Sommet UE-Afrique à Abidjan : La crise togolaise risque de peser sur les discussions

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Sommet UE-Afrique à Abidjan : La crise togolaise risque de peser sur les discussions

La crise togolaise et le dossier de l’esclavage des Noirs en Libye et l’invitation de la RASD risquent de perturber sérieusement le sommet UE-Afrique qui se tiendra à Abidjan du 29 au 30 novembre prochain. Dans la capitale ivoirienne, le 5è sommet UE-Afrique abordera des sujets majeurs notamment l’investissement dans la jeunesse, un sujet très préoccupant lorsqu’on sait que 60% de la population africaine a moins de 25 ans. Il s’agira aussi d’aborder des sujets comme la paix et la sécurité dans un contexte de menaces terroristes ; la gouvernance, particulièrement la démocratie, les droits de l’Homme, les migrations et la mobilité ; l’investissement et le commerce ; le développement des compétences ; la création d’emplois.

Plusieurs autres manifestations se dérouleront en marge du sommet dont le 4è sommet de la jeunesse Afrique-Europe ; l’initiative « Youth plug- in » de l’Union africaine et de l’UE ; le 6è forum des affaires UE-Afrique etc. Plusieurs dirigeants africains et européens rallieront la capitale ivoirienne où d’importantes mesures de sécurité sont déjà déployées. Le Président de la République française Emmanuel Macron sera en visite le 28 novembre à Ouagadougou où il prononcera un discours à l’Université Joseph Ki-Zerbo avant de rallier Abidjan. Outre les questions à l’ordre du jour, le sommet UE-Afrique risque d’être fortement perturbé par d’autres sujets, notamment la question de l’esclavage des Noirs en Libye révélée par CNN qui suscite l’indignation sur le continent et au-delà ; l’invitation de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) qui provoque la colère de Rabat et enfin la crise politique au Togo qui inquiète la sous-région.

Depuis le 19 août, la crise a pris une autre allure avec des manifestations monstres; sur l’ensemble du territoire des populations qui exigent le retour à la Constitution de 1992, le vote de la diaspora et, à défaut, le départ pur et simple de Faure Gnassingbé à la tête du pays. Face à cette vague de contestations sans précédent, le régime cinquantenaire et autocratique de Lomé n’a d’autres solutions que la répression aveugle, les assassinats, les exactions dans plusieurs villes poussant les populations à l’exil au Ghana et ailleurs. Plus d’une vingtaine de morts déjà, plusieurs blessés, des détenus arbitraires et le siège de l’armée continue dans des villes comme Sokodé, Bafilo, Mango.

La situation préoccupe plusieurs pays de la sous-région. Les chefs d’Etat du Benin, du Ghana, de la Guinée se sont investis dans le dossier pour essayer de faire bouger les lignes. Mais à Lomé, Faure Gnassingbé est resté scotché au fauteuil présidentiel qu’il considère comme un legs familial n’envisage pas un départ du pouvoir ni maintenant, ni en 2020. Du côté de la coalition de l’opposition, la mobilisation continue et s’étend à d’autres villes et localités de l’intérieur du pays. Selon plusieurs sources diplomatiques, la France restée en arrière-plan et en soutien à une médiation africaine, avait souhaité que la crise togolaise soit réglée avant le sommet UE-Afrique prévu la semaine prochaine à Abidjan. Elle avait manifesté sa préférence à une médiation du voisin ghanéen au détriment d’Alpha Condé qui nourrit aussi des velléités de modification de la Constitution de son pays pour s’offrir un troisième mandat.

Après plusieurs jours de cafouillage et d’hésitation, la médiation du président du Ghana a commencé par prendre forme, même si Alpha Condé, président de l’Union Africaine, multiplie les initiatives pour revenir dans le jeu. La semaine dernière, le ministre de la Sécurité du Ghana, Albert Kan-Dapaah était dans la capitale togolaise pour recueillir les propositions des différents protagonistes avant l’ouverture du dialogue. Les contacts vont d’ailleurs être élargis avec d’autres acteurs politiques au Togo et en exil.

Faure Gnassingbé à Abidjan hier : Alassane Ouattara tente-t-il de désamorcer le dossier togolais avant le sommet UE-Afrique ?

Il est resté jusque-là aphone sur le dossier togolais. Et depuis la vague de contestation du 19 août, c’est le seul président que Faure Gnassingbé n’a pas rencontré dans son périple ouest-africain. Et pourtant c’est l’un des poids lourds de la CEDEAO et de l’UEMOA. Selon plusieurs sources qui ont requis l’anonymat, le président ivoirien Alassane Ouattara qui a dépêché son ministre Hamed Bakayoko à Lomé, n’aurait pas apprécié le non-respect des engagements pris par Faure Gnassingbé au lendemain de la présidentielle de 2015. En effet, en 2015, Ouattara et son homologue du Ghana John Dramani s’étaient rendus à Lomé pour apaiser la tension liée aux difficultés de proclamation des résultats.

A l’issue de ce nouveau hold-up vécu en direct sur les médias, Faure Gnassingbé a pris des engagements auprès de ses pairs pour opérer rapidement les réformes. Ces derniers se sont chargés de calmer la colère de l’opposition. Mais plus de 2 ans après, le locataire du Palais de la Marina n’a pas tenu ses engagements. Une attitude qui n’a pas du tout été appréciée du côté d’Abidjan. Depuis le 19 août, Faure Gnassingbé a donc évité la capitale ivoirienne. Quant à Alassane Ouattara, il a fait le choix d’être en retrait du dossier togolais au profit du président du Ghana. Les deux hommes se sont d’ailleurs vus au Ghana il y a quelques semaines et le dossier était parmi tant d’autres.

Depuis, les lignes n’ont pas bougé du côté de Faure Gnassingbé, même si un dialogue est en vue. Visiblement, le souhait de la France de voir le dossier togolais bouclé avant le sommet UE-Afrique la semaine prochaine ne sera pas effectif. Du coup, il faut éviter que la crise togolaise ne se transporte à Abidjan. L’invitation d’Alassane Ouattara à Faure Gnassingbé qui s’est rendu à Abidjan hier répond à ce souci, mais aussi à bien d’autres liés à la prise de parole au cours de ce sommet. Si Faure Gnassingbé, Président en exercice de la CEDEAO, devait être présent à ce sommet d’Abidjan, il devra se résoudre à certaines dispositions protocolaires du fait que la situation de son pays ne fait pas de lui une référence démocratique, encore moins un dirigeant respectueux des droits de l’Homme. Faure Gnassingbé est plus que jamais sous pression.

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