Serail: quand Faure Gnassingbé promeut le genre et enterre le RPT

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Faure Gnassingbé a nommé lundi 28 septembre 2020 Victoire Tomégah Dogbé, au poste de Premier ministre en remplacement de Komi Sélom Klassou, démissionnaire depuis vendredi dernier. En attendant la composition du nouveau gouvernement, le chef de l’Etat togolais a procédé à d’autres nominations importantes.

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Deux décrets ont été pris lundi par le président togolais. Le premier nomme Victoire Sidemeho Djidudu Tomegah Dogbe comme Premier ministre du Togo. Elle était jusqu’à cette nomination, directeur de cabinet du président de la République, poste qu’elle cumulait avec le ministère du Développement à la base où elle avait été nommée en 2009.

Le second décret nomme Sandra Ablamba Ahoéfavi Johnson au Secrétariat général de la présidence en remplacement de Patrick Daté Têvi-Benissan décédé. Elle était ministre déléguée, conseillère du chef de l’Etat en charge du climat des affaires. Elle était, pour faire simple, « l’ange gardien » des entreprises du Togo.

Dans le même temps, Kanka-Malick Natchaba quitte son poste de ministre délégué, conseiller du chef de l’Etat et Coordonnateur de la cellule présidentielle d’exécution et de suivi des projets prioritaires (CPES) pour poser ses valises au Secrétariat général du Gouvernement.

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Inhumation du RPT, petite consolation pour UNIR

L’ancien parti présidentiel était enterré depuis avril 2014. Juridiquement du moins. Mais malgré sa dislocation, le Rassemblement du peuple togolais (RPT) était toujours présent dans le jeu politique togolais. Les pratiques anciennes à travers des figures tutélaires de l’ex-parti unique avaient encore la vie dure. L’un des derniers symboles de l’ancien parti unique à occuper un poste aussi important dans l’appareil étatique reste Selom Klassou, un militant de la première heure qui a fait toutes ses armes et gravi les échelons au sein du parti créé par Gnassingbé Eyadema.

Les vieux caciques de l’ancêtre d’UNIR sont aujourd’hui soit fatigués par le poids de l’âge, soit tombés en disgrâce, soit contraints de déambuler dans les couloirs du palais de Lomé II sans vraiment avoir de l’influence sur le locataire des lieux qui a pris des galons au fil des années. Il a fallu la crise du coronavirus pour sortir l’ancien Secrétaire général du RPT Esso Solitoki du trou. Barry Moussa Barqué et Aboudou Assouma restent les dernières figures chargées de rappeler que le RPT est encore en embuscade.

La nomination du fils de Fambaré Natchaba est une petite consolation pour l’Union pour la République. Même s’ils appartiennent à la même famille politique, la plupart de ceux qui occupent aujourd’hui les principaux postes au sommet de l’Etat ne sont des militants de première heure. Victoire Tomegah est venue trouver le parti en tant que fonctionnaire du Programme des nations unies pour le développement (PNUD). Elue à la présidence de l’Assemblée nationale, Chantal Djigbodi Yawa Tsègan est une ouvrière de la cinquième heure. L’effacement de Mémounatou Ibrahima, qui n’a pas facilement digéré l’ascension de l’actuelle présidente de l’Assemblée nationale, est une autre illustration que le RPT appartient au passé.

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Ces nominations cachent mal aussi une évidence : la rareté des compétences clefs à UNIR. En effet, en dehors de Selom Komi Klassou, le premier ministre démissionnaire, Dama Dramani, ancien président de l’Assemblée nationale togolaise, et Pascal Bodjona, ancien bras droit du président togolais, Faure Gnassingbé s’est très peu confié aux ténors du RPT, voire d’UNIR qui semblent n’être que des déserts de compétences. Ou bien, il manque de compétences clefs dans sa famille politique, ou bien il y a une crise de confiance entre lui et les ténors de sa formation politique. En tous les cas, dès son arrivée au pouvoir, Faure Gnassingbé n’a pas caché son intention de rompre avec l’héritage politique de son géniteur. La fameuse phrase « lui, c’est lui, moi, c’est moi » résonne encore dans les esprits. Même s’il y a des éléments irréfutables de la continuité, le président togolais a quand même réussi à ébranler les fondements de l’ancien système en se constituant un nouveau portefeuille d’amis et de fidèles qui occupent désormais les postes stratégiques de l’Etat. Gilbert Bawara et Christian Trimua sont les symboles de cette génération qui porte le pouvoir politique de Faure.

Le pouvoir aux femmes et à la jeunesse

En nommant Victoire Tomegah Dogbe à la Primature, Faure Gnassingbé a d’abord réglé un problème, celui des humeurs de deux amies devenues des rivales au palais présidentiel où toute cohabitation était devenue presque impossible. Reckya Madougou peut désormais respirer un grand coup, elle qui a été introduite dans le circuit par Dame Tomegah. Fini donc « les scènes de ménage » au sommet de l’Etat !

Mais, à vrai dire, la nomination du désormais ex-directeur de cabinet comme chef du gouvernement togolais est une consécration pour la gent féminine. On a désormais un pouvoir exécutif homme-femme et un législatif coiffé par une femme. C’est la fin de la phallocratie au sommet de l’Etat.

Cela se concrétise également par le poste qui vient d’être attribué à Ablamba Johnson. C’est une première. Une femme Secrétaire générale de la présidence de la République. Economiste de formation, Sandra Johnson, la quarantaine, s’est évertuée à dépoussiérer l’administration togolaise et à faciliter le business des entreprises privées. Femme et jeunesse sont donc deux atouts essentiels pour celle qui est devenue depuis ce lundi la cheville ouvrière de la présidence togolaise.

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Kanka-Malick Natchaba fait partie de la jeune garde du parti présidentiel. Fils de l’ancien président de l’Assemblée nationale togolaise et pilier important du pouvoir de Gnassingbé Eyadema, le tout nouveau Secrétaire général du gouvernement est une petite victoire pour UNIR.

Quelle va être la physionomie de la nouvelle équipe gouvernementale ? Faure Gnassingbé va-t-il miser davantage sur le leadership féminin et la jeunesse ? L’évidence est que les militants ne savent que faire la politique politicienne, les ouvriers sont de purs technocrates qui n’ont pas la stratégie politique dans leur ADN. Et c’est précisément ces derniers qui semblent mieux remplir les critères d’embauche définis par le premier des Togolais, spécialiste des surprises.

Ambroise DAGNON

Courrierdafrique.net


Source : Togoweb.net