L’accident vasculaire cérébral (AVC) provoqué par une interruption brutale de l’irrigation du sang vers le cerveau, est une maladie en pleine expansion au Togo et une question de santé publique.
Une prise en charge rapide des patients permet le plus souvent de sortir ces victimes de situations préjudiciables et d’une issue qui peut être fatale.
Sous la conduite de Didier Koku Adjogble, un citoyen togolais résident en Allemagne, un système de suivi des patients est en voie de déploiement dans plusieurs pays africains. De quoi s’agit-il, comment fonctionne-t-il et quels sont les coûts de son utilisation ? Didier Koku Adjogble, apporte des lumières à ces interrogations dans l’entretien à suivre.
Afreepress : Bonjour M.¸ Didier Koku Adjogble. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’on entend par maladie cardio-vasculaire (AVC) ?
Didier Koku Adjogble : Avant tout, je voudrais vous remercier pour votre considération et pour votre engagement dans la lutte globale comptant pour la campagne mondiale de Lutte contre les Accidents Vasculaires Cérébraux. Il s’agit ici d’un phénomène d’envergure mondiale avec une progression exponentielle alarmante.
Selon un rapport publié par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en 2011 sur la situation mondiale des maladies non transmissibles, on estime à 17,3 millions, le nombre de décès imputables aux maladies cardio-vasculaires, soit 30 % de la mortalité mondiale totale. Parmi ces décès, on estime que 6,2 millions sont dus à un accident vasculaire cérébral.
Un accident vasculaire cérébral résulte de l’arrêt de la circulation sanguine dans le cerveau, généralement quand un vaisseau sanguin est bloqué par un caillot dans 85% des cas ou éclate dans 15% des cas. Par conséquent, il y a un arrêt de l’apport en oxygène et en nutriments entrainant l’endommagement des tissus cérébraux.
Le signe le plus courant de l’AVC est une faiblesse subite ou une perte de la sensibilité de la face ou d’un membre, la plupart du temps d’un seul côté du corps.
Permettez-moi, de citer quelques facteurs de risque. Certains facteurs peuvent être prévenus, d’autres non.
Le tabagisme, l’abus du tabac. Un taux élevé de cholestérol dans le sang. Si on mange trop gras, si on souffre d’obésité ou si on ne pratique pas d’activité physique, le mauvais cholestérol ou LDL cholestérol augmente dans le sang et s’accumule sur les parois des artères sous forme de dépôts graisseux. Par exemple, l’huile de palme contient un taux très élevé en mauvais cholestérol.
L’utilisation de l’huile de palme est particulièrement rependue dans l’art culinaire africain. En principe, l’huile de palme n’est pas plus mauvaise pour la santé que le beurre, par contre, c’est sa consommation excessive qui entraîne des problèmes de santé.
À cela vient s’ajouter utilisation fréquente de l’huile de palme dans les produits de nos supermarchés, comme dans le chocolat, le Nutella, favorisant l’obésité et l’apparition de maladies cardio-vasculaires. Je conseillerais ici une consommation modérée de l’huile de palme surtout dans les cas des personnes à risque.
La consommation d’alcool, quel que soit son niveau accroît le risque d’AVC.
Le diabète, l’hypertension artérielle et la fibrillation auriculaire peuvent aussi provoquer des AVC.
Le risque d’un AVC augmente avec l’âge, après 50 ans chez l’homme et après 60 ans chez la femme.
Existe-t-il un mode de traitement précoce de cette maladie ?
La prévention ou le diagnostic précoce réduisant le risque d’une attaque ou limitant les dégâts est un élément central dans la lutte contre les maladies cardiovasculaires. Il va sans dire que les moyens de prévention ou de diagnostic sont bien plus disponibles dans les pays dits développés ou à revenu élevé qu’ailleurs. Cela signifie que nous aurons à enregistrer moins de victimes dans les pays à revenus élevés que dans les pays à revenus faibles, d’autant plus que la détection précoce et l’enclenchement d’une thérapie préventive adaptée permettent d’éviter l’accident.
Les enfants et même les nourrissons peuvent être aussi victimes d’un accident vasculaire cérébral.
Togolais de la diaspora, vous portez un projet d’espoir pour les victimes aussi bien au Togo qu’en Afrique.
La cardiologie est l’une des disciplines les plus développées de la médecine aussi bien sur le plan des médicaments que celui des dispositifs médicaux ou de la technologie médicale. Nous sommes aujourd’hui à l’époque de la télémédecine. Nous avons donc la possibilité d’agir sur certaines barrières, en l’occurrence, celles du ratio un médecin pour presque 16000 patients en Afrique ou celle des coûts pour la prise en charge des patients. Je citerais aussi au passage la réduction par le biais de la télémédecine de la contamination due aux maladies nosocomiales au niveau de nos hôpitaux. Par le biais de la télémédecine, le suivi et la prise en charge à distance d’un patient est chose possible aujourd’hui. C’est dans ce cadre que j’agis au niveau de ma société, implantée en Allemagne, pour la promotion des nouvelles technologies médicales en Afrique en général et au Togo en particulier.
