Scandales au Togo : le silence coupable des gendarmes financiers et des partenaires

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Le Togo sous Faure Gnassingbé est une terre de paradoxes, et c’est une constante. Dans le domaine financier notamment, les discours et professions de foi promouvant la lutte contre la corruption et la bonne gouvernance s’enchainent dans les rangs des gouvernants. Des structures de contrôle et/ou de répression des crimes économiques existent à foison. Mais c’est l’indifférence plate de tous ces gendarmes financiers devant les grands scandales de la République. De même que les partenaires du Togo qui semblent, eux aussi, s’accommoder des détournements érigés en mode de gouvernance. Un silence manifestement coupable de tout ce beau monde.


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Tous ces vices ne sont pas nouveaux, ils étaient déjà bien ancrés dans la gouvernance du père durant quatre décennies. Mais tout autant que les tueries et violations des droits de l’Homme, les scandales financiers rythment la gérance du fils. Ces fléaux économiques semblent avoir trouvé un terreau plus favorable avec Faure Gnassingbé. 

Du « Wacemgate », entendu les loucheries qui caractérisent le secteur du ciment à l’ « Adjaklygate », ces pratiques mafieuses entourant l’importation du pétrole au Togo en passant par l’affaire du chantier de la route Lomé-Vogan-Anfoin, l’affaire des fonds des CAN 2013 et 2017, le cas de Togo Télécom avec Sam Bikassam, les phosphates et les gestions successives marquées par des prévarications, les détournements de milliards à l’ex-FER (Fonds d’entretien routier), les scandales financiers ont jalonné la gérance de Faure Gnassingbé. Les prévarications diverses, la corruption, l’enrichissement illicite sont devenus banals – d’aucuns se gaussent qu’il est en promotion de ces vices. Le « Prince » lui-même est passé aux aveux en 2012, concédant tacitement l’accaparement par une minorité des richesses nationales et la condamnation à l’indigence de la grande majorité. Mais il n’a rien fait pour mettre fin à ces pratiques nuisibles aux finances et au développement, les auteurs ne sont jamais inquiétés.

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Des gendarmes financiers…

Proportionnellement au foisonnement des scandales, il existe autant de gendarmes financiers, ces structures censées enquêter sur les cas de détournement, corruption et autres crimes économiques, traquer les auteurs et veiller à la bonne gouvernance. C’est une foultitude qui existe. 

D’abord l’Inspection d’Etat. Logée à la Présidence de la République, le commun des Togolais croyait que cette structure ne souffrirait d’aucune autorité pour agir. Mais elle est amorphe et n’est qu’un vestige, dirigée par un retraité, nous revient-on, depuis une quinzaine d’années. A côté, l’Inspection des Finances, placée sous l’autorité du ministre des Finances. Ici aussi, RAS, rien à signaler en termes d’actions. Il existe également une Inspection du Trésor et une Cour des comptes. Mais Dieu sait ce à quoi servent au juste toutes ces structures. La dernière de la série, c’est sans doute la HAPLUCIA créée en 2015.

La Haute autorité de prévention et de lutte contre la corruption et les infractions assimilées a pour mandat d’investiguer et de rassembler les preuves sur des affaires de détournement, corruption et autres…De jolis textes ont été élaborés, adoptés et beaucoup de bruits faits par les gouvernants autour du lancement de cette structure marqué par le folklore. Mais la HAPLUCIA aussi ne fait qu’orner le décor, comme ses ainées. Toutes ses activités se réduisent à l’organisation de séminaires et autres sorties juste pour amuser la galerie. Et tout porte à croire que ce ne sera pas la dernière structure destinée à la lutte contre la corruption et les crimes économiques.

