Situation sociopolitique critique au Togo : La diaspora, une solution face à la descente aux enfers.

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Depuis cinquante ans, les générations successives que le Togo a connues vivent à tour de rôle une situation catastrophique, unique en son genre. Le pouvoir qui a pris en otage le pays depuis lors semble se complaire dans une aisance éternelle malgré les soubresauts qui l’ont fait vaciller au début des années 1990, puis après la mort de sa figure de proue, Eyadema Gnassingbé en 2005.

Situation sociopolitique critique au Togo : La diaspora, une solution face à la descente aux enfers.

Du processus de démocratisation qui a soufflé dans certains pays francophones d’Afrique dont le Togo en 1990 à la mort de feu Eyadema en 2005 en passant par la conférence nationale de 1991, le multipartisme, la grève  générale de 1992-1993, les élections législatives de 1994 remportées par l’opposition, l’accord-cadre, les 22 engagements pris devant l’Union Européenne, le régime en place au Togo a toujours su déjouer toutes les situations qui pourraient concourir à une alternance pacifique. Même l’Accord Politique Global signé en 2006 au lendemain des événements douloureux qu’a connus le Togo quelques mois plutôt n’a rien donné. A ce jour, le constat est plus que révoltant : le Togo est dans une situation plus qu’exsangue et l’avenir s’assombrit quotidiennement. Face à cette situation, il importe de tirer les leçons du passé afin de réorienter le futur.

Les fondements de la situation exsangue du Togo ; que faut-il faire pour s’en sortir ?

La situation sociopolitique délétère que vit actuellement le Togo est sans l’ombre d’un doute, la  résultante de plusieurs facteurs qui non seulement s’entremêlent mais aussi se complètent. On peut énumérer la division ou l’infiltration de l’opposition par des pions du régime en place, l’usage des moyens d’Etat à des fins propagandistes par le parti au pouvoir, l’armée comme instrument de répression des velléités contestatrices, une société sous-informée, incapable de s’organiser et enfin l’apport de la diaspora. L’urgence de l’heure est donc pluridimensionnelle et mérite donc une parfaite coordination et une symbiose des actions pour atteindre les objectifs. Les cadors de la lutte politique qui avaient à une période donnée fait douter Eyadema se retrouvent tous pratiquement collaborateurs de son fils  aujourd’hui. Yawovi Agboyigbo, Edem Kodjo, Gilchrist Olympio, Leopold Gnininvi, et autres ne peuvent plus rien pour le Togo de nos jours. Difficile de parler de la recherche d’intérêts personnels ou de servir  plutôt de pion pour perpétuer la dynastie.

Ce qui est plus désolant, c’est que l’émergence d’une nouvelle classe apte à reprendre la lutte semble avoir du plomb dans l’aile. A côté des vieux briscards se trouvent de jeunes loups prompts à pourfendre toute sorte d’initiative, allant de l’intoxication à la démobilisation en passant par la désinformation. Les compromissions les plus abjectes sont souvent au rendez-vous, sans gêne aucune. Au sein du parti au pouvoir, on confond les moyens et biens publics aux moyens du parti. C’est en cela que tout ce qui doit se faire pour le bien-être de la population prend des colorations politiques. Les projets et programmes du gouvernement sont considérés par la population comme des faveurs venues d’une personnalité providentielle à qui l’on doit des remerciements éternels. Devant une population majoritairement analphabète et dont les désirs sont orientés vers le divertissement, la sous-information joue son rôle en maintenant naturellement le citoyen togolais dans une obscurité totale. Le musellement des médias et la canalisation des esprits a fini par légitimer certains comportements qui doivent normalement être condamnés. La société civile essentiellement composée d’associations et organisations non gouvernementales ne dispose d’aucuns moyens de contrainte.

D’ailleurs, la précarité collective en a fait un levier beaucoup plus au service du pouvoir en place qu’un véritable défenseur des causes communes, beaucoup d’associations oeuvrant plutôt pour s’attirer des faveurs financières du régime. Face à cette situation, il faut noter quelques poches de résistance et d’expression que l’on essaie de faire taire soit par une justice aux ordres ou une armée experte en répression sauvage sous le sceau incongru de la discipline.

Que reste-t-il alors comme espoir au peuple togolais pour sa libération ?

Toute initiative endogène est à saluer et à encourager. Les toutes premières prises de position en faveur du changement de la situation doivent provenir de l’intérieur quand bien même les difficultés d’action dans ce sens sont très restreintes. Cependant, s’inspirant de l’exemple récent de la Gambie, la diaspora togolaise malgré ses faiblesses, se doit de retrousser ses manches pour se tourner résolument vers un lobbying performant et positif. La diplomatie de chéquier que mène le pouvoir de Faure Gnassingbé a fini  par occulter les réalités togolaises au point que certaines personnalités sont tentées de citer le Président togolais en modèle. C’est à ce niveau que la diaspora doit se rendre compte que son rôle qui jusqu’alors se limite à l’injection de ressources financières dans les ménages togolaises est révolu. Si la solidarité africaine voudrait qu’on vienne en aide à celui qui est dans le besoin, il faut aussi rappeler qu’il vaut mieux combattre le mal à la racine une fois pour de bon que de passer du temps à panser les plaies. La paupérisation qui sévit au Togo  est la faute du régime des Gnassingbé. Et c’est un devoir citoyen que de mettre en place tous les moyens pour changer le visage de la gouvernance et aboutir à l’alternance.

La diaspora se doit donc de militer à faire voir les vraies réalités du Togo à l’international, une façon de prendre le contre-pied du saupoudrage de la situation par le pouvoir de Lomé. Les projecteurs doivent être braqués sur le Togo et il ne peut en être autrement si le champ est laissé à l’abandon pour que l’ivraie se répande comme bon lui semble. Violations des droits humains, injustices, détournements de fonds publics, mauvaise gouvernance, éducation et santé sacrifiée, aucun sujet ne devra être tabou. C’est la seule condition qui, conjuguée aux efforts internes de quelques rares politiques, peut encore être la source de salut de l’Or de l’Humanité.

Source : Kossi Ekpé, Le Correcteur No.752 du 21 mars 2017

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