Nous sommes en train d’implanter, entre autres, une technologie de détection d’arythmies cardiaques ou troubles de battement du cœur chez le patient quel que soit sa situation géographique. Étant donné que l’appareil est équipé d’une carte SIM avec GSM, donc pouvant transmettre les données au médecin traitant, voire même à 5 différents médecins simultanément. Le patient après une première visite chez son médecin, qui généralement se trouve dans les grandes agglomérations, pour le cas de l’Afrique, pourrait être équipé de cet appareil et être suivi ou pris en charge de loin par son médecin. Les coûts restent assez supportables même pour les patients qui devraient encore malheureusement payer cash les dépenses médicales comme dans le cas de la plupart des pays de l’Afrique de l’Ouest. L’implantation du système est dans une phase un peu plus avancée au Rwanda, car plus de 90% de la population bénéficie d’une assurance maladies qui prendra en charge les coûts engendrés. Le Rwanda nous permet d’agir plus facilement par rapport à la retransmission des données mêmes en milieu rural, car le pays a une couverture en 4G de près de 90% de l’étendue du territoire, selon Monsieur Joseph Ngenzi, l’un des chargés du programme national de la promotion de la télémédecine au Rwanda.
Ces traitements sont-ils accessibles à tous, même aux plus démunis ?
En général, le secteur de la santé est une affaire qui coûte cher aussi bien au niveau des infrastructures qu’au niveau de la prise en charge des coûts engendrés. La situation n’est pas fondamentalement différente même dans les pays à revenus élevés. Je citerais l’exemple contemporain des États-Unis qui se cherche encore en la matière, une des plus grandes puissances économiques mondiales. Les États-Unis pourraient prendre exemple sur le Rwanda en la matière. Vous voyez que nous devrions éviter d’aller chercher l’expertise en la matière en Europe ou en dehors du continent africain, puisque nous en avons déjà à côté.
Je le disais tantôt, que les coûts sont quelque peu supportables. Ils seraient encore plus supportables si nos États Africains reconsidéraient leur budget alloué au secteur de la santé. Il nous faudrait aussi la mise en place de projets de société visant à alléger les dépenses pour la prévention ou pour la prise en charge médicale par le biais d’assurance maladie à la portée de nos concitoyens. Cette assurance devrait recevoir forcément des subventions directes ou indirectes de l’État. Les exemples sont multiples sur le continent africain.
Les dépenses en santé publique ne diminueront pas, mais connaîtrons plutôt une augmentation de l’ordre 10-20% dans les 10 prochaines années.
À quand son opérationnalisation et quels sont les organismes qui soutiennent sa réalisation ? Combien de patients bénéficiaires la première année ?
Les systèmes ou technologies permettant un bon diagnostic aussi bien que les médicaments facilitant une bonne prévention d’un AVC ont atteint aujourd’hui un niveau très élevé en qualité, en efficacité et en effectivité. La plupart des médicaments et des appareils classiques de diagnostic sont déjà disponibles en Afrique.
Les nouvelles technologies, en l’occurrence celles utilisées en télémédecine, ne tarderont pas à trouver leur place en Afrique. Nous rencontrons encore quelques difficultés dans certains pays africains par rapport aux infrastructures en télécommunication encore non-développées ou encore trop faibles pouvant soutenir la retransmission de données. Par exemple, j’ai eu à tester en début de cette année pendant mon séjour au Togo l’appareil équipé de carte SIM avec GSM, dont je vous parlais plutôt. Nous avions éprouvé quelques difficultés de retransmission de données après la prise des mesures. Ce problème devrait trouver sous peu son dénouement selon les informations que j’ai reçues il y a de cela quelques jours de la part du fabriquant de l’appareil et de la part du fournisseur d’accès à l’internet ou téléphonie au Togo. Toutefois le forfait d’accès à l’internet influant sur le forfait de retransmission reste encore élevé au Togo.
Le forfait au Togo fait presque le double du tarif applicable par exemple au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Nigeria, au Mali ou au Rwanda pour ne citer que ceux-là. Un arrangement aboutissant sur la baisse de ce forfait agira directement sur les coûts que devraient supporter le patient utilisateur de cet appareil. J’espère que le Togo emboitera sous peu le pas aux autres pays de la sous-région en la matière.
Propos recueillis par F. Y. A
Source : AfreePress
27Avril.com