de Faure n´intéresse pas; eux sont venus pour lui signifier leur ras-le-bol comme leurs compatriotes le font depuis août 2017 au pays. Ils veulent se faire entendre et écrire leur part de l´histoire. Malgré la présence des forces de l´ordre, un petit groupe sort du lot en brandissant certains de ces slogans qui font faire à Faure Gnassingbé des nuits blanches depuis plusieurs mois. Les manifestants se sont tellement approchés du cortège que les deux dictateurs, l´accueillant et l´accueilli, ont dû lire ces phrases assassines qui demandent à l´ »homme simple » du Togo de quitter le pouvoir, que 50 ans ça suffit.
Crime de lèse-majesté! Faure Gnassingbé humilié devant Ali Bongo; lui qui fuyait les mêmes slogans hostiles au Togo pour un peu plus de tranquillité. Six manifestants sont arrêtés et emmenés par les forces de l´ordre. Il paraît que des togolais, sympathisants du RPT/UNIR, auraient joué un grand rôle pour que les meneurs soient interpellés.
Dans de pareils cas les personnes arrêtées recouvrent la liberté après quelques heures. Mais nos compatriotes ont eu la malchance de vivre dans un pays où le président a presque la même histoire, le même cheminement que leur dictateur qu´ils veulent voir partir du pouvoir. Ici la sympathie entre dictateurs en mal de légitimité est de mise.
Au lieu d´une rapide libération, nos compatriotes, incarcérés dans les locaux de la direction de la migration et du service de renseignement, ne se nourrissant que de pain, sont traîtés comme des criminels depuis plus de 10 jours, à qui on refuse quelquefois la visite des proches, et subissent un harcèlement moral de la part de leurs geoliers. Pourquoi ne les libère-t-on pas? Ou pourquoi ne les met-on pas à la disposition de la justice si quelque chose leur est reproché?
D´après nos dernières informations l´officier qui commande le lieu de détention aurait reçu une délégation de la diaspora togolaise, à laquelle il a fait voir les 6 détenus dont un est malade. Concernant leur éventuelle libération, l´officier aurait renvoyé la balle dans le camp de l´ambassadeur du Togo à Libreville. Curieux non!
Nous sommes sur le territoire gabonais et une quelconque procédure judiciaire devrait fonctionner selon la législation en vigueur au gabon, et non selon la volonté des autorités togolaises. Qui a donné l´ordre de les arrêter? Ali Bongo? Faure Gnassingbé? L´ambassadeur du Togo à Libreville? Ou bien les ficelles sont-elles tirées de très loin, depuis Lomé? Décidément les républiques bananières n´ont pas fini de nous étonner!
Comme pour tous les incarcérés au Togo depuis août 2017, la coalition des 14 partis de l´opposition et toutes les organisations de défense des droits humains au Togo et ailleurs devraient s´organiser pour obtenir la libération de nos compatriotes détenus à Libreville.
Samari Tchadjobo
Allemagne
27Avril.com