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« Nous avons mis en place des institutions à cet effet (contrôle des finances publiques, lutte contre la corruption et les détournements, Ndlr) pour contrôler les organes de l’Etat. Pour la prévention de la corruption, il y a la HAPLUCIA. Nous allons compléter le dispositif avec un organe qui sera chargé de la répression », avait déclaré Faure Gnassingbé en février dernier lors de sa campagne électorale pour le scrutin du 22 février 2020. L’on tend donc vers la création d’un nouvel organe purement de répression des crimes économiques. Pour quelle action ? Lui autre sera-t-il efficace ? Ce sont les questions légitimes qu’il convient de se poser devant l’inaction de tous les gendarmes financiers qui se révèlent budgétivores mais ne servent pas à grand-chose.

Juste pour le décor, impunité pour les prévaricateurs

Au-delà des nombreuses structures devant connaitre des crimes économiques, des numéros verts (8277 et 1014) ont été institués, dit-on, pour offrir l’opportunité aux citoyens de dénoncer des cas de corruption. Mais tout cela se révèle une grande arnaque. Même les cas documentés et révélés par la presse, suite à des investigations bien menées, ne connaissent aucune suite. C’est l’indifférence totale des gouvernants qui ne cessent pourtant de chanter une certaine lutte contre la corruption et se mettent dans la peau de chantres de la bonne gouvernance dans leurs discours. Les nombreux gendarmes financiers ne s’autosaisissent jamais pour investiguer et servir. C’est depuis 2019 qu’il a été annoncé la transmission des dossiers des CAN 2013 et 2017 et autres à la justice. Le commun des citoyens croyait à l’imminence des poursuites. Mais depuis, c’est le silence radio.

Le comble, c’est quand les auteurs de ces crimes économiques dénoncés se permettent même d’ester en justice contre les organes de presse qui font ce travail de salubrité publique. C’est le cas d’actualité de Fabrice Adjakly, au centre des manœuvres autour de l’importation du pétrole au Togo, qui porte plainte contre L’Alternative pour avoir mis au grand jour cette mafia. Ce culot du fils Adjakly n’est que la résultante de l’impunité accordée aux auteurs des détournements et autres crimes économiques au Togo. Les responsables des différentes structures où se produisent des détournements, des malversations autour de sommes folles, des milliards, ne sont jamais inquiétés. La raison est simple, il s’agit généralement des pontes du régime qui rendent souvent bien des services pour sa continuité. Les arrêter et les poursuivre, c’est comme pour le pouvoir se faire hara-kiri. Une cocasserie consiste souvent à juste changer le nom à la structure concernée et le tour est joué. Jamais les responsables des prévarications ne sont inquiétés ( Ferdinand Tchamsi avec l’ex-FER, Sam Bikassam avec l’ancien Togo Telecom, les ministres incriminés dans l’affaire du chantier Lomé-Vogan-Anfoin, les auteurs des malversations sur les fonds de la CAN 2017, entre autres).

Non moins désolante est l’attitude des partenaires financiers. Les responsables de la Banque Mondiale, du Fonds monétaire international (FMI), les représentants diplomatiques divers n’hésitent pas, dans leurs sorties, à amadouer le gouvernement en place et les gouvernants pour de pseudos réformes opérées. Le Togo a été récemment identifié comme le pays le plus réformateur d’Afrique en matière de climat des affaires et il a été organisé une fête pour célébrer l’événement. 

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Certains de ces partenaires financiers, qui viennent pourtant de pays civilisés (sic) en matière de bonne gouvernance où la moindre loucherie (non déclaration d’impôt par exemple) peut valoir à son auteur la prison, vont jusqu’à darder une certaine amélioration de la gouvernance, décernant presque des tableaux d’honneur aux dirigeants togolais. Mais tout ce beau monde aussi se tait royalement devant les grands scandales financiers révélés par la presse. Un silence qui apporte davantage d’eau au moulin de certains qui voient de plus en plus en ces partenaires financiers, de simples businessmen qui sont en relations d’affaires avec les gouvernants en place.

Fraternité

Source : Togoweb.net