Sommet sur la Démocratie : comprendre pourquoi Joe Biden a exclu le Togo

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Le président des Etats-Unis d’Amérique, Joe Biden, n’a pas sélectionné le Togo parmi les pays avec lesquels il a organisé un « sommet de la démocratie » le 10 décembre dernier. Un symbole, selon Aminou Ben Yaya qui n’a pas manqué de réagir le 9 décembre dernier.

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Ainsi donc le Togo, pays dont le régime est toujours dans l’obsession d’être le modèle, le « bon élève » dans toutes les catégories (sauf dans l’essentiel) sera parmi les abonnés absents du sommet sur la démocratie qu’organise l’administration américaine du président Biden les 9 et 10 décembre 2021. Pas par choix, vous vous en doutez bien, mais parce que les dirigeants récoltent tout simplement ce qu’ils sèment chaque jour dans la désespérante vie de leurs concitoyens et administrés

Et pour cela, on connaît le slogan préféré des dirigeants togolais et de leurs griots: le Gondwana aussi n’a pas été invité. Une raison de dire et de se dire: on n’est pas seuls dans notre statut d’État paria. Sauf que contrairement à d’autres pays, le Togo a pendant trop longtemps porté la « marque de la bête » pour emprunter l’expression biblique, le signe qui ne trompe pas en matière de manque de démocratie. Alors que d’autres pays goûtent pour la première fois à la honte de l’étiquette « État paria », le régime militaire togolais lui en a fait une carrière.

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Avant d’aller plus loin, voyons comment les pays invités ont été choisis.

Ce n’est pas sur la base des réformes trompe-l’œil célébrées dans le machin de Doing Business, ni sur le pourcentage de l’économie nationale qu’on a bradée aux entreprises américaines, ni sur un chiffre de croissance économique qui cache l’ampleur de la pauvreté absolue et le manque d’équité dans la gouvernance.

C’est tout simplement sur la base des multiples évaluations de la gouvernance qui d’année en année placent le Togo dans la catégorie peu reluisante des « dictatures ». En d’autres termes, le gouvernement togolais peut beau crier que le Togo est un pays démocratique, un état de droit, il ne convainc que lui-même.

Prenons par exemple le classement fait par The Economist, une référence en matière d’évaluation de la gouvernance : depuis 2007, cet organe n’a cessé de classer le Togo dans la catégorie des « régimes autocratiques », expression diplomatique pour désigner une dictature. Sur le classement de 167 pays, le Togo, 164eme sur 167 pays, n’était meilleur que par rapport au Tchad, à la Centrafrique et à la Corée du Nord.

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Douze (12) ans plus tard en 2019, le Togo occupe la 127eme place, mais demeure toujours dans la catégories des dictatures. Le Togo portait une fois de plus « le signe de la bête ». Le classement de 2019 est important car il est le dernier en date avant que l’on n’assiste à un recul de la démocratie dans tout le monde entier du fait de la pandémie du Covid-19.

Pour choisir les pays participants au sommet de décembre, l’équipe de Biden a procédé à une analyse rigoureuse des évaluations de la gouvernance démocratique menées par un nombre d’organisations, au premier rang desquels Freedom House qui publie annuellement un rapport sur les types de régimes dans le monde. La majorité des pays invités soit 77 pays (ou 69%) sont classés dans la catégorie de « pays entièrement libres » dans le rapport 2021 de Freedom House ; 33 pays (soit 28%) sont des pays « partiellement libres ».

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Sauf 3 pays dans la catégorie « pays non libres » sont invités (Angola, RDC et Iraq) ; pour rappel c’est dans cette catégorie que l’on classe le Togo depuis que les militaires ont jugé bon de « confier » le pouvoir populaire qu’ils ont détourné à celui qui officie en tant que président du Togo.

L’impossibilité d’un changement à la tête de l’État est une « marque de la bête » dans le concert des nations, un symbole d’État paria, et non un signe de force ou de virilité comme certains s’évertuent à le faire croire avec des armes et des miliciens. Quoique cette déplorable situation soit applaudie par les politiciens occidentaux négrophobes et racistes qui ont leurs entrées dans les présidences africaines et qui répètent à l’envie que l’Afrique a besoin des « hommes forts », de « stabilité », cette absence de changement politique est un véritable symbole de honte, comme la clique au pouvoir au Togo vient de le découvrir.

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Le nombre de mandats présidentiels auxquels « on a droit » n’est nullement synonyme de progrès de son pays vers une société ouverte, bien au contraire. Pour avoir feint de l’ignorer, le régime militaire togolais vient d’être rattrapé par la réalité du monde : l’administration Biden vient de lui rappeler qu’il porte toujours et cela depuis trop longtemps la marque de la bête, un anathème pour ceux qui veulent construire un monde démocratique pour tous. Personne ne le dira au journal de la TVT, mais c’est comme ça.

A. Ben Yaya

New York, 9 décembre 2021



U.S. President Joe Biden convenes a virtual summit with leaders from democratic nations at the State Department’s Summit for Democracy, at the White House, in Washington, U.S. December 9, 2021. REUTERS/Leah Millis

Source : Togoweb.net